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22/12/2009 | FRANCE | N°07LY02684

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 22 décembre 2009, 07LY02684


Vu la requête, enregistrée le 3 décembre 2007, présentée pour Mme Pascale A, domiciliée ...) ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601861 en date du 27 septembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision n° 135-17 du 15 mai 2006 par laquelle le président du conseil d'administration de La Poste a maintenu la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux ans prise à son encontre ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée ;



3°) d'ordonner sa réintégration immédiate avec toutes conséquences pécuniaires et d...

Vu la requête, enregistrée le 3 décembre 2007, présentée pour Mme Pascale A, domiciliée ...) ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601861 en date du 27 septembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision n° 135-17 du 15 mai 2006 par laquelle le président du conseil d'administration de La Poste a maintenu la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux ans prise à son encontre ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée ;

3°) d'ordonner sa réintégration immédiate avec toutes conséquences pécuniaires et de carrière rétroactivement depuis la suspension ;

4°) de lui allouer 10 000 euros de dommages et intérêts ;

5°) de mettre à la charge de La Poste la somme de 3 600 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Mme A soutient que :

- elle n'a ni manqué aux règles déontologiques applicables aux agents de La Poste, ni mis à profit ses fonctions pour obtenir un prêt ;

- au cours de sa carrière, sa manière de servir a toujours été satisfaisante, elle connaissait à l'époque des problèmes personnels, M. B n'était plus son client, mais était devenu une relation amicale, il n'y avait plus de relation commerciale entre eux, La Poste n'a subi aucun préjudice, elle s'est acquittée pendant plusieurs mois de 300 euros pour rembourser la somme de 7 500 euros avant d'interrompre ses versements faute de revenus et elle a signé une reconnaissance de dette pour l'emprunt de 30 000 euros avant que M. B ne l'annule ;

- la réalisation de faux et l'abus de confiance ne sont pas caractérisés ;

- le directeur de La Poste n'a pas accepté de la recevoir afin qu'elle puisse donner toutes ses explications ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les courriers, enregistrés les 9 décembre 2008 et 24 février 2009, présentés pour Mme A informant la Cour de ce que Mme Ginette C, mère de l'intéressée reprenait l'instance, suite au décès de sa fille ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 mars 2009, présenté par La Poste, qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 000 euros soit mise à la charge des ayants droit de Mme A ;

Elle soutient que :

- à titre principal, la requête est irrecevable dès lors qu'elle ne contient aucune critique du jugement attaqué ;

- à titre subsidiaire : le caractère fautif des faits reprochés à Mme A a été reconnu par l'ensemble des membres du conseil de discipline, par la commission de recours du conseil supérieur de la fonction publique ; Mme A a reconnu elle-même la matérialité des faits ; elle s'est rendue coupable d'une violation des règles déontologiques et d'une mise à profit de ses fonctions à des fins personnelles constitutives de fautes disciplinaires ;

- ces fautes constituant des manquements à l'honneur et la probité ainsi qu'à l'obligation de désintéressement, sont particulièrement graves d'autant qu'elles ont été commises par une personne à laquelle était confiée des responsabilités, qu'elles ont été commises à l'encontre d'une personne vulnérable et que cette affaire a été de nature à jeter le discrédit sur La Poste : aucune erreur manifeste d'appréciation n'a, dès lors, été commise ;

- Mme A a eu connaissance du patrimoine de M. B alors qu'il était son client ; au moment des faits litigieux, Mme A était toujours agent de La Poste et M. B, toujours client de La Poste ; ainsi, les faits commis n'étaient pas dépourvus de tout lien avec le service et pouvaient être sanctionnés ;

- ce comportement a été de nature à nuire à l'image de La Poste ;

- l'argumentation tendant à démontrer que la réalisation de faux et l'abus de confiance ne sont pas réalisés est inutile dès lors que la sanction prononcée n'est nullement fondée sur de tels éléments ;

- Mme A a pu faire valoir ses observations à diverses reprises avant le prononcé de la sanction ;

- s'agissant des conclusions à fin d'injonction : en l'absence de service fait, les traitements non perçus au cours de la période d'exclusion ne peuvent être versés ;

- les mesures d'exécution ne sauraient rétroagir à la date à laquelle la décision de suspension est intervenue ;

- les conclusions indemnitaires sont irrecevables en l'absence de demande préalable et elle n'entend pas lier le contentieux ;

Vu la lettre en date du 10 novembre 2009, informant les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la décision à intervenir est susceptible d'être fondée sur un moyen soulevé d'office ;

Vu le mémoire, en réponse au moyen d'ordre public, enregistré le 25 novembre 2009, présenté pour La Poste, qui soutient, à titre principal, que la requête ne contient aucun moyen de légalité externe, à titre subsidiaire, que ce moyen est irrecevable, et en tout état de cause, que ce moyen n'est pas fondé ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 décembre 2009 :

- le rapport de Mme Pelletier, premier conseiller ;

- les observations de Me Crozier, représentant La Poste ;

- les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;

- la parole ayant été à nouveau donnée à la partie présente ;

Considérant que, par la présente requête, Mme A demande à la Cour d'annuler le jugement en date du 27 septembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision n° 135-17 du 15 mai 2006 par laquelle le président du conseil d'administration de La Poste a maintenu la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux ans prise à son encontre ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non recevoir soulevée par La Poste :

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, dans sa demande devant le Tribunal administratif de Dijon, la requérante n'avait invoqué que des moyens tirés de la légalité interne de la décision du 15 mai 2006 prononçant la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux ans; que dans sa requête d'appel, la requérante fait valoir que le directeur de La Poste de l'époque n'a jamais accepté de la recevoir afin qu'elle puisse donner toutes explications ; que ce moyen de légalité externe, nouveau en appel, qui se rattache à une cause juridique distincte de celle afférente aux moyens invoqués dans la demande introductive d'instance et ne présentant pas un caractère d'ordre public, est, dès lors, irrecevable ;

Considérant, en deuxième lieu, que les règles auxquelles était soumise Mme A, contenues tant dans le document intitulé Mon métier, sa déontologie , destiné aux conseillers financiers et autres acteurs de la vente du domaine financier de La Poste, que dans les dispositions de l'instruction du 26 août 2003 portant règlement intérieur de La Poste, font interdiction aux agents concernés par l'exercice de ces fonctions de solliciter, accepter ou percevoir une quelconque rémunération de la part du client et d'user de leurs connaissances de la clientèle pour profiter de libéralités ;

Considérant que pour infliger à Mme A la sanction de l'exclusion temporaire d'une durée de deux ans, le président du conseil d'administration de La Poste s'est fondé sur la double circonstance qu'au cours de l'année 2004, l'intéressée a accepté une importante somme d'argent de la part d'un client âgé et vulnérable et a mis à profit ses fonctions pour solliciter et obtenir un prêt important de ce même client ; que même si elle entretenait des relations amicales suivies avec ce client de Dun-Les-Places qui ne faisait plus partie de son portefeuille client depuis 2002, date de son affectation à Chateauneuf-Val-de-Bargis et qu'elle n'était plus en relation professionnelle avec l'intéressé, les règles déontologiques de sa profession ainsi que l'obligation de désintéressement à laquelle sont contraints tous les fonctionnaires faisaient obstacle à ce qu'elle acceptât cette libéralité et puisse obtenir ce prêt ; qu'ainsi, les faits reprochés à l'intéressée sont de nature à justifier légalement l'application d'une sanction disciplinaire sans qu'y fasse obstacle les circonstances qu'en dix-neuf ans de carrière, elle ait toujours fait preuve d'excellents états de service et qu'elle ait été particulièrement bien notée durant les cinq années précédant la sanction ;

Considérant, en dernier lieu, que la requérante ne peut utilement faire valoir que le client de La Poste qui lui a consenti le don et le prêt litigieux, en pleine connaissance de cause et de son plein gré , n'a pas porté plainte et qu'aucune réalisation de faux ou d'abus de confiance ne peut lui être reprochée, dès lors que la décision attaquée ne repose pas sur de tels motifs ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, en date du 27 septembre 2007, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions indemnitaires :

Considérant qu'en l'absence d'illégalité fautive, la responsabilité de La Poste n'est pas engagée à l'égard de la requérante ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité, les conclusions tendant à la condamnation de La Poste à lui payer des dommages-intérêts doivent être rejetées ;

Sur les conclusions à fins d'injonction :

Considérant que le rejet des conclusions tendant à l'annulation de la décision de La Poste du 15 mai 2006 prononçant la sanction disciplinaire de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux ans entraîne, par voie de conséquence, le rejet des conclusions tendant à ce que la Cour enjoigne à l'administration de réintégrer la requérante, de reconstituer sa carrière, et de lui verser des rémunérations ;

Sur les conclusions relatives aux frais exposés dans l'instance :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que La Poste, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à la requérante la somme qu'elle demande au titre des frais de procès non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'affaire, de condamner la partie perdante à verser à La Poste la somme qu'elle demande sur le même fondement ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de La Poste tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Ginette C et à La Poste.

Délibéré après l'audience du 15 décembre 2009 à laquelle siégeaient :

M. Givord, président,

M. Seillet, premier conseiller,

Mme Pelletier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 décembre 2009.

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N° 07LY02684


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07LY02684
Date de la décision : 22/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GIVORD
Rapporteur ?: Mme Pascale PELLETIER
Rapporteur public ?: Mme SCHMERBER
Avocat(s) : THURIOT DENIS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2009-12-22;07ly02684 ?
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