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08/12/2009 | FRANCE | N°07LY01951

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 08 décembre 2009, 07LY01951


Vu la requête enregistrée, le 29 août 2007, présentée pour M. Fernand A domicilié, ...;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0305358 en date du 7 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Talloires à lui verser la somme de 543 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de l'illégalité du classement en zone constructible des terrains qu'il possède au lieudit Les Balmettes, ainsi que la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'

article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de condamner la co...

Vu la requête enregistrée, le 29 août 2007, présentée pour M. Fernand A domicilié, ...;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0305358 en date du 7 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Talloires à lui verser la somme de 543 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de l'illégalité du classement en zone constructible des terrains qu'il possède au lieudit Les Balmettes, ainsi que la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de condamner la commune de Talloires à lui verser la somme de 543 000 euros en réparation du préjudice précité ;

3°) de condamner la commune de Talloires à lui verser la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que le délai de prescription quadriennale n'a couru qu'à compter de l'arrêt du Conseil d'Etat en date du 30 décembre 2002 ; qu'en raison de la délibération du conseil municipal de Talloires de 1995, il a cessé son activité professionnelle ; qu'il a subi par l'illégalité commise par la commune de Talloires, une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec l'objectif d'intérêt général poursuivi ; que les articles 1 et 2 du protocole additionnel à la convention européenne des droits de l'homme ont été méconnus ; que pour apprécier son préjudice, il convient de tenir compte de la perte de la valeur de son fonds de commerce et d'hôtellerie et de la valeur des terrains et installations ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 février 2008, présenté pour la commune de Talloires, représentée par son maire ; elle conclut au rejet de la requête ; qu'à titre subsidiaire, elle demande à la Cour de dire et juger que, d'une part, la faute de M. A, et d'autre part, la faute de l'Etat ne sauraient conduire à ce que moins de 95 % du préjudice subi ne reste définitivement à sa charge ; qu'à titre infiniment subsidiaire, que l'Etat soit condamné à la relever et à la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre ; elle demande, en outre, que M. A soit condamné à lui verser la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'elle peut opposer la prescription quadriennale, dès lors que l'arrêt du Conseil d'Etat en date du 30 décembre 2002, dont se prévaut M. A n'a pas eu pour objet de statuer sur la légalité de la délibération ayant approuvé la révision du plan d'occupation des sols (POS) en 1995 mais de statuer sur la légalité du permis de construire accordé à la SCI Les Vignes du Lac ; qu'il ne démontre pas subir une charge spéciale et exorbitante ; que, la délibération portant approbation de la révision du plan d'occupation des sols n'emportait pas par elle-même un droit de construire ; que M. A ne peut se prévaloir d'aucun droit acquis au sens de l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme ; que la servitude résultant de la loi littoral est applicable sur tout le territoire national à l'ensemble des terrains situés dans la bande des 100 mètres du rivage ; que M. A a, de sa propre initiative, décidé de cesser son activité de camping et de vendre ses terrains constructibles ; que les résultats de son activité commerciale étaient en baisse importante au 31 décembre 1995 ; que la faute commise par l'Etat est de nature à exonérer la commune de toute responsabilité ; qu'il ne justifie d'aucun préjudice indemnisable ; que l'Etat a engagé sa responsabilité en donnant son accord pour que les terrains de Balmettes soient classés en zone NAh ;

Vu le mémoire, enregistré le 13 octobre 2009, présenté pour M. A ; il conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ; il demande en outre que la somme sollicitée au titre de son indemnisation soit ramenée à 419 511 euros, outre intérêts au taux légal à compter du recours préalable du 19 août 2003 ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 octobre 2009, présenté pour la commune de Talloires ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 octobre 2009 :

- le rapport de Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller ;

- les observations de Me Tousset, avocat de M. A ;

- les conclusions de M. Besson, rapporteur public ;

- la parole ayant à nouveau été donnée à la partie présente ;

Considérant que, par un jugement en date du 7 juin 2007, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande de M. A tendant à la condamnation de la commune de Talloires à lui verser la somme de 543 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de l'illégalité du classement en zone constructible des terrains qu'il possède au lieudit Les Balmettes, ainsi que la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que M. A relève appel de ce jugement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur l'exception de prescription quadriennale opposée par la commune de Talloires :

Considérant, en premier lieu, que M. A soutient que la commune de Talloires a engagé sa responsabilité en adoptant en 1995 une délibération illégale approuvant la révision du POS, sans même préciser la date exacte de cette délibération ; qu'il ressort des pièces du dossier que c'est la délibération n° 97/02 du conseil municipal de Talloires, en date du 7 janvier 1997, approuvant la révision n°2 du plan d'occupation des sols qui a créé trois zones NAh dans le secteur des Balmettes ; que c'est ce classement qui a été annulé par un arrêt de la Cour de céans, en date du 8 octobre 2002 ; que, contrairement à ce que soutient M. A ni la Cour administrative d'appel, ni le Conseil d'Etat ne se sont fondés sur l'illégalité du plan d'occupation des sols pour annuler le permis de construire accordé à la société Semnoz immobilier dans le secteur des Balmettes, mais sur la méconnaissance des dispositions du III de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme ;

Considérant, en second lieu, que M. A ne justifie d'aucune décision administrative susceptible d'avoir créé à son profit des droits acquis auxquels la délibération du conseil municipal de 1995, qu'il estime fautive et qui classait, selon ses dires, ses parcelles en zone d'habitat collectif aurait porté atteinte ; que M. A ne justifie pas que cette délibération aurait fait peser sur lui une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec les justifications d'intérêt général ; que, dans ces conditions, les articles 1 et 2 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été méconnus ;

Considérant que M. A, propriétaire de parcelles, situées au lieu-dit Les Balmettes a cessé l'exploitation de son camping, dès le 31 décembre 1995, puis vendu une partie de ses terrains ; qu'à supposer, même que la commune ait engagé sa responsabilité, en adoptant une délibération en 1995, révisant le POS, il lui incombe de démontrer le lien de causalité entre cette faute alléguée et son préjudice ; que le préjudice invoqué en dernier lieu, se compose, de la perte de revenus d'exploitation, de la valeur du fonds, du foncier et des frais de remise en état ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A a délibérément choisi de cesser son activité de gestion d'un camping en 1995 et que la révision du POS portant création de trois zones NAh dans le secteur des Balmettes n'a été approuvée que le 7 janvier 1997 ; que, par suite, il n'existe pas de lien de causalité entre le préjudice allégué et la faute invoquée; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à demander la condamnation de la commune à réparer ledit préjudice ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions de la commune de Talloires demandant à être relevée et garantie des éventuelles condamnations prononcées à son encontre :

Considérant que dès lors que le présent arrêt ne prononce aucune condamnation à l'encontre de la commune de Talloires, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions susvisées qui sont sans objet ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la commune de Talloires, qui n'est pas partie perdante, soit condamnée à payer à M. A la somme qu'il demande à ce titre ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner ce dernier à payer à la commune de Talloires la somme de 1 200 euros en application de ces dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête n° 07LY01951 de M. A est rejetée.

Article 2 : M. A versera la somme de 1 200 euros à la commune de Talloires sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Fernand A, à la commune de Talloires et au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer.

Délibéré après l'audience du 20 octobre 2009 à laquelle siégeaient :

M. Bézard, président de chambre,

M. Chenevey et Mme Chevalier-Aubert, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 8 décembre 2009.

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N° 07LY01951


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07LY01951
Date de la décision : 08/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BEZARD
Rapporteur ?: Mme Virginie CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur public ?: M. BESSON
Avocat(s) : PHILIPPE TOUSSET et BLANDINE GAILLARD

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2009-12-08;07ly01951 ?
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