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18/11/2009 | FRANCE | N°08LY02671

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 18 novembre 2009, 08LY02671


Vu le recours, enregistré le 3 décembre 2008 à la Cour, présenté par le PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0805138, en date du 6 novembre 2008, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé sa décision du 7 avril 2008 par laquelle il a refusé de délivrer un titre de séjour à Mlle A, ainsi que sa décision du même jour obligeant l'intéressée à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et celle, portant la même date, désignant le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expi

ration de ce délai, à défaut pour elle d'obtempérer à l'obligation de quitter le ter...

Vu le recours, enregistré le 3 décembre 2008 à la Cour, présenté par le PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0805138, en date du 6 novembre 2008, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé sa décision du 7 avril 2008 par laquelle il a refusé de délivrer un titre de séjour à Mlle A, ainsi que sa décision du même jour obligeant l'intéressée à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et celle, portant la même date, désignant le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai, à défaut pour elle d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire qui lui était faite ;

2°) de mettre à la charge de Mlle A la somme de 1000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que son recours en appel est recevable ; que les premiers juges ont commis des erreurs de fait ; que les premiers juges ont commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de l'arrêté attaqué sur la vie privée et familiale de Mlle A ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 30 juin 2009, présenté pour Mlle Marina A, qui conclut au rejet du recours du PREFET DU RHONE et demande la mise à la charge de l'Etat de la somme de 1500 euros, à verser à son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Elle soutient que les premiers juges n'ont pas commis d'erreur de fait ; que l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 4 novembre 2009 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- les observations de Me Petit, avocat de Mlle A,

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

La parole ayant été de nouveau donnée à Me Petit ;

Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que Mlle A, ressortissante russe née le 6 décembre 1976, fait valoir qu'elle est entrée sur le territoire national le 26 août 2006 pour rejoindre son compagnon, M. B, qui avait dû fuir la Russie pour la France au cours de l'année 2000, en raison des persécutions dont il était l'objet ; que, toutefois, en admettant même que Mlle A et M. B aient eu une communauté de vie avant l'entrée de ce dernier en France, elle aura été interrompue pendant les six années au cours desquels M. B vivait en France tandis que Mlle A demeurait en Russie ; que l'existence d'une communauté de vie entre M. B et Mlle A, depuis l'arrivée de cette dernière en France, n'est pas établie par les pièces du dossier ; qu'à la date de la décision en litige, M. B n'était pas installé durablement en France puisqu'il n'était lui-même en possession que d'un simple récépissé de demande de titre de séjour ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Mlle A et M. B n'étaient pas en mesure, s'ils le souhaitaient, de vivre maritalement à l'étranger ; que Mlle A, entrée en France à l'âge de vingt-neuf ans, n'était pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine ; qu'ainsi, en refusant, le 7 avril 2008, de délivrer un titre de séjour à Mlle A, le PREFET DU RHONE n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive au regard des objectifs poursuivis et n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon en a jugé autrement et a annulé, pour ce motif, sa décision refusant de délivrer un titre de séjour à Mlle A ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mlle A, tant devant le Tribunal administratif de Lyon que devant la Cour ;

Considérant que l'arrêté attaqué en date du 7 avril 2008 énonce l'ensemble des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour doit être écarté ;

Considérant que, pour les même motifs que ceux, ci-avant retenus, la décision portant refus de délivrance de titre de séjour n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de Mlle A ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que Mlle A n'est pas fondée à exciper, au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour ;

Considérant, en second lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été retenus dans le cadre de l'examen de la légalité du refus de délivrance de titre de séjour, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas d'avantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de Mlle A ;

Sur la légalité de la décision distincte fixant le pays de destination :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que Mlle A n'est pas fondée à exciper de l'illégalité des décisions portant refus de délivrance de titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français à l'encontre de ses conclusions dirigées contre la décision désignant le pays de destination de la mesure d'éloignement ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que Mlle A expose qu'elle a été contrainte de fuir la Russie en raison des menaces dont a fait l'objet son compagnon après avoir voulu divulguer le contenu d'un enregistrement relatif aux exactions commises par les autorités russes sur la population civile et qu'après la fuite de celui-ci, elle aurait été menacée, elle et sa famille, puis violentée par les forces de police russe afin que soit restitué cet enregistrement aux autorités de ce pays ; que, toutefois, si Mlle A produit deux convocations de la police, celles-ci sont rédigées en langue étrangère sans être accompagnées de leur traduction en langue française et ne peuvent, dès lors, pas être prises en considération ; qu'elle n'apporte aucun commencement de preuve de nature à établir le caractère réel, actuel et personnel des risques encourus ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU RHONE est fondé à demander l'annulation du jugement du 6 novembre 2008 du tribunal administratif de Lyon et le rejet de la demande présentée par Mlle A devant ce Tribunal ;

Sur les conclusions du PREFET DU RHONE tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mlle A , quelque somme que ce soit au profit du PREFET DU RHONE, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Sur les conclusions de Mlle A tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente affaire, quelque somme que ce soit au profit de Me Couderc, avocat de Mlle A, en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0805138, en date du 6 novembre 2008, du Tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : La demande présenté par Mlle A devant le Tribunal administratif de Lyon et ses conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions présentées devant la cour par le PREFET DU RHONE, tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au PREFET DU RHONE, à Mlle Marina A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Délibéré après l'audience du 4 novembre 2009 à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Montsec, président assesseur,

Mme Besson-Ledey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 novembre 2009.

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N° 08LY02671


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY02671
Date de la décision : 18/11/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : JEAN PAUL TOMASI

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2009-11-18;08ly02671 ?
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