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06/05/2009 | FRANCE | N°08LY01314

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 06 mai 2009, 08LY01314


Vu le recours, enregistré à la Cour le 6 juin 2008, présenté pour le PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800695 - 0801345, en date du 29 avril 2008, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions du 24 janvier 2008 par lesquelles il a refusé à M. Agron X et à Mme Aliona X la délivrance d'un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a désigné le pays à destination duquel ils seraient reconduits à l'expiration de ce délai, à défa

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Vu le recours, enregistré à la Cour le 6 juin 2008, présenté pour le PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800695 - 0801345, en date du 29 avril 2008, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions du 24 janvier 2008 par lesquelles il a refusé à M. Agron X et à Mme Aliona X la délivrance d'un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a désigné le pays à destination duquel ils seraient reconduits à l'expiration de ce délai, à défaut pour eux d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui leur était faite ;

2°) de rejeter les demandes présentées par les époux X devant le Tribunal administratif ;

3°) de mettre à leur charge la somme de 1000 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 avril 2009 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- les observations de Me Fréry, avocat de M. et Mme X,

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

La parole ayant été de nouveau donnée à Me Fréry ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué ;

Sur la légalité des décisions portant refus de délivrance de titre de séjour :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2 Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que M. et Mme X, respectivement nés le 16 avril 1974 en Albanie et le 7 décembre 1982 en Moldavie, pays dont ils ont chacun la nationalité, sont, selon leurs déclarations, entrés en France le 13 août 2003 s'agissant de Monsieur, et le 26 juillet 2003 s'agissant de Madame ; qu'ils se sont mariés le 31 octobre 2003 et que de cette union sont nés trois enfants, les 2 novembre 2003, 23 avril 2005 et 7 janvier 2008 ; que, si M. et Mme X maîtrisent la langue française et font preuve d'une volonté d'insertion sociale pour eux-mêmes et leurs enfants, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. et Mme X, qui sont tous deux en situation irrégulière, ne pourraient pas, nonobstant leurs nationalités différentes, être légalement admissibles dans le même pays et donc poursuivre leur vie familiale en dehors du territoire français ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que l'état de santé de M. X exigerait qu'il demeure en France pour recevoir des soins ; que, par suite, les décisions du 24 janvier 2008 par lesquelles le PREFET DU RHONE a refusé de leur délivrer un titre de séjour n'ont pas porté au droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs des refus ; qu'elles n'ont, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dès lors, le PREFET DU RHONE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a annulé, pour ce motif, les décisions litigieuses ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet évolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme X, tant devant le Tribunal administratif de Lyon que devant la Cour ;

Considérant que la circonstance que les décisions de refus de titre de séjour litigieuses ne mentionnent que deux des trois enfants des époux X est sans incidence sur leur légalité, dès lors que le PREFET DU RHONE aurait pris les mêmes décisions s'il n'avait pas commis cette erreur de fait ; que le moyen tiré de l'erreur de fait doit donc être écarté ;

Sur la légalité des obligations de quitter le territoire français :

Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été énoncés ci-dessus dans le cadre de l'examen de la légalité des décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour aux époux X, les décisions faisant obligation à ces derniers de quitter le territoire français ne portent pas à leur droit au respect de leur vie privée et familiale un atteinte disproportionnée par rapport aux buts poursuivis et ne méconnaissent donc pas les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : Dans toutes les décisions qui concernent des enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces dernières stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant, ainsi qu'il a déjà été dit, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, malgré leurs nationalités différentes, M. et Mme X ne seraient pas légalement admissibles dans le même pays, où ils pourraient se rendre, accompagnés de leurs trois enfants, afin d'y poursuivre leur vie familiale ; que, dès lors, les mesures d'éloignement en litige n'ont ni pour objet ni pour effet de séparer les enfants du couple de leurs parents et la seule circonstance que deux des enfants sont scolarisés en France ne suffit pas à établir que les décisions contestées portent atteinte à l'intérêt supérieur de ces enfants au sens de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur la légalité des décisions distinctes fixant le pays de destination :

Considérant que, par décisions du 24 janvier 2008, le PREFET DU RHONE a désigné comme pays de destination des mesures d'éloignement prises à l'encontre de M. et Mme X, le pays dont les intéressés ont la nationalité ou celui dans lequel ils établiraient être légalement admissibles ; que, si M. X est de nationalité albanaise et Mme X de nationalité moldave, les intéressés n'établissent pas qu'ils ne seraient pas tous deux légalement admissibles, avec leurs enfants, dans l'un ou l'autre de ces deux pays ; que, par suite, les décisions fixant le pays de destination des mesures d'éloignement ne méconnaissent ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; que, pour les mêmes motifs, elles ne sont pas davantage entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les décisions attaquées, le PREFET DU RHONE leur a refusé la délivrance d'un titre de séjour, fait obligation de quitter le territoire et a fixé leur pays de destination ;

Sur les conclusions du PREFET DU RHONE tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme X, quelque somme que ce soit au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions de M. et Mme X tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente affaire, quelque somme que ce soit au profit du conseil de M. et Mme X, au titre des frais exposés par ce dernier et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0800695 - 0801345 en date du 29 avril 2008 du Tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : les demandes présentées par M. et Mme X devant le Tribunal administratif de Lyon et le surplus de leurs conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Les conclusions présentées par le PREFET DU RHONE sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 08LY01314


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY01314
Date de la décision : 06/05/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : JEAN PAUL TOMASI

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2009-05-06;08ly01314 ?
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