Vu la requête, enregistrée le 2 septembre 2005 à la Cour, présentée pour la SA ADECCO HOLDING FRANCE, dont le siège social est situé 69 boulevard de Stalingrad à Villeurbanne (69100), représentée par son président ;
La SA ADECCO HOLDING FRANCE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0300031, en date du 5 juillet 2005, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée dont elle a été déclarée redevable pour la période du 1er janvier au 30 juin 1999, ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la sixième directive 77/338/CEE du Conseil des Communautés européennes, du 17 mai 1977 ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 octobre 2008 :
- le rapport de M. Montsec, président-assesseur ;
- et les conclusions de M. Raisson, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil des communautés européennes, du 17 mai 1977 : « Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée : / 1. les livraisons de biens et les prestations de services, effectuées à titre onéreux à l'intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel (...) » ; qu'aux termes de l'article 4 de cette même directive : « 1. Est considéré comme assujetti quiconque accomplit, d'une façon indépendante et quel qu'en soit le lieu, une des activités économiques mentionnées au paragraphe 2, quels que soient les buts ou les résultats de cette activité. / Les activités économiques visées au paragraphe 1 sont toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services (...). Est notamment considérée comme activité économique une opération comportant l'exploitation d'un bien corporel ou incorporel en vue d'en retirer des recettes ayant un caractère de permanence. / 3. Les Etats membres ont la faculté de considérer également comme assujetti quiconque effectue, à titre occasionnel, une opération relevant des activités visées au paragraphe 2 (...) » ; qu'aux termes de l'article 21 de ladite directive, relatif aux redevables de la taxe envers le Trésor : « La taxe sur la valeur ajoutée est due : 1. en régime intérieur : (...) c) par toute personne qui mentionne la taxe sur la valeur ajoutée sur une facture ou tout document en tenant lieu (...) » ; qu'aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : « I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel » ; qu'aux termes de l'article 256 A du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : « Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une des activités économiques mentionnées au troisième alinéa, quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention. (...) Les activités économiques visées au premier alinéa se définissent comme toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services, y compris les activités extractives, agricoles et celles des professions libérales ou assimilées. Est notamment considérée comme activité économique une opération comportant l'exploitation d'un bien meuble corporel ou incorporel en vue d'en retirer des recettes ayant un caractère de permanence » ; qu'aux termes du 3 de l'article 283 du même code : « Toute personne qui mentionne la taxe sur la valeur ajoutée sur une facture ou tout autre document en tenant lieu est redevable de la taxe du seul fait de sa facturation » et qu'aux termes du 1 de l'article 271 dudit code : «La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération » ;
Considérant, en premier lieu, que la SA ADECCO HOLDING FRANCE, société mère d'un groupe, a pour objet l'acquisition, la détention et la gestion de participations dans le capital de sociétés et exerce uniquement des activités financières situées hors du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée ou exonérées ; qu'il résulte de l'instruction qu'elle a revendu à la société ADECCO TT, sa filiale, à prix coûtant, le 26 mai 1999, les matériels informatiques qu'elle avait acquis entre le 7 janvier et le 12 avril 1999 ; qu'en procédant à cette opération ponctuelle, alors qu'elle n'avait pas acquis les matériels en cause comme objets de négoce mais les avait inscrits en immobilisations à l'actif de son bilan et mis en service précédemment à leur cession, la requérante ne peut, nonobstant la brièveté du délai écoulé entre l'achat desdits matériels et leur revente, être regardée comme s'étant livrée à une activité économique de commerçant au sens de la sixième directive et de l'article 256 A du code général des impôts, susceptible de lui conférer, par elle-même, la qualité d'assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée ayant agi en tant que telle, et donc de redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ; que, si elle affirme avoir acquis ces matériels informatiques, dont la capacité excèderait, selon elle, ses propres besoins, en vue initialement de les louer ou de les mettre à la disposition de ses filiales, c'est-à-dire en vue d'exercer une activité de prestations de services informatiques soumise à la taxe sur la valeur ajoutée, en application de l'article 256 A du code général des impôts, elle n'accompagne, en tout état de cause, ces allégations d'aucun justificatif probant et n'établit notamment pas que la mise en service de ces matériels, qui est intervenue antérieurement à leur revente à la société ADECCO TT, le 26 mai 1999, aurait été effectuée par sa ou ses filiales ; que, par suite, la SA ADECCO HOLDING FRANCE n'était en droit ni de déduire la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'acquisition par elle des matériels informatiques en cause, ni de facturer ladite taxe à sa filiale lors de la revente de ces matériels ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte expressément de l'article 21 de la directive du 17 mai 1977 que la taxe sur la valeur ajoutée est due par toute personne qui la mentionne sur une facture ou tout document en tenant lieu ; que le principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée implique seulement, dans ce cas, qu'une possibilité de régularisation ne dépendant pas du pouvoir discrétionnaire de l'administration fiscale soit laissée à l'émetteur de la facture ; que cette possibilité de régularisation doit être ouverte à celui-ci sans condition de bonne foi s'il a éliminé tout risque de perte de recettes fiscales ; que, dans le cas contraire, une telle possibilité peut être soumise à une condition de bonne foi ; que, dès lors que les dispositions du 3 de l'article 283 du code général des impôts n'excluent pas la possibilité de régulariser une facture mentionnant une taxe y figurant à tort, le principe communautaire de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée ne fait pas obstacle au reversement au Trésor public, conformément au 3 de l'article 283 du code général des impôts, d'une taxe indûment collectée car facturée à tort ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il est constant que la société ADECCO TT, société redevable de la taxe sur la valeur ajoutée, a obtenu la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé le prix d'acquisition par elle des matériels informatiques, mentionnée à tort sur la facture que lui avait adressée la requérante ; que, dès lors, la SA ADECCO HOLDING FRANCE n'est pas fondée à soutenir que le montant de taxe sur la valeur ajoutée mentionné à tort sur la facture qu'elle avait émise ne peut être qualifié de taxe sur la valeur ajoutée et que la régularisation du montant indûment facturé ne créerait pas un risque de perte de recettes fiscales ; que, par suite, la possibilité de régularisation ouverte à la requérante est subordonnée à sa bonne foi ; qu'ainsi qu'il a déjà été dit, la SA ADECCO HOLDING FRANCE a facturé à prix coûtant à sa filiale, société redevable de la taxe sur la valeur ajoutée du fait de son activité, les matériels informatiques qu'elle avait initialement acquis, comptabilisés en immobilisations et mis en service ; que cette revente est intervenue alors que le Trésor public lui avait préalablement refusé, le même mois, le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'achat de ces matériels, au motif qu'elle n'exerçait que des activités financières situées hors du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée ou exonérées ; qu'en agissant ainsi, la société holding requérante ne pouvait ignorer qu'elle n'était pas en droit de mentionner la taxe sur la valeur ajoutée sur la facture adressée à sa filiale ; que, dès lors, elle ne saurait être regardée comme étant de bonne foi et, par suite, susceptible d'obtenir le bénéfice d'une régularisation ; qu'en conséquence, l'administration fiscale a pu faire application à son encontre des dispositions du 3 de l'article 283 du code général des impôts, sans méconnaître le principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée ;
Sur les pénalités pour mauvaise foi :
Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : « Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 p. 100 si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (...) » ;
Considérant que la requérante a délibérément facturé la taxe sur la valeur ajoutée à sa filiale, alors qu'elle ne pouvait ignorer qu'elle n'était pas redevable de cette taxe, comme venait de le lui rappeler l'administration fiscale, lorsqu'elle avait tenté d'obtenir le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'achat des matériels informatiques en cause ; qu'elle a ainsi permis à sa filiale d'obtenir la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée qui lui avait été refusée et n'a pas reversé au Trésor public la taxe ainsi collectée, créant, dès lors, une perte de recettes fiscales ; que, par suite, l'administration fiscale doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de la mauvaise foi du contribuable au sens des dispositions susrappelées de l'article 1729 du code général des impôts ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SA ADECCO HOLDING FRANCE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SA ADECCO HOLDING FRANCE est rejetée.
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N° 05LY01468