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23/10/2008 | FRANCE | N°06LY01262

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 23 octobre 2008, 06LY01262


Vu le recours, enregistré le 15 juin 2006, présentée par le PREFET DE LA COTE D'OR ;

Le PREFET DE LA COTE D'OR demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0501116 en date du 13 avril 2006, par lequel le Tribunal administratif de Dijon a annulé sa décision du 22 novembre 2004 par laquelle il a refusé de délivrer un titre de séjour à M. Miguel X, ensemble sa décision implicite de rejet née du silence gardé pendant plus de deux mois sur le recours gracieux formé contre cette décision ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la...

Vu le recours, enregistré le 15 juin 2006, présentée par le PREFET DE LA COTE D'OR ;

Le PREFET DE LA COTE D'OR demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0501116 en date du 13 avril 2006, par lequel le Tribunal administratif de Dijon a annulé sa décision du 22 novembre 2004 par laquelle il a refusé de délivrer un titre de séjour à M. Miguel X, ensemble sa décision implicite de rejet née du silence gardé pendant plus de deux mois sur le recours gracieux formé contre cette décision ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 ;

Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 et notamment son article 7-5 ;

Vu l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades prévus à l'article 7-5 du décret du 30 juin 1946 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 octobre 2008 :

- le rapport de M. Segado, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Gimenez, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le PREFET DE LA COTE D'OR relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Dijon a annulé sa décision du 22 novembre 2004 refusant de délivrer un titre de séjour à M. Miguel X, ensemble sa décision implicite de rejet née du silence gardé pendant plus de deux mois sur le recours gracieux du 20 décembre 2004 formé contre ce refus, au motif que lesdites décisions avaient été prises au vu d'un avis du médecin inspecteur de la santé publique rendu dans des conditions irrégulières pour ne pas avoir été émis au vu d'un rapport établi par un médecin agréé ou un praticien hospitalier ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, dont les dispositions sont aujourd'hui reprises à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par le préfet ou, à Paris, le préfet de police, après avis du médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé (...) » ; qu' aux termes de l'article 7-5 du décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 dans sa rédaction issue du décret n° 99-352 du 5 mai 1999 : « Pour l'application du 11° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 précitée, le préfet délivre la carte de séjour temporaire, au vu de l'avis émis par le médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé. (...) Cet avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'intégration, du ministre chargé de la santé et du ministre de l'intérieur, au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé (...) » ; qu'enfin, aux termes de l'article 1er de l'arrêté interministériel susvisé du 8 juillet 1999 : « L'étranger qui a déposé une demande de délivrance ou de renouvellement de carte de séjour temporaire en application de l'article 12 bis (11°) (...) est tenu de faire établir un rapport médical relatif à son état de santé par un médecin agréé ou un praticien hospitalier » ; qu'il résulte de ces dispositions que s'il appartient à l'étranger de produire le rapport médical établi par un médecin agréé ou un patricien hospitalier à l'appui de sa demande de titre de séjour, le préfet doit néanmoins, préalablement à sa décision et nonobstant l'absence de production par l'étranger de ce rapport médical, recueillir l'avis du médecin inspecteur de la santé publique qui statue sur la situation médicale de l'étranger et lui faire bénéficier de cette procédure de consultation lorsque ce dernier justifie, à l'appui de sa demande de titre de séjour, d'éléments suffisamment précis sur la nature et la gravité des troubles dont il souffre ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'a la suite de la demande de titre de séjour présentée par M. X le 21 septembre 2004 à raison de son état de santé, le préfet a demandé le même jour à l'intéressé de produire le rapport d'un médecin hospitalier ou d'un médecin agréé que l'étranger devait faire établir selon les dispositions précitées ; qu'il a ensuite pu légalement transmettre le dossier au médecin inspecteur de la santé publique pour avis nonobstant l'absence de ce rapport médical ; que, par suite, et alors qu'au demeurant il ressort des pièces produites en appel que cet avis a été émis au vu notamment d'un rapport établi par un médecin agréé le 28 septembre 2004, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'avis du médecin inspecteur de la santé publique émis le 5 octobre 2004 à la suite de la transmission du préfet serait intervenu dans des conditions irrégulières en raison de l'absence d'un rapport d'un médecin hospitalier ou d'un médecin agréé qu'il lui appartenait de faire établir ; que, par conséquent, le PREFET DE LA COTE D'OR est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges se sont fondés sur ce motif pour annuler les décisions litigieuses ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X, tant devant la Cour que devant le Tribunal administratif de Dijon, à l'encontre des dites décisions ;

Considérant, en premier lieu, que la décision du 22 novembre 2004 litigieuse a été signée par M. Yves Charbonnier, directeur de la réglementation et des libertés publiques de la préfecture de la Côte d'Or, qui bénéficiait d'une délégation régulière en vertu d'un arrêté préfectoral du 2 août 2004 régulièrement publié aux recueil des actes administratifs de la préfecture daté du même jour ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte manque en fait ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aucune disposition n'impose au préfet de communiquer à l'étranger l'avis du médecin inspecteur de la santé publique et notamment de joindre cet avis à la décision de refus de titre ;

Considérant, en troisième lieu, que la décision du 22 novembre 2004 énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement notamment quant aux raisons pour lesquelles M. X ne pouvait bénéficier d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade sur le fondement des dispositions de l'article 12 bis 11° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 alors en vigueur, en précisant notamment, après avoir mentionné ce texte, que le médecin inspecteur de la santé publique avait certifié que son état de santé nécessitait une prise en charge médicale, mais que le défaut de prise en charge ne risquait pas d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que par suite, la décision litigieuse est ainsi suffisamment motivée, alors même que l'avis de ce médecin inspecteur de la santé publique ne lui était pas annexé ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'avis du médecin inspecteur de la santé publique, que si l'état de santé du requérant nécessite une prise en charge médicale, le défaut de celle-ci n'entraînerait pas pour l'intéressé des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que les certificats médicaux produits par M. X ne remettent pas en cause l'appréciation ainsi portée par le médecin inspecteur quant à la situation médicale du requérant ; que, par suite, le préfet a pu légalement et sans entacher sa décision d'une erreur d'appréciation refuser de délivrer à M. X un titre de séjour en qualité d'étranger malade sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11 11° précitées ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales « 1 Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2 Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ; que si M. X, ressortissant angolais arrivé en France le 13 décembre 2002, célibataire et sans enfant, fait valoir qu'il a rencontré une ressortissante française avec laquelle il a formé un projet de mariage toutefois, l'attestation de cette dernière établie le 4 février 2005, qui n'est pas corroborée par d'autres documents probants notamment quant à la durée et l'intensité des liens qui les unissent, ne suffit pas à justifier de l'ancienneté de leur relation ; que l'intéressé n'apporte par ailleurs aucun élément établissant les démarches qu'il allègue avoir entreprises en vue de concrétiser ce projet de mariage ; qu' il ne ressort pas en outre des pièces du dossier qu'il est dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à son entrée en France, ni que son état de santé justifiait sa présence en France au côté de son amie ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et des conditions et de la durée du séjour de M. X en France à la date des décisions attaquées, ces refus n'ont pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale aux buts en vue desquels ils ont été pris que lui garantit l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en sixième lieu, que les décisions litigieuses n'ont ni pour objet ni pour effet d'interdire à M. X de se marier ; que l'intéressé n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que ces décisions auraient été prises en méconnaissance des stipulations de l'article 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales garantissant le droit au mariage ;

Considérant, en dernier lieu que, dans les circonstances de l'espèce sus décrites, les décisions de refus attaquées ne sont pas entachées d'une erreur manifeste quant à l'appréciation des conséquences de ces refus sur la situation personnelle de M. X, notamment au regard de son état de santé et de son projet de mariage, alors même qu'une mesure d'éloignement à destination de l'Angola aurait échoué ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA COTE D'OR est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a annulé sa décision du 22 novembre 2004 refusant de délivrer un titre de séjour à M. X, ensemble sa décision implicite de rejet née du silence gardé pendant plus de deux mois sur le recours gracieux du 20 décembre 2004 formé contre ce refus ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à M. X une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Dijon du 13 avril 2006 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Dijon et ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 06LY01262


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06LY01262
Date de la décision : 23/10/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme SERRE
Rapporteur ?: M. JUAN SEGADO
Rapporteur public ?: M. GIMENEZ
Avocat(s) : SCP NICOLLE - DE MAGNEVAL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2008-10-23;06ly01262 ?
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