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15/07/2008 | FRANCE | N°08LY00016

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 15 juillet 2008, 08LY00016


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 3 janvier 2008, présentée pour Mme Zahia X, domiciliée ... ;

Mme X demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0705921, en date du 27 novembre 2007, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions en date du 27 août 2007, du préfet du Rhône, portant refus de délivrance d'un certificat de résidence temporaire en qualité d'étranger malade, assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois, et prescrivant qu'à l'expiration

de ce délai elle serait reconduite d'office à destination du pays dont elle a ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 3 janvier 2008, présentée pour Mme Zahia X, domiciliée ... ;

Mme X demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0705921, en date du 27 novembre 2007, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions en date du 27 août 2007, du préfet du Rhône, portant refus de délivrance d'un certificat de résidence temporaire en qualité d'étranger malade, assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois, et prescrivant qu'à l'expiration de ce délai elle serait reconduite d'office à destination du pays dont elle a la nationalité, ou de tout pays où elle serait légalement admissible ;

22) de prononcer l'annulation de ces décisions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 196 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juin 2008 :

- le rapport de M. Montsec, président ;

- les observations de Me Frery pour Mme X ;

- et les conclusions de M. Pourny, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : « La décision mentionne que l'audience a été publique, sauf s'il a été fait application des dispositions de l'article L. 731-1. (...) / Mention est également faite de la production d'une note en délibéré » ;

Considérant que lorsque, postérieurement à la séance publique mais avant la lecture de la décision, le juge est saisi d'une note en délibéré, il lui incombe d'en prendre connaissance avant de rendre sa décision ; que, s'il estime que la note en délibéré ne comporte l'exposé d'aucune circonstance de fait ou de droit rendant nécessaire la réouverture de l'instruction, le juge, avant comme après l'intervention de l'article 8 du décret n° 2005-1586 du 19 décembre 2005 repris par les dispositions susmentionnées de l'article R. 741-2 du code de justice administrative, doit cependant, sous peine d'irrégularité, mentionner cette note dans la décision qu'il rend ;

Considérant que la note en délibéré que Mme Zahia X établit avoir produite le 16 novembre 2007 devant le Tribunal administratif de Lyon, après la séance publique qui s'est tenue le 13 novembre 2007, n'a pas été visée dans le jugement lu le 27 novembre 2007 ; que ledit jugement est ainsi entaché d'une irrégularité substantielle et doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme X devant le Tribunal administratif de Lyon ;

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté du préfet du Rhône en date du 27 août 2007 :

Considérant que Mme X, née le 3 décembre 1961, de nationalité algérienne, est entrée en France le 5 avril 2007, sous couvert d'un visa de court de séjour ; qu'elle a demandé au préfet du Rhône, le 5 juin 2007, la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade, sur le fondement des dispositions du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; que le préfet a rejeté sa demande, par une décision en date du 27 août 2007, assortie d'une obligation de quitter le territoire français, et a fixé l'Algérie comme pays de destination de sa reconduite ; que la requérante demande l'annulation de ces trois décisions ;

En ce qui concerne la décision refusant le titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : « Le certificat de résidence d'un an portant la mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit (...) 7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment d'un avis du médecin inspecteur de la santé publique en date du 25 juillet 2007, que, si l'état de santé de Mme X nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, vers lequel elle peut voyager sans risque ; que, si les certificats médicaux produits par l'intéressée attestent de ce qu'elle souffre d'un syndrome dépressif réactionnel au décès de ses deux parents et d'un état psychologique nécessitant la présence d'une tierce personne pour l'assister dans la vie quotidienne, ils ne précisent pas toutefois que son handicap fait obstacle à une vie normale en Algérie avec l'assistance d'une tierce personne et ne sont pas de nature à contredire l'avis susmentionné du médecin inspecteur de la santé publique ; qu'ainsi, c'est à bon droit et sans entacher sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation que le préfet du Rhône a refusé de délivrer à Mme X le titre de séjour qu'elle sollicitait ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ; qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : « Le certificat de résidence d'un an portant la mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit : (...) 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) » ;

Considérant que Mme X soutient qu'à la suite du décès de son père puis de sa mère, le seul de ses frères vivant en Algérie a pris en charge leur frère handicapé moteur et ne pourrait de ce fait lui apporter le soutien quotidien dont elle a besoin et que seuls son frère et sa soeur résidant régulièrement en France sont en mesure d'assumer cette charge, ainsi qu'en aurait décidé la famille ; que, toutefois, la situation décrite ne fait pas obstacle à ce qu'elle puisse bénéficier en Algérie de l'aide d'une tierce personne dont elle a besoin et notamment que son frère resté en Algérie puisse lui apporter cette aide, alors que sa soeur, qui seule, selon elle, pourrait l'accueillir à son domicile, est elle-même handicapée et perçoit à ce titre une allocation d'adulte handicapé, et que son autre frère est installé dans la région parisienne ; que Mme X n'étant ainsi pas isolée en Algérie, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 46 ans, et eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France, elle n'est pas fondée à soutenir que le refus de délivrance d'un titre de séjour qui lui a été opposé porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions précitées du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

Considérant, en troisième lieu, que Mme X ne peut utilement invoquer les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à l'encontre de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, Mme X n'est entrée en France que très récemment, à l'âge de 46 ans, et n'est pas, après le décès de ses parents, dépourvue d'attaches familiales dans ce pays, où elle est susceptible de recevoir l'aide et les soins dont elle a besoin ; qu'il suit de là que la requérante n'est pas davantage fondée à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale que lui garantissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et méconnaît les dispositions du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

Considérant que Mme X ne peut utilement invoquer les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à l'encontre de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination de sa reconduite :

Considérant que si Mme X soutient qu'elle risque d'être exposée à des traitements inhumains et dégradants en raison de son handicap en cas de retour en Algérie, il ressort des pièces du dossier qu'elle ne sera pas isolée dans ce pays, où vit notamment un des ses frères et où, tout autant qu'en France, elle pourra bénéficier de l'aide matérielle que son autre frère installé en France déclare vouloir lui apporter ; qu'ainsi, la requérante, qui n'est pas notamment dans l'impossibilité de bénéficier en Algérie de l'aide d'une tierce personne dont elle a besoin, n'est pas fondée à soutenir que la décision par laquelle le préfet du Rhône a prescrit son éloignement à destination de l'Algérie méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône en date du 27 août 2007, en tant qu'il lui refuse la délivrance d'un titre de séjour, en tant qu'il lui ordonne de quitter le territoire français et en tant qu'il désigne l'Algérie comme étant le pays à destination duquel elle serait, à défaut, reconduite ;

Sur les conclusions de Mme X tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que quelque somme que ce soit puisse être mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon en date du 27 novembre 2007 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme X devant le Tribunal administratif de Lyon et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.

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N° 08LY00016


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY00016
Date de la décision : 15/07/2008
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: M. Pierre MONTSEC
Rapporteur public ?: M. POURNY
Avocat(s) : FRERY

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2008-07-15;08ly00016 ?
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