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18/06/2008 | FRANCE | N°05LY00209

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 18 juin 2008, 05LY00209


Vu la requête, enregistrée le 9 février 2005, présentée pour la SOCIETE SICAREV, représentée par son président de conseil d'administration, dont le siège est 197 route de Charlieu à Roanne (42335) ;

La SOCIETE SICAREV demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0202918 en date du 25 novembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la ville de Roanne, a omis de statuer sur ses conclusions tendant à la condamnation des sociétés BFA, Mondial Frigo, Ducret et contre le Bureau Veritas et l'a condamnée

à verser la somme de 750 euros à la ville de Roanne, à la société Mondial Frig...

Vu la requête, enregistrée le 9 février 2005, présentée pour la SOCIETE SICAREV, représentée par son président de conseil d'administration, dont le siège est 197 route de Charlieu à Roanne (42335) ;

La SOCIETE SICAREV demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0202918 en date du 25 novembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la ville de Roanne, a omis de statuer sur ses conclusions tendant à la condamnation des sociétés BFA, Mondial Frigo, Ducret et contre le Bureau Veritas et l'a condamnée à verser la somme de 750 euros à la ville de Roanne, à la société Mondial Frigo et au Bureau Veritas ;

2°) de condamner solidairement la ville de Roanne, les sociétés BFA, Mondial Frigo, Ducret et le Bureau Veritas à lui verser la somme de 43 611,24 euros ;

3°) de condamner solidairement la ville de Roanne, les sociétés BFA, Mondial Frigo, Ducret et le Bureau Veritas aux dépens ;

4°) de condamner solidairement la ville de Roanne, les sociétés BFA, Mondial Frigo, Ducret et le Bureau Véritas à lui verser la somme de 15 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 mai 2008 :

- le rapport de M. Bourrachot, rapporteur ;

- les observations de Me Desilets, avocat de la SOCIETE SICAREV, de Me Benabdessadok, avocat de la ville de Roanne et de Me Vienot, avocat du Bureau Veritas ;

- et les conclusions de M. Besle, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que certaines pièces bouchères découpées et emballées sous vide par la SOCIETE SICAREV à partir de l'été 1995 à l'abattoir municipal de Roanne, exploité par la société Sicar en vertu d'une convention signée avec la commune le 7 novembre 1988, ne présentaient pas une qualité organoleptique acceptable ; que la SOCIETE SICAREV, en sa double qualité d'usager de l'abattoir et de gestionnaire de cet équipement venant aux droits de la société Sicar avec laquelle elle a fusionné, a demandé au Tribunal administratif de Lyon la condamnation de la ville de Roanne, maître d'ouvrage, de la société Blézat Ferrat Alimentaires (BFA), de la société Mondial Frigo, de la société Etablissements Ducret et du bureau de contrôle Veritas, entreprises ayant participé aux travaux de restructuration de l'abattoir dont la réception définitive a été prononcée le 9 octobre 1991, à réparer le préjudice qu'elle a subi du fait des désordres affectant les installations frigorifiques de l'abattoir ; que par jugement en date du 25 novembre 2004 le Tribunal administratif de Lyon n'a pas admis l'intervention de la compagnie AXA France IARD, assureur de la société Blézat Ferrat Alimentaires, a rejeté comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître les conclusions de la SOCIETE SICAREV présentées en tant que société usagère de l'abattoir municipal de Roanne ainsi que ses conclusions tendant à la désignation d'un mandataire ad hoc pour représenter la société Ducret, a rejeté le surplus des conclusions de la demande, mis les dépens, d'un montant de 6 454,81 euros à la charge de la SOCIETE SICAREV et condamné la SOCIETE SICAREV à verser à la ville de Roanne, à la société Mondial Frigo et au bureau de contrôle Véritas une somme de 750 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que la SOCIETE SICAREV fait appel de l'article 3 de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions présentées en qualité de gestionnaire de l'abattoir et des articles 5 et 6 qui l'ont condamnée tandis que la compagnie d'assurances AXA France fait appel de l'article 1er du même jugement rejetant son intervention ;

Sur l'appel de la Compagnie d'assurances AXA France IARD et sans qu'il soit besoin de statuer sur sa recevabilité :

Considérant que, dans les litiges de plein contentieux, sont recevables à former une intervention les personnes qui se prévalent d'un droit auquel la décision à rendre est susceptible de préjudicier ; que la compagnie d'assurances AXA France IARD ne se prévaut pas d'un droit de cette nature distinct de celui qu'elle tient de l'article L. 121-12 du code des assurances dès le versement à son assuré d'une indemnité d'assurance et en vertu duquel il lui est loisible de choisir le moment auquel elle entend exercer les droits qu'elle tient de cette subrogation et être dès lors substituée, dans une instance en cours, à son assuré ; que, des lors, son intervention devant le Tribunal administratif de Lyon n'était pas recevable ; que c'est dès lors à bon droit que les premiers juges ne l'ont pas admise ;

Considérant, d'autre part, que la compagnie d'assurances AXA France IARD, assureur de la société Blézat Ferrat Alimentaires, ne soutient pas s'être substituée à cette dernière en cours d'instance ;

Sur les conclusions de la SOCIETE SICAREV dirigées contre la ville de Roanne :

Considérant, d'une part, que si la requérante soutient que la collectivité affermante est contractuellement tenue de garantir son fermier vis-à-vis de malfaçons ou de vices de conception affectant les ouvrages dont l'usage a été remis au fermier, elle n'invoque aucune stipulation précise instituant un tel droit qui ne résulte pas non plus des principes et règles applicables aux contrats d'affermage ; que si elle soutient également que la ville de Roanne aurait commis une faute contractuelle de nature à engager sa responsabilité à son égard, elle ne précise pas quelle stipulation aurait été méconnue par la collectivité ;

Considérant, d'autre part, que les difficultés exceptionnelles et imprévisibles rencontrées dans l'exécution d'une délégation de service public ne peuvent ouvrir droit à une indemnité au profit du délégataire que dans la mesure où celui-ci justifie soit que ces difficultés ont eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat, soit qu'elles sont imputables à un fait de l'administration ; qu'il ne résulte pas de l'instruction, et qu'il n'est d'ailleurs pas allégué, que les préjudices dont se prévaut la SOCIETE SICAREV, constitués à hauteur de 43 611,24 euros par les frais qu'elle a dû engager pour pallier les dysfonctionnements des installations et par les loyers acquittés pour la location de groupes de production de froid supplémentaires auraient eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat d'affermage en vertu duquel elle exploitait cet équipement ; qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise que les désordres affectant les installations frigorifiques de l'abattoir municipal de la ville de Roanne ne sont pas imputables à cette collectivité ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE SICAREV n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande dirigée contre la ville de Roanne ;

Sur les conclusions de la société SICAREV dirigées contre les sociétés BFA, Mondial Frigo, Ducret et le Bureau Veritas :

Considérant que le jugement attaqué a omis de statuer sur les conclusions de la société SICAREV dirigées contre les sociétés BFA, Mondial Frigo, Ducret et le Bureau Veritas ; qu'il y a lieu d'annuler le jugement dans cette mesure, d'évoquer et de statuer immédiatement sur ces demandes ;

Considérant que certaines pièces bouchères découpées et emballées sous vide à partir de l'été 1995 à l'abattoir municipal de Roanne ne présentaient pas une qualité organoleptique acceptable ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert commis en référé, que la cause initiale de ces désordres est le manque de puissance frigorifique de l'installation qui est apparu lorsque la capacité traitée a approché de la capacité maximale prévue par la ville de Roanne, déficit consécutif à des erreurs au niveau des calculs des besoins ; que les effets de ce déficit de puissance ont été aggravés par des insuffisances du système de distribution et de régulation, ainsi qu'une mauvaise disposition des locaux qui ont contribué à l'augmentation de la température et à une saturation hygrométrique, phénomènes qui ont été en particulier favorisés par l'absence de vannes de réglages sur la totalité du circuit empêchant d'équilibrer les débits dans les différents tronçons, le choix de vannes de régulation deux voies malgré la disparité des débits sur les divers équipements de l'abattoir, l'installation d'un ballon tampon sans séparation, ce qui a eu pour conséquence un réchauffage des départs par les retours et une alimentation des frigorifères par un fluide caloporteur à une température plus élevée, l'absence de sas entre la salle de ressuage et la salle de contrôle et des défauts de conception de la salle de ressuage et de son système de dégivrage par ventilation ; que si la mission confiée à la société Blézat Ferrat Alimentaires dans le cadre des avenants des 24 mars 1988, 29 mai 1989 et 3 juin 1991, avenants ayant pris en compte la volonté de la ville de Roanne de porter la capacité de l'abattoir à 18 000 tonnes par an, était une mission allégée, comprenant la définition d'un avant-projet sommaire et d'un avant projet détaillé mais excluant la prise en charge des spécifications techniques détaillées et des plans d'exécution des ouvrages, il résulte de l'instruction que la société Blézat Ferrat Alimentaires a été amenée à analyser l'augmentation de puissance frigorifique qui était nécessaire et à se prononcer sur le choix du système de distribution et de régulation ; que ces désordres, qui sont donc imputables à des fautes de conception du système frigorifique mais également, pour partie, à des fautes dans les travaux d'exécution, en particulier l'installation du ballon tampon par la société Mondial Frigo, sont de nature à engager la responsabilité solidaire des entreprises à l'égard du fermier du fait de leurs fautes respectives, à l'origine des mêmes désordres qui ont entraîné un préjudice distinct de celui du maître de l'ouvrage ; qu'en revanche, la SOCIETE SICAREV ne précise pas quelle faute aurait commise l'entreprise Ducret et n'est dès lors pas fondée à en rechercher la responsabilité ; que doivent être également écartées les conclusions dirigées contre le Bureau Veritas dont la mission ne s'étendait pas au contrôle du fonctionnement des installations frigorifiques et qui n'est pas tenu à un devoir général de conseil ; que, dans ces conditions, la SOCIETE SICAREV est seulement fondée à demander la condamnation solidaire de la société Blézat Ferrat Alimentaires et de la société Mondial Frigo à l'indemniser du préjudice subi qui s'élève, compte tenu du défaut de vigilance de la SOCIETE SICAREV, à la somme de 43 611,24 euros correspondant aux charges sur équipements palliatifs retenus par l'expert ;

Sur l'appel en garantie de la société Mondial Frigo :

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la cause initiale et principale des désordres ayant affecté le fonctionnement de l'abattoir municipal de Roanne est le déficit de puissance frigorifique, insuffisance aggravée par les défauts de conception du système de distribution et de régulation ; qu'il résulte de l'instruction que les dysfonctionnements de ce système sont la conséquence de vices de conception, sauf en ce qui concerne l'installation d'un ballon sans tampon par la société Mondial Frigo, alors qu'il était prévu de poser un ballon ayant une séparation intérieure favorisant la stratification entre le retour et le départ ; que la circonstance que la mission de la société Blézat Ferrat Alimentaires a été allégée est sans incidence sur l'étendue des taches confiées à la société Mondial Frigo, dont la mission d'entrepreneur chargé des travaux ne pouvait comprendre la définition des besoins ou le choix des techniques de régulation des flux ; que, dans ces conditions, la société Blézat Ferrat Alimentaires doit être condamnée à garantir la société Mondial Frigo de 90 pour-cent des condamnations ci-dessus prononcées ;

Sur les dépens :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : « Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties (...) » ; qu'aux termes de l'article R. 621-13 dudit code : « (...) Dans le cas ou les frais d'expertise (...) sont compris dans les dépens d'une instance principale, la formation de jugement statuant sur cette instance peut décider que la charge définitive de ces frais incombe à une partie autre que celle qui a été désignée par l'ordonnance (...) » ; que les dépens de l'instance, correspondant au coût de l'extension de l'expertise demandée par la SOCIETE SICAREV par requête enregistrée le 12 juin 1997, se montent à la somme de 6 454,81 euros toutes taxes comprises ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre ces frais à la charge solidaire de la société Blézat Ferrat Alimentaires et de la société Mondial Frigo, parties perdantes dans la présente instance ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

Considérant qu'il y a lieu en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge solidaire de la société Blézat Ferrat Alimentaires et de la société Mondial Frigo, parties tenues aux dépens de la présente instance une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la SOCIETE SICAREV et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en application des mêmes dispositions et dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge conjointe et solidaire de la SOCIETE SICAREV et de la compagnie AXA France une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par le Bureau Veritas et non compris dans les dépens ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la SOCIETE SICAREV qui n'est dans la présente instance, ni la partie tenue aux dépens, ni la partie perdante, soit condamnée à quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par la société Mondial Frigo et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon du 25 novembre 2004 est annulé en tant qu'il a omis de statuer sur les conclusions de la SOCIETE SICAREV dirigées contre les sociétés BFA, Mondial Frigo, Ducret et le Bureau Veritas.

Article 2 : La société Blézat Ferrat Alimentaires et la société Mondial Frigo sont condamnées solidairement à verser à la SOCIETE SICAREV une somme de 43 611,24 euros.

Article 3 : Les frais et honoraires d'expertise, d'un montant de 6 454,81 euros, sont mis à la charge solidaire de la société Blézat Ferrat Alimentaires et de la société Mondial Frigo.

Article 4 : La société Blézat Ferrat Alimentaires est condamnée à relever et garantir la société Mondial Frigo à hauteur de 90 pour-cent des condamnations prononcées à son encontre.

Article 5 : La société Blézat Ferrat Alimentaires et la société Mondial Frigo verseront solidairement à la SOCIETE SICAREV une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : La SOCIETE SICAREV et la Compagnie d'assurances AXA France verseront solidairement au Bureau Veritas une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

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N° 05LY00209


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 05LY00209
Date de la décision : 18/06/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: M. François BOURRACHOT
Rapporteur public ?: M. BESLE
Avocat(s) : SCP CEVAER - DESILETS- ROBBE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2008-06-18;05ly00209 ?
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