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14/02/2008 | FRANCE | N°07LY00341

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 3ème chambre, 14 février 2008, 07LY00341


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 12 février 2007, présentée pour M. Jean-Pierre X, domicilié ..., par Me Rodrigues, avocat au barreau de Lyon ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0606799 en date du 14 novembre 2006, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 30 octobre 2006, par lequel le préfet du Rhône a ordonné sa reconduite à la frontière et, d'autre part, de la d

écision distincte du même jour fixant le pays dont il a la nationalité comme des...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 12 février 2007, présentée pour M. Jean-Pierre X, domicilié ..., par Me Rodrigues, avocat au barreau de Lyon ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0606799 en date du 14 novembre 2006, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 30 octobre 2006, par lequel le préfet du Rhône a ordonné sa reconduite à la frontière et, d'autre part, de la décision distincte du même jour fixant le pays dont il a la nationalité comme destination de la reconduite ;

2°) d'annuler l'arrêté et la décision susmentionnés pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire, mention « vie privée et familiale » ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 900 euros, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 janvier 2008 :

- le rapport de M. Fontanelle, président ;

- les observations de M. Guimet, représentant le préfet du Rhône ;

- et les conclusions de M. Reynoird, commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le préfet du Rhône ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon ne s'est pas prononcé sur les moyens tirés de la méconnaissance, par l'arrêté de reconduite à la frontière, des dispositions des 7° et 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui avaient été soulevés devant lui ; que le premier juge a, par suite, entaché son jugement d'omissions à statuer ; qu'il y a lieu d'annuler ledit jugement et de statuer immédiatement, par voie d'évocation, sur la demande présentée par M. X devant le premier juge ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : / (…) 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation de visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité congolaise, est entré en France le 8 décembre 2004, en possession de son passeport revêtu d'un visa schengen valable 90 jours ; que sa demande de délivrance d'un titre de séjour a été rejetée par décision du 18 octobre 2005, confirmée le 12 décembre 2005 ; que son admission provisoire au séjour en qualité de demandeur d'asile lui a été refusée le 17 mars 2006 ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, le 30 octobre 2006, il était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 2° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;


Considérant, en premier lieu, que M. X fait valoir que l'arrêté de reconduite à la frontière est insuffisamment motivé en ce qu'il ne mentionne pas ses problèmes de santé, son long séjour en Allemagne et l'embrigadement de son épouse par une secte ; que si l'obligation de motiver les mesures portant reconduite à la frontière d'un étranger implique que ces décisions comportent l'énoncé des éléments de droit et de fait qui fondent la mise en oeuvre de la procédure d'éloignement, l'autorité administrative n'est pas tenue de préciser en quoi la situation particulière de l'intéressé ne fait pas obstacle à la mise en oeuvre de cette procédure ; que, par suite, et alors que l'arrêté susmentionné du 30 octobre 2006 contient les indications de fait et de droit qui en constituent le fondement, M. X n'est pas fondé à soutenir que la mesure litigieuse est insuffisamment motivée ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté décidant la reconduite à la frontière de M. X a été pris sur le fondement du 2° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non sur celui du 3° de ce même article ; que, dès lors, l'intéressé ne saurait utilement exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé le 18 octobre 2005 et qui a été confirmé le 12 décembre 2005, ces décisions ne constituant pas le fondement de la mesure de reconduite à la frontière ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (…) 7° L'étranger marié depuis au moins trois ans avec un conjoint de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage et que le conjoint ait conservé la nationalité française (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X s'est marié à une ressortissante française le 30 avril 2004, soit moins de trois ans avant la date de l'arrêté de reconduite à la frontière ; que, dès lors, l'arrêté de reconduite à la frontière n'a pas méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (…) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi (…) » ;

Considérant que si M. X fait valoir qu'il souffre notamment d'hypertension artérielle et d'anxiété lui occasionnant des malaises et nécessitant une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences graves, il ne ressort pas des pièces du dossier que le traitement et le suivi médical nécessaires seraient indisponibles dans son pays d'origine ; que, par ailleurs, les éléments médicaux dont avait connaissance le préfet du Rhône à la date de la mesure d'éloignement ne lui faisaient pas obligation de saisir le médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales, préalablement à cette décision ; que, dès lors, l'arrêté de reconduite à la frontière n'a pas méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'est pas davantage entaché d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur son état de santé ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ;

Considérant que si M. X fait valoir qu'il a quitté la République démocratique du Congo en 1994, pour s'installer en Allemagne, où il a vécu durant dix ans avant son entrée en France au mois de décembre 2004, et qu'il a épousé une ressortissante française le 30 avril 2004, il ressort toutefois des pièces du dossier que la communauté de vie entre les époux a cessé et que le séjour en France de l'intéressé, où ce dernier est arrivé à l'âge de quarante et un ans, est récent ; que compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour du requérant en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de la décision désignant le pays de destination de la reconduite :

Considérant que cette décision, qui énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, est suffisamment motivée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;


DECIDE :


Article 1er : Le jugement du 14 novembre 2006 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Lyon et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.
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N° 07LY00341


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 07LY00341
Date de la décision : 14/02/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Guy FONTANELLE
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : SANDRINE RODRIGUES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2008-02-14;07ly00341 ?
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