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14/02/2008 | FRANCE | N°07LY00226

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 3ème chambre, 14 février 2008, 07LY00226


Vu la requête, enregistrée le 30 janvier 2007, présentée pour M. Abdoul Ghadirou X, domicilié ..., par Me Borges de Deus Correia, avocat au barreau de Grenoble ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700315 en date du 19 janvier 2007, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 janvier 2007, par lequel le préfet du Rhône a ordonné sa reconduite à la frontière, de la décision distincte du même jour fixant le pays dont il a la na

tionalité comme destination de la reconduite, et de la décision prononçant son pl...

Vu la requête, enregistrée le 30 janvier 2007, présentée pour M. Abdoul Ghadirou X, domicilié ..., par Me Borges de Deus Correia, avocat au barreau de Grenoble ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700315 en date du 19 janvier 2007, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 janvier 2007, par lequel le préfet du Rhône a ordonné sa reconduite à la frontière, de la décision distincte du même jour fixant le pays dont il a la nationalité comme destination de la reconduite, et de la décision prononçant son placement en rétention administrative ;

2°) d'annuler l'arrêté et les décisions susmentionnés pour excès de pouvoir ;

3°) d'ordonner la production de son entier dossier de demande de titre de séjour ;

4°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de 48 heures suivant la notification du présent arrêt, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et de réexaminer sa situation administrative ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 janvier 2008 :

- le rapport de M. Fontanelle, président ;
- les observations de M.Guimet représentant le préfet du Rhône ;

- et les conclusions de M. Reynoird , commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du II. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité guinéenne, n'établit pas être entré régulièrement sur le territoire français et est dépourvu d'un titre de séjour en cours de validité ; que s'il avait déposé, le 15 juin 2004, auprès du préfet de police de Paris, une demande de carte de séjour temporaire pour raison de santé, le silence gardé durant plus de quatre mois sur sa demande par l'administration a, en tout état de cause, fait naître une décision de refus ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, le 17 janvier 2007, il était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 1° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué, ni sur les autres moyens soulevés par le requérant ;

Considérant qu'il ressort des pièces de dossier que M. X, qui a séjourné en France au cours des années 1995 et 1996 et soutient être entré pour la dernière fois sur le territoire en 1998, réside habituellement en France depuis huit ans ; qu'il est suivi médicalement depuis 1995, dans un service hospitalier spécialisé, pour une polyarthrite rhumatoïde nécessitant une prise en charge médicale spécialisée dont le défaut pourrait avoir pour lui, à court terme, des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que son épouse, avec qui il s'est marié en 1990 en Guinée, l'a rejoint sur le territoire français en 2006, où elle a donné naissance, le 18 décembre 2006, à leur troisième enfant ; qu'elle a présenté une demande d'asile devant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et obtenu, à ce titre, une autorisation provisoire de séjour valable du 27 décembre 2006 au 26 mars 2007 ; qu'ainsi, nonobstant la présence au Sénégal, de deux enfants mineurs de M. X, dont sa mère s'occupe, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée du séjour du requérant en France et de son état de santé, l'arrêté contesté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ; qu'il doit, par suite, être annulé ; qu'il en est de même, par voie de conséquence, des décisions distinctes du même jour désignant la Guinée comme pays de destination de la reconduite et ordonnant le placement de l'intéressé en rétention administrative ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (…) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (…) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé » et qu'aux termes de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé (…) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que le préfet ait à nouveau statué sur son cas. » ;

Considérant, qu'à la suite de l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière, il incombe au préfet, en application des dispositions précitées de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, non seulement de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour mais aussi, qu'il ait été ou non saisi d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ; que, dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 911-2 du code de justice administrative pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être réexaminée au vu de l'ensemble de la situation de droit et de fait existant à la date de ce réexamen ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de prescrire au préfet du Rhône de délivrer à M. X, dans le délai de 15 jours, une autorisation provisoire de séjour et de se prononcer sur sa situation dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;



Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante dans la présente instance, une somme de 1 000 euros à verser à M. X au titre des frais exposés par ce dernier et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement en date du 19 janvier 2007 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon, ensemble l'arrêté du 17 janvier 2007 par lequel le préfet du Rhône a ordonné la reconduite à la frontière de M. X, la décision distincte du même jour fixant le pays de destination de la reconduite et celle décidant du placement de l'intéressé en rétention administrative sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Rhône de délivrer à M. X une autorisation provisoire de séjour dans le délai de 15 jours et de procéder à un nouvel examen de sa situation administrative dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. X une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.
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N° 07LY00226


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 07LY00226
Date de la décision : 14/02/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Guy FONTANELLE
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : J. BORGES et M. ZAIEM

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2008-02-14;07ly00226 ?
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