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29/06/2007 | FRANCE | N°06LY01722

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 3ème chambre, 29 juin 2007, 06LY01722


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 8 août 2006, présentée pour M. Polat X, domicilié ..., par Me Bertrand Hebrard, avocat au barreau de Saint-Etienne ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0603906 en date du 6 juillet 2006 en ce que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 juin 2006, par lequel le préfet de la Loire a ordonné sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler l'arr

êté susmentionné pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loir...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 8 août 2006, présentée pour M. Polat X, domicilié ..., par Me Bertrand Hebrard, avocat au barreau de Saint-Etienne ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0603906 en date du 6 juillet 2006 en ce que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 juin 2006, par lequel le préfet de la Loire a ordonné sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler l'arrêté susmentionné pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire de lui restituer son titre de séjour ou, à défaut, de lui délivrer une autorisation de travail ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

…………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 juin 2007 :

- le rapport de M. Fontanelle, président ;

- et les conclusions de M. Reynoird, commissaire du gouvernement ;


Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : / (…) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ; (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité turque, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 25 février 2006, de la décision du préfet de la Loire du 17 février 2006 lui retirant sa carte de résident ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, le 12 juin 2006, il était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Sur la légalité externe de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant que M. Ferin, secrétaire général de la préfecture, a pu prendre légalement l'arrêté susvisé, en vertu de la délégation de signature qui lui a été consentie par l'arrêté préfectoral du 18 avril 2005, dont la rédaction est suffisamment précise ;

Considérant, d'une part, que la circonstance que M. X avait, postérieurement à la décision prononçant le retrait de sa carte de résident servant de fondement à la mesure d'éloignement en litige, demandé la délivrance d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français n'obligeait pas le préfet à surseoir à l'édiction d'un arrêté de reconduite à la frontière jusqu'à ce qu'il ait statué sur cette nouvelle demande, dès lors que les conditions légales de la reconduite se trouvaient réunies, et, d'autre part, que l'absence de mention, dans l'arrêté de reconduite à la frontière, de cette nouvelle demande de titre de séjour à laquelle il n'avait pas été répondu, n'est pas de nature à faire regarder la mesure d'éloignement comme insuffisamment motivée ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen préalable de la situation personnelle de M. X avant de prendre à son encontre l'arrêté de reconduite à la frontière litigieux ;

Sur la légalité interne de l'arrêté de reconduite à la frontière :

En ce qui concerne l'exception d'illégalité de la décision de retrait de carte de résident en date du 17 février 2006 :

Considérant, en premier lieu, que cette décision de retrait de carte de résident énonce les considérations de droit et de fait qui en constitue le fondement ; qu'il suit de là que le moyen tiré du caractère insuffisant de sa motivation doit être écarté ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. (…) » ;

Considérant que le retrait d'une carte de résident à un étranger n'entre pas dans les cas de consultation obligatoire de la commission du titre de séjour prévus par les dispositions précitées de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il en résulte que le moyen tiré de ce que la décision du 17 février 2006 du préfet de la Loire serait irrégulière faute d'avoir été précédée de la consultation de la commission du titre de séjour doit être écarté ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : « sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : / 1° A l'étranger marié depuis au moins deux ans avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie entre les époux n'ait pas cessé, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (…) » ; que ces dispositions ne font pas obstacle à ce que l'autorité administrative retire à un étranger la carte de résident qu'il a obtenue sur ce fondement lorsqu'elle peut établir, sous le contrôle du juge, que l'étranger n'a en fait contracté mariage que dans le but d'obtenir la délivrance d'un tel titre de séjour ;

Considérant que contrairement aux affirmations de M. X, qui n'apporte aucun élément probant permettant d'attester de la réalité d'un lien affectif et d'une communauté de vie, même de courte durée, avec son épouse française, le caractère frauduleux de son mariage avec cette dernière ressort clairement des pièces du dossier et notamment de l'enquête de police diligentée et des déclarations effectuées dans le cadre de cette enquête par son épouse ; que, par suite, le préfet de la Loire a pu légalement prononcer, par décision du 17 février 2006 qui n'est pas entachée d'une erreur de fait, le retrait de la carte de résident dont M. X était titulaire ;

Considérant que si M. X soutient que le préfet se prévaut d'une enquête de police qui lui aurait été transmise en violation de l'article 11 du code de procédure pénale et de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il ne peut, en tout état de cause, utilement invoquer à l'encontre de la procédure suivie devant le juge administratif une prétendue violation du secret de l'instruction pénale ni une méconnaissance des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui ne sont pas applicables au contentieux des arrêtés de reconduite à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui » et qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : « (…) la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : / (…) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins un an ; (…) » ;

Considérant que la circonstance que l'intéressé est titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée et serait soutenu par son employeur, n'est pas de nature à permettre de regarder la décision de retrait de titre de séjour comme méconnaissant les stipulations de l'article 8 susrelatives, alors que M. X n'établit pas la réalité d'une vie commune ni d'un lien affectif avec son épouse française, et qu'il est par ailleurs père de quatre enfants, nés entre 1986 et 1998, et vivant avec leur mère en Turquie ; que la circonstance que son épouse française a donné naissance, le 28 février 2006, soit postérieurement à la décision de retrait de titre de séjour en cause, à un enfant est sans incidence sur la légalité de cette décision ;

Considérant que s'il ressort des pièces du dossier que M. X a reconnu, le 6 mars 2006, le fils de son épouse française né le 28 février 2006, cette circonstance n'est pas de nature à permettre de regarder l'intéressé comme remplissant les conditions prévues par le 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au 17 février 2006, date de la décision de retrait de sa carte de résident ;

En ce qui concerne l'autre moyen :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Ne peuvent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : / (…) 6° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins un an ; (…) » ;

Considérant que si, ainsi qu'il vient d'être dit, le requérant a reconnu l'enfant de son épouse française, il ne ressort pas, en tout état de cause, des pièces du dossier, que M. X contribuerait effectivement à l'éducation ou à l'entretien de cet enfant depuis sa naissance ; que, dès lors, l'intéressé n'est pas fondé à se prévaloir des dispositions du 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais irrépétibles doivent être rejetées par voie de conséquence ;

Sur les conclusions du préfet de la Loire tendant à l'application de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. X une quelconque somme au profit du préfet de la Loire, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;


DECIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées devant la Cour par le préfet de la Loire au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 06LY01722


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 06LY01722
Date de la décision : 29/06/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Guy FONTANELLE
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : BERTRAND HEBRARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2007-06-29;06ly01722 ?
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