Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 2 août 2006, présentée pour M. Mustafa X, domicilié ..., par Me Marcel Giudicelli, avocat au barreau de Lyon ;
M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0603863 en date du 6 juillet 2006, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 12 juin 2006, par lequel le préfet de la Loire a ordonné sa reconduite à la frontière et, d'autre part, de la décision distincte du même jour fixant le pays dont il a la nationalité comme destination de la reconduite ;
2°) d'annuler l'arrêté et la décision susmentionnés pour excès de pouvoir ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire de réexaminer sa situation et de lui délivrer un titre de séjour portant la mention « salarié » ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 juin 2007 :
- le rapport de M. Fontanelle, président ;
- et les conclusions de M. Reynoird, commissaire du gouvernement ;
Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : / (…) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ; (…) » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité turque, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 17 janvier 2006, de la décision en date du 16 janvier 2006 par laquelle le préfet de la Loire lui a retiré la carte de résident dont il était titulaire et l'a invité à quitter le territoire ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, le 12 juin 2006, il était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
En ce qui concerne l'exception d'illégalité de la décision de retrait de la carte de résident :
Considérant qu'aux termes de l'article 15 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, dans sa rédaction issue de la loi n° 98-349 du 11 mai 1998 : « Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : / 1° A l'étranger marié depuis au moins un an avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie entre les époux n'ait pas cessé, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (…) » et qu'aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur au 16 janvier 2006 : « sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : / 1° A l'étranger marié depuis au moins deux ans avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie entre les époux n'ait pas cessé, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (…) » ; que ces dispositions ne font pas obstacle à ce que l'autorité administrative retire à un étranger la carte de résident qu'il a obtenue sur ce fondement lorsqu'elle peut établir, sous le contrôle du juge, que l'étranger n'a en fait contracté mariage que dans le but d'obtenir la délivrance d'un tel titre de séjour, lequel titre de séjour, ainsi obtenu par fraude, ne crée pas de droits et peut, par suite, être retiré ou abrogé par l'autorité compétente, alors même que le délai de retrait de droit commun est expiré ;
Considérant qu'à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. X excipe de l'illégalité de la décision, non définitive, du 16 janvier 2006 par laquelle le préfet de la Loire lui a retiré la carte de résident qui lui avait été délivrée le 8 octobre 2001, en application des dispositions du 1° de l'article 15 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 alors en vigueur, désormais codifié à l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Considérant que contrairement aux allégations de M. X, qui n'apporte aucun élément probant permettant d'attester de la réalité d'un lien affectif et d'une communauté de vie, même de courte durée, le caractère frauduleux de son mariage avec une ressortissante française, le 2 octobre 2000, ressort clairement des pièces du dossier et notamment de l'enquête de police diligentée et des déclarations effectuées, dans ce cadre, tant par le requérant lui-même que par son ancienne épouse française ; que la circonstance que son épouse n'ait pas sollicité l'annulation de cette union est sans incidence sur la légalité de la décision de retrait du titre de séjour ; que, par suite, le préfet de la Loire a pu légalement se fonder sur le caractère frauduleux du mariage pour décider, le 16 janvier 2006, de retirer la carte de résident dont M. X était titulaire ;
En ce qui concerne les autres moyens :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ;
Considérant que si M. X fait valoir qu'il vit en France depuis près de six ans, qu'il occupe un emploi stable à durée indéterminée depuis plus de cinq ans et qu'il est considéré par son employeur comme un salarié exemplaire, il ressort cependant des pièces du dossier que l'intéressé s'est remarié, le 6 juin 2005, avec sa première épouse de nationalité turque, qui vit en Turquie avec leurs trois enfants mineurs ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour du requérant en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant en second lieu, que M. X ne peut utilement se prévaloir des énonciations contenues dans les circulaires ministérielles du 12 mai 1998 et du 19 décembre 2002 qui sont dépourvues de caractère réglementaire ;
Sur la décision distincte fixant le pays de destination :
Considérant que M. X ne soulève aucun moyen à l'appui de ses conclusions dirigées contre cette décision ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
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N° 06LY01681