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13/04/2007 | FRANCE | N°06LY01739

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 3ème chambre, 13 avril 2007, 06LY01739


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 10 août 2006, présentée pour M. Karim X, domicilié chez M. et Mme X, ..., par Me Rodrigues, avocat au barreau de Lyon ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0604414 en date du 19 juillet 2006, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 10 juillet 2006, par lequel le préfet du Rhône, a ordonné sa reconduite à la frontière et, d'autre part

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 10 août 2006, présentée pour M. Karim X, domicilié chez M. et Mme X, ..., par Me Rodrigues, avocat au barreau de Lyon ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0604414 en date du 19 juillet 2006, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 10 juillet 2006, par lequel le préfet du Rhône, a ordonné sa reconduite à la frontière et, d'autre part, de la décision distincte du même jour désignant le pays de destination de la reconduite ;

2°) d'annuler l'arrêté et la décision susmentionnés pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de statuer sur sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 900 euros, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

…………………………………………………………………………………………….
Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 avril 2007 :

- le rapport de M. Fontanelle, président ;

- et les conclusions de M. Aebischer, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (…) 6° Si le récépissé de la demande de carte de séjour ou l'autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l'étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité algérienne, s'est vu refuser un titre de séjour par décision du préfet du Rhône du 3 mars 2004, notifiée le 23 mars 2004 ; que le statut de réfugié lui a été refusé par décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides du 28 octobre 2004, confirmée par la commission des recours des réfugiés le 23 mai 2005; que par décision du 13 juillet 2005, le préfet du Rhône a retiré le document provisoire de séjour qui avait été délivré à l'intéressé ; que M. X a sollicité le réexamen de la reconnaissance du statut de réfugié ; que le préfet du Rhône, par une décision en date du 6 octobre 2005, a considéré que cette demande présentait un caractère abusif et a, en application du 4° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, refusé son admission provisoire au séjour ; que, par décision du 7 novembre 2005, l'office français de protection des réfugiés et des apatrides a rejeté la demande d'asile de M. X, qui, s'étant maintenu sur le territoire, se trouvait ainsi dans le cas où, en application des dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ;

Considérant que si M. X fait valoir que son père et sa mère vivent en France depuis respectivement quarante-trois et seize ans et qu'il y a déjà séjourné durant l'année 1987, il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé, arrivé en France en 2003 à l'âge de trente-deux ans, est célibataire et n'est pas dépourvu d'attaches familiales en Algérie où vivent son frère et ses soeurs ; qu'il n'établit pas, par les pièces qu'il produit, la réalité d'une communauté de vie stable et durable ni l'existence d'un projet de mariage avec une ressortissante française ; que s'il fait encore valoir que sa mère, qui souffre d'un diabète insulino-dépendant, nécessite la présence d'une personne à ses côtés pour l'assister dans les actes de la vie quotidienne, que son père, âgé de 73 ans, ne peut plus l'assister et que c'est à lui qu'incombe cette tâche, il n'établit pas que sa présence auprès d'elle serait indispensable, dès lors qu'aucun élément ne permet d'apprécier l'état de santé du père de M. X et que l'intéressé n'est pas entré en France pour soigner ses parents ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour du requérant en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'il n'est pas davantage entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : « Ne peuvent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : / (…) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi » et qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : « (…) Le certificat de résidence d'un an portant la mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit : / (…) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. (…) » ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces médicales produites que les affections dont M. X souffre nécessiteraient une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni qu'il ne pourrait pas effectivement bénéficier d'un traitement et d'un suivi approprié dans son pays d'origine ; qu'il est constant que M. X n'a jamais sollicité de titre de séjour pour raison de santé et que dans les circonstances de l'espèce, aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait au préfet de recueillir l'avis du médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales avant de prendre la mesure d'éloignement en litige ;

Sur la décision distincte fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « (…) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. » et que ce dernier texte énonce que « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants » ;

Considérant que ces dispositions combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne, soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou de groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ;
Considérant que si M. X allègue avoir fait l'objet de menaces de la part de groupes terroristes du fait de sa profession de photographe et de son action au sein de l'armée algérienne et que les autorités algériennes, qui auraient par ailleurs exercé des pressions sur lui du fait de son engagement en faveur de la cause kabyle, ne pourraient pas assurer sa protection, il n'établit pas, par les documents qu'il produit, la réalité des menaces et risques auxquels il serait personnellement exposé en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales devra être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de M. X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Rhône de réexaminer la situation administrative de M. X doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit au profit de M. X, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;


DECIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
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N° 06LY01739


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 06LY01739
Date de la décision : 13/04/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Guy FONTANELLE
Rapporteur public ?: M. AEBISCHER
Avocat(s) : SANDRINE RODRIGUES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2007-04-13;06ly01739 ?
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