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22/03/2007 | FRANCE | N°06LY01022

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 6ème chambre, 22 mars 2007, 06LY01022


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 18 mai 2006, présentée pour M. Ahmed X domicilié ... par Me Coutaz, avocat au barreau de Grenoble ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601986 en date du 4 mai 2006 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Isère du 6 avril 2006 ordonnant sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant le pays de destination de l

a reconduite ;

2°) d'annuler l'arrêté et la décision susmentionnés ;
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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 18 mai 2006, présentée pour M. Ahmed X domicilié ... par Me Coutaz, avocat au barreau de Grenoble ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601986 en date du 4 mai 2006 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Isère du 6 avril 2006 ordonnant sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) d'annuler l'arrêté et la décision susmentionnés ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de procéder à un nouvel examen de sa situation dans le délai d'un mois et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 820 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié, réglementant les conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers prévus à l'article 7-5 du décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mars 2007 :

- le rapport de Mme Lorant, présidente ;

- et les conclusions de M. d'Hervé, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, ressortissant algérien, s'est maintenu sur le territoire national plus d'un mois après la notification, le 18 août 2005, de la décision du préfet de l'Isère du 17 août 2005 refusant de lui délivrer un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire national dans le délai d'un mois ; qu'il était ainsi dans le cas visé au 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
En ce qui concerne l'exception d'illégalité du refus de certificat de résidence du 17 août 2005 :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : « (…) le certificat de résidence d'un an portant la mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit : (…) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. (…) » ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 8 juillet 1999 susvisé : « Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; - si l'intéressé peut ou non bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire ; - et la durée prévisible du traitement. Il indique, en outre, si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers son pays de renvoi. Cet avis est transmis au préfet par le directeur départemental des affaires sanitaires et sociales. » ; qu'enfin, l'article R. 4127-76 du code de la santé publique prévoit que « tout document délivré par un médecin doit (…) permettre l'identification du praticien dont il émane et être signé par lui » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision du préfet de l'Isère en date du 17 août 2005 refusant la délivrance d'un certificat de résidence à M. X en tant qu'étranger malade a été prise au vu d'un avis du médecin inspecteur de santé publique du 28 juin 2005 mentionnant que l'état de santé du requérant nécessite une prise en charge médicale spécialisée dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il devrait pouvoir bénéficier d'une prise en charge adaptée dans son pays d'origine ; que cet avis a été renouvelé les 6 septembre 2005 et 6 octobre 2005 à la suite du recours gracieux formé par l'intéressé ; que les copies des avis en cause, qui comportent des signatures différentes et illisibles, ne comportent pas l'indication des nom et prénom de leur auteur ; qu'il n'est allégué par l'administration aucune circonstance qui aurait permis en l'espèce d'identifier l'auteur ou les auteurs de ces actes ; que, tels que produits au dossier, ils sont donc irréguliers ; qu'ainsi, en se fondant sur ces avis pour refuser un certificat de résidence à M. X, puis pour prononcer la mesure de reconduite litigieuse, l'administration a suivi une procédure irrégulière ; que l'arrêté du 6 avril 2006 du préfet de l'Isère prononçant la reconduite à la frontière de M. X doit, par suite être regardé comme illégal ; qu'il en est de même, par voie de conséquence, de la décision du même jour désignant comme destination l'Algérie ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (…) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution » ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (…) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé. » et qu'aux termes de l'article L. 911-3 du même code : « Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte (…) » ; qu'aux termes de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé (…) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que le préfet ait à nouveau statué sur son cas » ;

Considérant, qu'à la suite de l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière, il incombe au préfet, en application des dispositions précitées de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, non seulement de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour mais aussi, qu'il ait été ou non saisi d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ; que, dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 911-2 du code de justice administrative pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être réexaminée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet de l'Isère de délivrer, sans délai, une autorisation provisoire de séjour à M. X, et de se prononcer, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sur la situation de celui-ci ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, que M. X, pour le compte de qui les conclusions de la requête relatives à l'application de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative doivent être réputées présentées, n'allègue pas avoir exposé de frais autres que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été allouée ; que, d'autre part, l'avocat de M. X n'a pas demandé, sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, la mise à la charge de l'Etat de la somme correspondant aux frais exposés qu'il aurait réclamée à son client si ce dernier n'avait pas bénéficié d'une aide juridictionnelle totale ; que, dans ces conditions, les conclusions de la requête tendant à l'application de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative ne peuvent être accueillies ;

DECIDE :


Article 1er : Le jugement n° 0601986 du 4 mai 2006 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Grenoble, l'arrêté du préfet de l'Isère du 6 avril 2006 prononçant la reconduite à la frontière de M. X et la décision du même jour désignant l'Algérie sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Isère de délivrer à M. X une autorisation provisoire de séjour et de procéder à un nouvel examen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.
1

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N° 06LY01022


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 06LY01022
Date de la décision : 22/03/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Nicole LORANT
Rapporteur public ?: M. D'HERVE
Avocat(s) : COUTAZ CLAUDE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2007-03-22;06ly01022 ?
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