Vu la requête, enregistrée le 23 avril 2003, présentée pour Mme Annie X, ès qualité de légataire universelle de M. Pierre Borel, et domiciliée ..., par Me Didier Gingembre, avocat au barreau des Hauts-de-Seine ;
Mme X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 012141 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand en date du 4 février 2003, rejetant sa demande de décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des cotisations supplémentaires de contribution sociale généralisée, de contribution au remboursement de la dette sociale et de prélèvement social, établies au nom de M. Pierre Borel, au titre de l'année 1997 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 6 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code civil ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 janvier 2007 :
- le rapport de M. Kolbert, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Pourny, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 79 du code général des impôts : « Les traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères concourent à la formation du revenu global servant de base à l'impôt sur le revenu. » ; qu'aux termes du 6 de l'article 158 du même code : « Les rentes viagères constituées à titre onéreux ne sont considérées comme un revenu, pour l'application de l'impôt sur le revenu dû par le crédirentier, que pour une fraction de leur montant. Cette fraction est déterminée d'après l'âge du crédirentier lors de l'entrée en jouissance de la rente, est fixée à 70 p.100 si l'intéressé est âgé de moins de 50 ans ; 50 p.100 s'il est âgé de 50 à 59 ans inclus ; 40 p.100 s'il est âgé de 60 à 69 ans ; 30 p.100 s'il est âgé de plus de 69 ans… » ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que par acte notarié en date du 16 octobre 1997, la société Jean Couzon SA a racheté à M. Pierre Borel, contre le versement d'une somme de 377 365 francs, la rente viagère révisable de 72 000 francs par an, dont l'intéressé était bénéficiaire en vertu d'un acte antérieur du 18 juillet 1963 au titre de la conversion d'une partie du prix de la vente d'un fonds de commerce et d'un ensemble immobilier dont il était alors propriétaire ; qu'eu égard à l'âge du crédirentier au moment de son entrée en jouissance de la rente, l'administration a regardé une fraction s'élevant à 40 % du prix de rachat, comme un revenu imposable de l'intéressé, dans la catégorie des traitements et salaires, et a donc, après le décès de M. Borel le 7 décembre 1997, établi et mis en recouvrement à l'encontre de Mme Annie X, ès qualité de légataire universelle, les suppléments correspondants d'impôt sur le revenu, de contribution sociale généralisée, de contribution au redressement de la dette sociale, et de prélèvement social ;
Considérant qu'il résulte des termes mêmes de la convention du 16 octobre 1997, passée devant notaire, et dont il n'est pas établi qu'elle aurait été signée par des personnes qui ne pouvaient valablement représenter les parties et exprimer leur volonté, que le contrat de rente viagère conclu le 18 juillet 1963 a été résilié à compter du 18 août 1997, et qu'à cette date, l'obligation du débirentier était définitivement éteinte, nonobstant les dispositions de l'article 1979 du code civil prévoyant que « le constituant ne peut se libérer du paiement de la rente en offrant de rembourser le capital.. », et auxquelles les parties peuvent en effet toujours déroger soit dès la conclusion du contrat d'origine soit par contrat ultérieur ; qu'eu égard au caractère essentiellement aléatoire du contrat de rente viagère, le capital versé par le débiteur au crédirentier en contrepartie de la renonciation de ce dernier au droit mobilier constitué par le bénéfice de la rente, ne saurait être regardé comme ayant la même nature que le montant cumulé des arrérages de la rente viagère qui auraient pu être versés, jusqu'à son décès, à défaut de résiliation et que c'est par suite à tort que l'administration a inclus une fraction de son montant, dans les revenus imposables de l'ancien crédirentier ; que de même, l'opération de rachat de la rente viagère ne pouvant être assimilée à une cession de contrat à un tiers, sont inapplicables en l'espèce, les dispositions de l'article 124 B du code général des impôts permettant d'imposer les gains de cessions de certains contrats productifs de revenus de capitaux mobiliers, comme lesdits revenus ; que l'administration n'invoquant aucune autre disposition applicable pour justifier l'imposition de la fraction litigieuse du prix de rachat perçu par Mme X, cette dernière est, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ses conclusions en décharge ;
Sur les conclusions tendant au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à payer à Mme X une somme de 1 500 euros, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761- 1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n°012141 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand en date du 4 février 2003 est annulé.
Article 2 : Mme X, ès qualité de légataire universelle de M. Pierre Borel, est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution sociale généralisée, de contribution au remboursement de la dette sociale, et de prélèvement social auxquelles la succession de M. Pierre Borel a été assujettie au titre de l'année 1997.
Article 3 : L'Etat versera à Mme X une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 03LY00725