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28/12/2006 | FRANCE | N°06LY00996

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 2ème chambre*, 28 décembre 2006, 06LY00996


Vu le recours, enregistré au greffe de la cour administrative d'appel de Lyon le 15 mai 2006, présenté pour le PREFET DU RHONE, par Me Schmitt, avocat au barreau de Lyon ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0602420 du 27 avril 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 19 avril 2006 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Badjoko X ainsi que la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite et l'a condamné à verser à

Mme X la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice a...

Vu le recours, enregistré au greffe de la cour administrative d'appel de Lyon le 15 mai 2006, présenté pour le PREFET DU RHONE, par Me Schmitt, avocat au barreau de Lyon ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0602420 du 27 avril 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 19 avril 2006 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Badjoko X ainsi que la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite et l'a condamné à verser à Mme X la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée devant le Tribunal administratif de Lyon par Mme X ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;


Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 décembre 2006 :

- le rapport de M. Grabarsky, président ;

- les observations de Me Schmitt, avocat du PREFET DU RHONE et de Me Bonin, avocat de Mme Manpuya Nsonsuna ;
- et les conclusions de M. Besle, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions à fins d'annulation :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L 311-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France : « la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour, d'un récépissé de demande de titre de séjour ou d'un récépissé de demande d'asile n'a pas pour effet de régulariser les conditions de l'entrée en France, sauf s'il s'agit d'un étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié » ;

Considérant que Mme X ne s'étant pas vu reconnaître la qualité de réfugié dès lors que l'office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté ses demandes d'asile par décisions des 17 juin 2002, 25 février 2005 et 25 septembre 2005, confirmées par la commission des recours les 8 décembre 2003, 27 septembre 2005, la délivrance de l'autorisation provisoire de séjour qui lui a été délivré le 28 février 2000 n'a pas pu régulariser ses conditions d'entrée en France ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1º) Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; 2º) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; 3º) Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ; 4º) Si l'étranger n'a pas demandé le renouvellement de son titre de séjour temporaire et s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois suivant l'expiration de ce titre ; 5º) Si l'étranger a fait l'objet d'une condamnation définitive pour contrefaçon, falsification, établissement sous un autre nom que le sien ou défaut de titre de séjour ; 6°) Si le récépissé de la demande de carte de séjour ou l'autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l'étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé ; 7º) Si l'étranger a fait l'objet d'un retrait de son titre de séjour ou d'un refus de délivrance ou de renouvellement d'un titre de séjour, dans les cas où ce retrait ou ce refus ont été prononcés, en application des dispositions législatives et réglementaires en vigueur, en raison d'une menace à l'ordre public. 8º) Si pendant la période de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, pendant la période définie au 2º ci-dessus, le comportement de l'étranger a constitué une menace pour l'ordre public ou si, pendant cette même durée, l'étranger a méconnu les dispositions de l'article L. 341-4 du code du travail ».

Considérant dès lors, qu'à la date de l'arrêté décidant de sa reconduite à la frontière Mme X ne justifiait ni de son entrée régulière en France ni de la détention d'un titre de séjour en cours de validité ; que par suite le PREFET DU RHONE pouvait légalement se fonder sur les dispositions précitées du 1° de l'article L 511-1 pour prendre la mesure de reconduite contestée sans que soit de nature à y faire obstacle la circonstance que l'intéressée était susceptible d'entrer dans les prévisions du 6° du même article, dès lors qu'elle s'était vu opposer un refus de séjour par les décisions du ministre de l'intérieur du 5 août 2004 et du PREFET DU RHONE des 7 septembre 2004 et 23 mars 2006 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le conseiller délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du PREFET DU RHONE du 19 avril 2006 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X et la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par Mme X devant le Tribunal administratif et la Cour ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance, 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X, née en juin 1973, est entrée en France en décembre 1999 ; que par déclaration de vie maritale faite en mairie le 30 janvier 2002, elle a indiqué, sans être contredite, vivre depuis le 12 décembre 2001 avec un compatriote, titulaire d'une carte de résident d'une validité de dix ans et arrivé en France en janvier 1998 ; que, de ce couple, sont nés en France deux enfants en septembre 2002 et juillet 2005 ; que, dans ces conditions et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, eu égard à la durée du séjour en France de Mme X, où elle a reconstitué une famille, et alors même qu'elle aurait d'autres enfants d'une précédente union et des membres de sa famille, dont il n'est pas établit qu'ils résideraient tous en République démocratique du Congo et qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme X puisse reconstituer une vie familiale dans son pays d'origine, l'arrêté du PREFET DU RHONE du 19 avril 2006 ordonnant sa reconduite à la frontière a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et a ainsi méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;




Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU RHONE n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 19 avril 2006 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X et la décision du même jour fixant le pays de destination ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que Mme X qui a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle, n'allègue pas avoir exposé des frais autres que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été allouée ; que son avocat ne s'est pas prévalu des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; que, par suite, les conclusions de Mme X sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1 : Le recours du PREFET DU RHONE est rejeté.
Article 2 : Les conclusions présentées par Mme X au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 06LY00996


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 2ème chambre*
Numéro d'arrêt : 06LY00996
Date de la décision : 28/12/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Marc GRABARSKY
Rapporteur public ?: M. BESLE
Avocat(s) : DOMINIQUE SCHMITT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2006-12-28;06ly00996 ?
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