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09/11/2006 | FRANCE | N°06LY00902

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 2ème chambre, 09 novembre 2006, 06LY00902


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 3 mai 2006, présenté par le PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0602391 en date du 21 avril 2006, par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé, d'une part, son arrêté du 18 avril 2006 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Saïd X et, d'autre part, sa décision distincte du même jour fixant le pays dont l'intéressé a la nationalité comme destination de la reconduit

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2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal adm...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 3 mai 2006, présenté par le PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0602391 en date du 21 avril 2006, par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé, d'une part, son arrêté du 18 avril 2006 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Saïd X et, d'autre part, sa décision distincte du même jour fixant le pays dont l'intéressé a la nationalité comme destination de la reconduite ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Lyon ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 octobre 2006 :

- le rapport de M. du Besset, président ;

- les observations de M. Guinet, représentant le PREFET DU RHONE, et de Me Madignier, substituant Me Ouchia, représentant M. X ;

- et les conclusions de M. Puravet, commissaire du gouvernement ;


Considérant que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 18 avril 2006, par lequel le PREFET DU RHONE a décidé que M. X serait reconduit à la frontière, et la décision du même jour fixant le pays de destination ;

Considérant que le recours présenté par le PREFET DU RHONE, qui énonce de manière précise les moyens justifiant, selon lui, l'annulation du jugement attaqué, répond aux conditions posées par l'article R. 411-1 du code de justice administrative ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par M. X et tirée de ce que le recours serait entaché d'un défaut de motivation doit être écartée ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité marocaine, entré régulièrement en France en 1997, à l'âge de 22 ans, pour y poursuivre des études supérieures, est célibataire et sans enfant et a conservé des attaches familiales au Maroc où vivent ses deux soeurs ; qu'ainsi, alors même qu'il vit chez son père, présent depuis 1964 sur le territoire français et que sa mère et son frère, venus rejoindre son père dans le cadre d'une mesure de regroupement familial, résident également en France depuis 2004, et nonobstant son intégration à la société française et sa participation à l'entretien des membres de sa famille, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment des conditions de son séjour en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté en litige n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le PREFET DU RHONE est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon s'est fondé sur la méconnaissance de celles-ci pour annuler les décisions en en litige ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. X, tant devant le Tribunal administratif de Lyon que devant la Cour ;

Considérant que la circonstance, à la supposer avérée, que M. X aurait déposé une demande de régularisation administrative, ne faisait pas obligation à l'autorité préfectorale de surseoir à l'édiction d'un arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, dès lors que les conditions légales de l'éloignement se trouvaient réunies ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment des mentions de l'arrêté de reconduite à la frontière en litige, qui est régulièrement motivé, que le PREFET DU RHONE n'aurait pas procédé à un examen préalable de la situation personnelle et familiale de M. X ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : … 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ;

Considérant que pour les mêmes motifs que ceux énoncés plus haut, le PREFET DU RHONE ne peut être regardé comme ayant apprécié de manière manifestement erronée les conséquences qu'une mesure d'éloignement pouvait avoir sur la situation personnelle et familiale de M. X et, ainsi, n'a pas méconnu les dispositions précitées ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU RHONE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 18 avril 2006 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X ainsi que, par voie de conséquence, sa décision distincte du même jour fixant le pays dont l'intéressé a la nationalité comme destination de la reconduite ;


Sur les conclusions incidentes de M. X :

Considérant que le présent arrêt n'implique pas la délivrance d'un titre de séjour à M. X ; que, par suite, ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au PREFET DU RHONE de lui délivrer une carte de séjour temporaire doivent être rejetées ;


Sur les conclusions de M. X tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit au profit de M. X, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;




DECIDE :


Article 1er : Le jugement du 21 avril 2006 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Lyon et ses conclusions incidentes sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions présentées par M. X au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 06LY00902


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 06LY00902
Date de la décision : 09/11/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Emmanuel du BESSET
Rapporteur public ?: M. PURAVET
Avocat(s) : OUCHIA

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2006-11-09;06ly00902 ?
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