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09/11/2006 | FRANCE | N°06LY00865

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 2ème chambre, 09 novembre 2006, 06LY00865


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 27 avril 2006, présentée pour Mme Jana X, domiciliée ..., par Me Sabatier ;

Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601360 du 1er avril 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 mars 2006 du préfet de l'Isère ordonnant sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision pour excès de pouvoir ;

3°) d'e...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 27 avril 2006, présentée pour Mme Jana X, domiciliée ..., par Me Sabatier ;

Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601360 du 1er avril 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 mars 2006 du préfet de l'Isère ordonnant sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié, réglementant les conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;


Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 octobre 2006 :

- le rapport de M. du Besset, président ;

- les observations de Me Sabatier, avocat de Mme X ;
- et les conclusions de M. Puravet, commissaire du gouvernement ;


Considérant que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande de Mme X tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 mars 2006, par lequel le préfet de l'Isère a décidé qu'elle serait reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant le pays de destination ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :
Sur le moyen tiré de ce que l'arrêté en litige serait dépourvu de base légale :

Considérant que Mme X soutient que l'arrêté attaqué serait dépourvu de base légale en ce qu'il se fonde, à tort, sur les dispositions du 6° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et sur la décision de rejet de la commission des recours des réfugiés, alors que le préfet de l'Isère n'a ni retiré ni refusé le renouvellement du récépissé qui résulterait de l'attestation délivrée par le maire du Péage de Roussillon ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 3 du décret du 30 juin 1946, susvisé : « (…) le préfet peut prescrire que les demandes de cartes de séjour soient déposées… à la mairie de la résidence du requérant (…) » ; qu'aux termes de l'article 4 de ce même décret : « Il est remis à tout étranger admis à souscrire une demande de première délivrance ou de renouvellement de carte de séjour, un récépissé qui autorise la présence de l'intéressé sur le territoire pour la durée qu'il précise. Ce récépissé est revêtu de la signature de l'agent compétent ainsi que du timbre du service chargé, en vertu de l'article 5, de l'instruction de la demande » et qu'aux termes de l'article 5 dudit décret : « Le titre de séjour est délivré par le préfet du département dans lequel l'étranger a sa résidence (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'attestation, signée par le maire du Péage de Roussillon, remise à Mme X le 3 février 2006, suite au dépôt en mairie d'une demande de titre de séjour pour raison de santé, ne mentionne aucune durée de présence autorisée sur le territoire ; qu'elle précise seulement qu'une convocation sera adressée par la mairie à l'intéressée afin qu'elle reçoive son récépissé dès que celui-ci sera parvenu de la préfecture ; qu'ainsi, cette attestation, qui ne répond pas aux conditions prévues par les dispositions précitées du décret du 30 juin 1946, ne peut pas valoir récépissé de demande de carte de séjour autorisant provisoirement le séjour sur le territoire ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 6° Si le récépissé de la demande de carte de séjour ou l'autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l'étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé (…) » ; qu'aux termes de l'article L. 742-3 du même code : L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la commission des recours. Il dispose d'un délai d'un mois à compter de la notification du refus de renouvellement ou du retrait de son autorisation de séjour pour quitter volontairement le territoire français ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la demande d'asile de Mme X, de nationalité russe, entrée irrégulièrement sur le territoire français le 14 décembre 2004, a fait l'objet d'un rejet par décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides du 12 avril 2005, confirmée par la commission des recours des réfugiés le 15 décembre 2005 ; que, par décision du 13 janvier 2006, notifiée le 24 janvier 2006, le préfet de l'Isère lui a refusé le renouvellement de son récépissé constatant le dépôt d'une demande de statut de réfugié, valant autorisation de séjour, et l'a invitée à quitter le territoire français dans le délai d'un mois ; que Mme X s'est maintenue en France plus d'un mois après la notification de cette décision et se trouvait ainsi dans le cas où, en application des dispositions du 6° de l'article L. 511-1 du code, le préfet de l'Isère pouvait ordonner sa reconduite à la frontière ;

Sur les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : (…) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police... » ;
Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que par avis des 14 février et 6 avril 2006, le médecin inspecteur de la santé publique a indiqué au préfet que l'état de santé de la requérante avait nécessité une prise en charge médicale dont le défaut ne devait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'elle devait pouvoir bénéficier d'une surveillance adaptée dans son pays d'origine ; qu'ainsi le moyen tiré du défaut de consultation du médecin inspecteur de la santé publique manque en fait ;

Considérant, d'autre part, que si les documents médicaux produits par la requérante révèlent qu'elle a été hospitalisée durant plusieurs jours en mai et août 2005 et en mars 2006, que des interventions chirurgicales ont dû être pratiquées et que son état de santé nécessite un suivi médical régulier, ces certificats médicaux n'établissent ni que le défaut d'un tel suivi pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité ni qu'elle ne puisse pas bénéficier d'un traitement approprié en Russie ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 511-4 ° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Ne peuvent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (…) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. » ;

Considérant que, d'une part, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, Mme X, n'établit pas que son état de santé nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'elle ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que, d'autre part, la circonstance que Mme X a subi une nouvelle intervention chirurgicale le 22 mars 2006, postérieure à l'intervention de l'arrêté attaqué, est sans influence sur la légalité de cet arrêté et serait seulement susceptible, le cas échéant, de faire obstacle à l'exécution de la mesure d'éloignement ; que, par suite, le moyen susanalysé doit être écarté ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « (…) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 » ; qu'aux termes de l'article 3 de ladite convention : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants » ;

Considérant que Mme X soutient que la décision du préfet de l'Isère du 17 mars 2006 fixant la Russie comme pays de destination de la mesure d'éloignement, a été prise en violation des dispositions et stipulations précitées, alors que, ne pouvant bénéficier de soins appropriés en Russie, elle serait exposée à un risque de traitement inhumain et dégradant ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, elle ne démontre pas qu'elle ne pourrait pas bénéficier de soins appropriés dans son pays d'origine ; que, par suite, et en tout état de cause, le moyen susanalysé ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;


Sur les conclusions à fins d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de Mme X n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, dès lors les conclusions aux fins d'injonction présentées par Mme X doivent également être rejetées ;


Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser quelque somme que ce soit à Mme X au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.
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N° 06LY00865


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 06LY00865
Date de la décision : 09/11/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Emmanuel du BESSET
Rapporteur public ?: M. PURAVET
Avocat(s) : SABATIER LAURENT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2006-11-09;06ly00865 ?
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