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09/11/2006 | FRANCE | N°06LY00845

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 2ème chambre, 09 novembre 2006, 06LY00845


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Lyon le 25 avril 2006 présentée pour M. Saïd X, domicilié ..., par Me Ouchia ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601976 du 4 avril 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 mars 2006 du préfet de la Savoie ordonnant sa reconduite à la frontière et fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) d'annuler cet arrêté pour exc

ès de pouvoir ;

3°) subsidiairement, de surseoir à statuer sur sa requête jusqu...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Lyon le 25 avril 2006 présentée pour M. Saïd X, domicilié ..., par Me Ouchia ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601976 du 4 avril 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 mars 2006 du préfet de la Savoie ordonnant sa reconduite à la frontière et fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) subsidiairement, de surseoir à statuer sur sa requête jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se prononce sur la question de savoir s'il possède la nationalité française ;

4°) de condamner l'Etat à verser, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros à Me Ouchia, son avocat, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code civil ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 75-560 du 3 juillet 1975, relative à l'indépendance du territoire des Comores ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 octobre 2006 :

- le rapport de M. du Besset, président ;

- les observations de Me Madignier, substituant Me Ouchia, représentant M. X ;
- et les conclusions de M. Puravet, commissaire du gouvernement ;


Considérant que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de M. X tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 mars 2006, par lequel le préfet de la Savoie a décidé qu'il serait reconduit à la frontière, et de la décision du même jour fixant le pays de destination ;

Sur le moyen tiré par M. X de ce qu'il aurait la nationalité française :

Considérant qu'aux termes de l'article 9 de la loi du 3 juillet 1975 susvisée, relative à l'indépendance du territoire des Comores : Les Français de statut civil de droit commun domiciliés dans le territoire à la date de l'indépendance conserveront la nationalité française quelle que soit leur situation au regard de la loi comorienne » ; qu'aux termes de l'article 10 de la même loi : « Les dispositions de l'article 152 du code de la nationalité française ne seront pas applicables aux français de statut civil de droit local originaires des Comores. / Dans les deux ans de l'indépendance, ces personnes pourront, lorsqu'elles auront leur domicile en France, se faire reconnaître la nationalité française par déclaration souscrite dans les formes des articles 101 et suivants du Code de la nationalité./ Ce droit est également ouvert, dans les mêmes conditions de délai et de forme, aux personnes de statut civil de droit local originaires du territoire des Comores domiciliées à l'étranger à la date de l'indépendance et immatriculées dans un consulat français … ;

Considérant que l'exception de nationalité française ne constitue, en vertu de l'article 29 du code civil, une question préjudicielle que si elle présente une difficulté sérieuse ;

Considérant que M. X est né le 7 février 1965 à Diégo-Suarez (Madagascar) de parents nés aux Comores (Grande Comore) vers 1928 et 1936 ; qu'il est entré en France en septembre 2004 avec un passeport comorien et une fausse carte d'identité française ; que la circonstance qu'il a entrepris des démarches en vue de se faire délivrer des actes d'état civil, un passeport et, le 6 avril 2006, un certificat de nationalité française n'est pas de nature, à elle seule, à démontrer que la question de savoir s'il est Français par filiation présente une difficulté sérieuse ;

Considérant que M. X, qui n'allègue pas que ses parents auraient eu le statut civil de droit commun, ne produit aucune pièce relative à la souscription, en temps voulu, de la déclaration en vue de la reconnaissance de la nationalité française prévue par les dispositions précitées de l'article 10 de la loi du 3 juillet 1975 ;

Considérant que si M. X produit des documents administratifs mentionnant que lui-même, ses parents, ainsi que ses frères et soeurs sont Français, ces documents ont été délivrés avant l'indépendance des Comores en juillet 1975 ; que la copie du passeport français de son père, portant le n° 75-0144, ne fait pas apparaître la date de délivrance de ce passeport ; qu'il ne saurait invoquer utilement la circonstance que le service central d'état civil du ministère des affaires étrangères a délivré des copies certifiées conformes, d'une part en 2006, de son acte de naissance, d'autre part en 2002 et 2006, de l'acte de mariage de ses parents, alors que ce service détient notamment les actes d'état-civil enregistrés dans un consulat français de personnes qui avaient la nationalité française avant l'indépendance de leur pays ;

Considérant que ni la copie de l'acte de naissance de la soeur de M. X, née en 1970 à Diego-Suarez, délivrée en juin 2005 par le service central de l'état-civil à Nantes, ni la copie de son passeport français, ne permettent d'établir que celle-ci aurait acquis la nationalité française par filiation et qu'ainsi les parents de M. X seraient Français ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X ne peut ni sérieusement prétendre qu'il est de nationalité française ni soutenir que le jugement attaqué est entaché d'incompétence pour avoir tranché une question préjudicielle ;

Sur les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) » ;

Considérant que M. X, qui a déclaré être entré en France en septembre 2004 sous couvert d'un visa touristique ne le justifie pas et n'est pas titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; qu'il se trouve ainsi dans le cas où, en application des dispositions du 1° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance, 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ;

Considérant que M. X a déclaré être célibataire et être entré une première fois en France en 2002 en provenance des Comores, puis, après un retour aux Comores, être revenu en septembre 2004 ; que, s'il soutient être venu en France notamment pour rejoindre un frère et une soeur, de nationalité française, avec lesquels il entretiendrait des relations, il n'est pas dépourvu d'attaches familiales aux Comores où, selon ses déclarations, vivent son fils âgé de sept ans et ses parents ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour de M. X en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ;

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi et qui décidera (…) des contestations sur des droits et obligations de caractère civil (…) » ;

Considérant qu'à l'appui de ses conclusions devant la Cour, M. X ne saurait faire valoir utilement que les stipulations précitées pourraient être méconnues dans le cadre de la procédure diligentée à son encontre pour usage d'une fausse carte d'identité française ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
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N° 06LY00845


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 06LY00845
Date de la décision : 09/11/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Emmanuel du BESSET
Rapporteur public ?: M. PURAVET
Avocat(s) : OUCHIA

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2006-11-09;06ly00845 ?
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