Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 7 mars 2006, présentée pour M. Lofti X, domicilié ..., par Me Blanc, avocat au barreau d'Annecy ;
M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0600747 du 27 février 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 février 2006 du préfet de la Haute-Savoie ordonnant sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant la Tunisie comme pays de destination ;
2°) d'annuler cet arrêté et cette décision pour excès de pouvoir ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 modifié ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié, réglementant les conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 juillet 2006 :
- le rapport de M. Chabanol, président de la Cour ;
- et les conclusions de Mme Verley-Cheynel, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré (...). » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité tunisienne, qui déclare être entré en France en 1998 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa touristique, s'est maintenu sur le territoire français sans être titulaire d'un premier titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application des dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance, 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » et qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : (…) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (…) »;
Considérant que M. X fait valoir, qu'en 1998, il est venu rejoindre son père titulaire d'une carte de résident et résidant depuis 1978 en France, où vivent également deux de ses frères, qu'il vit, depuis un an, en concubinage avec une ressortissante française, enceinte de lui de cinq mois et que, le 16 février 2006, il a reconnu l'enfant dont la naissance est prévue au début de l'été 2006 ; que, toutefois, à la date de l'arrêté de reconduite à la frontière M. X n'était pas père d'un enfant français ; que cet arrêté n'implique pas que sa compagne quitte la France ; qu'il n'est pas établi que l'intérêt supérieur de l'enfant à naître soit que son père soit présent lors de sa naissance ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, qui serait entré en France à l'âge de 23 ans, n'est pas isolé dans son pays d'origine où il a déclaré que vivent sa mère, ses quatre frères et ses deux soeurs ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment du caractère récent du concubinage invoqué et des conditions et de la durée de son séjour en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du préfet de la Haute-Savoie du 23 février 2006, n'a pas porté au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que cet arrêté n'a, par suite, méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui, contrairement à ce qu'a décidé le premier juge, sont opposables à un arrêté de reconduite à la frontière, alors même que l'intéressé n'a pas formé de demande de titre de séjour ;
Considérant enfin que le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de la décision fixant le pays de destination de la reconduite ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 février 2006 du préfet de la Haute-Savoie ordonnant sa reconduite à la frontière et la décision du même jour fixant la Tunisie comme pays de destination de la reconduite ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
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N° 06LY00495