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23/03/2006 | FRANCE | N°01LY00984

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ere chambre - formation a 3, 23 mars 2006, 01LY00984


Vu la requête et le mémoire complémentaire enregistrés respectivement les 18 mai 2001 et 4 mars 2002, présentés pour l'UNION DE COOPERATIVES « LES LAITERIES BRESSANES », dont le siège est à Varennes-Saint-Sauveur (71480), venant aux droits de l'Union de coopératives « Les Laiteries du Revermont », par Me Chaton, avocat ;

L'UNION DE COOPERATIVES « LES LAITERIES BRESSANES » demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 986738 du 27 février 2001 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté la demande de l'Union de coopératives « Les Laiteries du

Revermont » tendant à l'annulation d'un état exécutoire émis à son encontre le 29...

Vu la requête et le mémoire complémentaire enregistrés respectivement les 18 mai 2001 et 4 mars 2002, présentés pour l'UNION DE COOPERATIVES « LES LAITERIES BRESSANES », dont le siège est à Varennes-Saint-Sauveur (71480), venant aux droits de l'Union de coopératives « Les Laiteries du Revermont », par Me Chaton, avocat ;

L'UNION DE COOPERATIVES « LES LAITERIES BRESSANES » demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 986738 du 27 février 2001 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté la demande de l'Union de coopératives « Les Laiteries du Revermont » tendant à l'annulation d'un état exécutoire émis à son encontre le 29 juillet 1998 par le directeur de l'Office national interprofessionnel du lait et des produits laitiers (Onilait) et mettant à sa charge une somme de 4 331 059,70 francs au titre du prélèvement supplémentaire institué dans le secteur du lait et des produits laitiers ;

2°) d'annuler ledit état exécutoire ;

3°) de condamner l'Onilait à lui verser une somme de 70 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le règlement (CEE) n° 3950/92 du Conseil du 28 décembre 1992 ;

Vu le règlement (CEE) n° 536/93 de la commission du 9 mars 1993 ;

Vu la loi n° 79 ;587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le décret n° 62 ;1587 du 29 décembre 1962 ;

Vu le décret n° 91 ;157 du 11 février 1991 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 mars 2006 :

- le rapport de M. Boucher, premier conseiller ;

- les observations de Me Chaton, avocat de l'UNION DE COOPERATIVES « LES LAITERIES BRESSANES » ;

- et les conclusions de M. Besson, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le directeur de l'Onilait, par un avis d'appel de versement en date du 7 mai 1996 établi au nom du « Groupement Jura Gestion Lait » puis par un état exécutoire en date du 29 juillet 1998 établi à l'encontre de l'Union de coopératives « Les Laiteries du Revermont », a mis en recouvrement, au titre d'un prélèvement supplémentaire dû sur des achats de lait pour la période 1993/1994, une somme totale de 4 331 059,70 francs (660 265,79 euros), correspondant à des collectes de lait effectuées par « Les Laiteries du Revermont », payées aux producteurs au moyen de factures de vente de produits finis et ainsi dissimulées, d'une part, au « Groupement Jura Gestion Quotas Lait » dont l'Union coopérative « Les Laiteries du Revermont » était membre et qui effectuait pour celle-ci les opérations administratives et comptables se rapportant à la gestion du prélèvement supplémentaire dû sur ses achats de lait et de produits laitiers, d'autre part, à l'Onilait ; que, par le jugement attaqué du 27 février 2001, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté l'opposition formée par l'Union de coopératives « Les Laiteries du Revermont » contre l'état exécutoire susmentionné ; que l'UNION DE COOPERATIVES « LES LAITERIES BRESSANES », venant aux droits et obligations de l'Union de coopératives « Les Laiteries du Revermont », fait régulièrement appel de ce jugement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 11 février 1991 susvisé relatif à la maîtrise de la production de lait de vache et aux modalités de recouvrement d'un prélèvement supplémentaire à la charge des acheteurs et des producteurs de lait de vache : « L'office national interprofessionnel du lait et des produits laitiers, ci-après dénommé Onilait, est chargé en ce qui concerne le lait de vache : (…) 4° De procéder au recouvrement du prélèvement supplémentaire (…) » ; qu'aux termes de l'article 2 du même texte : « Le prélèvement supplémentaire ... est dû par tout acheteur de lait ... sur la quantité de lait ... qui lui a été livrée en dépassement de la quantité de référence attribuée par l'Onilait ... l'acheteur redevable du prélèvement supplémentaire répercute ce dernier sur les seuls producteurs qui ont dépassé leur quantité de référence » ; que selon l'article 4 du décret : « L'acheteur fait parvenir à l'Onilait, dans les trente jours suivant la fin de chaque trimestre de la campagne, une déclaration indiquant pour l'ensemble des producteurs les quantités de lait collectées pendant le trimestre » ; qu'aux termes de l'article 7 : « A la fin de la campagne l'Onilait fait connaître à chaque acheteur de lait le montant du prélèvement éventuellement dû » ; qu'aux termes de l'article 18 : « Le recouvrement est poursuivi, le cas échéant selon les dispositions des articles 200, 201, alinéa 2, 202 et 203 du décret du 29 décembre 1962 / Si l'Onilait ne dispose pas d'éléments nécessaires au recouvrement du prélèvement, les agents habilités en application de l'article 19 peuvent procéder auprès des redevables à toutes les vérifications de nature à justifier l'assiette du prélèvement à recouvrer » ; qu'aux termes de l'article 19 : « Sont habilités à exercer le contrôle des obligations du présent décret les agents habilités en application de l'article 108 ... de la loi de finances du 30 avril 1981, et tous les agents désignés par le ministre chargé de l'agriculture et assermentés à cet effet » ;

Considérant qu'en application des dispositions précitées, l'Onilait a fait procéder du 5 au 7 octobre 1994 à une vérification par les agents de l'Agence centrale des organismes d'intervention dans le secteur agricole (ACOFA) du respect des quantités achetées et des déclarations souscrites par l'Union de coopératives « Les Laiteries du Revermont » ; qu'au vu des résultats de ce contrôle, l'Office a, par lettre du 16 janvier 1995, fait connaître à ladite Union de coopératives la teneur des constatations des vérificateurs concernant les volumes redressés au titre des campagnes 1991/1992, 1992/1993 et 1993/1994 en lui demandant de communiquer dans les quinze jours ses observations contradictoires ; que, s'agissant des constatations intéressant la campagne 1993/1994, l'Office a ensuite fait connaître au « Groupement Jura Gestion Quotas Lait », par lettre recommandée du 1er décembre 1995, qu'une partie de la collecte de lait de l'Union de coopératives « Les Laiteries du Revermont », membre du Groupement, ne figurait pas sur les déclarations trimestrielles souscrites par le Groupement pour le compte de ladite Union au titre de la campagne dont s'agit, en précisant que l'assiette du prélèvement supplémentaire serait régularisée sur la base des résultats du contrôle et en invitant le Groupement à communiquer d'éventuelles remarques sur ces constatations dans un délai de quinze jours ; qu'une copie de ce courrier du 1er décembre 1995 a été adressée le même jour par lettre recommandée aux « Laiteries du Revermont » avec invitation à communiquer d'éventuelles remarques dans les quinze jours ; que par lettre recommandée du 23 avril 1996, l'Office a, en l'absence d'information complémentaire, notifié au « Groupement Jura Gestion Quotas Lait » une régularisation de ses déclarations au titre de la collecte pour la campagne 1993/1994 résultant de la prise en compte des quantités dissimulées par l'Union de coopératives « Les Laiteries du Revermont », à laquelle une copie de ce courrier a été adressée le même jour par lettre recommandée ; qu'un avis d'appel de versement du prélèvement supplémentaire a ensuite été établi le 7 mai 1996 au nom du « Groupement Jura Gestion Quotas Lait » pour un montant de 4 331 059,70 francs (660 265,79 euros) ; que faute de règlement par le Groupement, le directeur de l'Onilait a, par lettre recommandée du 17 juillet 1998, adressé copie de cet avis d'appel de versement aux « Laiteries du Revermont » en l'informant de l'envoi d'un état exécutoire ; que l'état exécutoire en litige, en date du 29 juillet 1998, met à la charge des « Laiteries du Revermont » le paiement de la somme susmentionnée de 4 331 059,70 francs (660 265,79 euros) ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, conformément au principe général des droits de la défense, l'Union de coopératives « Les Laiteries du Revermont », qui a notamment reçu communication des conclusions résultant du contrôle sur place effectué par des agents de l'Agence centrale des organismes d'intervention dans le secteur agricole et qui a été invitée à plusieurs reprises à faire connaître d'éventuelles observations, a été, contrairement à ce que soutient la requérante, mise à même de contester les éléments du redressement opéré par l'Onilait au vu des résultats du contrôle ;

Considérant, en deuxième lieu, que si aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public : « Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cette fin, doivent être motivées les décisions qui : ( …) - infligent une sanction », le prélèvement en litige dû, en application de l'article 2 du décret susvisé du 11 février 1991, par les acheteurs de lait dans le cas d'un dépassement des quantités de référence qui leur ont été imparties afin d'inciter les producteurs à respecter les objectifs de régulation du marché, constitue une simple mesure d'application de ce dispositif de régulation et n'a pas le caractère d'une sanction prise dans le cadre d'un pouvoir de police économique ; que la circonstance que ce prélèvement est opéré sur la base d'un contrôle effectué par des agents habilités n'est pas non plus de nature à lui donner le caractère d'une sanction ; que, dès lors, l'établissement de ce prélèvement, qui ne revêt pas le caractère d'une sanction, n'est pas au nombre des décisions qui doivent être motivées en application des dispositions précitées de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ;

Considérant, en troisième lieu, qu'un état exécutoire doit indiquer les bases de la liquidation de la dette, alors même qu'il est émis par une personne publique autre que l'Etat pour lequel cette obligation est expressément prévue par l'article 81 du décret du 29 décembre 1962 ; qu'en application de ce principe, l'Onilait ne peut mettre en recouvrement un prélèvement supplémentaire sans indiquer, soit dans le titre lui-même, soit par référence à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur, les bases et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde pour mettre les sommes en cause à la charge des redevables ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier que l'Office a satisfait à cette obligation en faisant notamment référence, dans le titre exécutoire contesté, à la lettre susmentionnée du 1er décembre 1995 communiquant aux « Laiteries du Revermont » les conclusions du contrôle et à celle du 17 juillet 1998, à laquelle l'avis d'appel de versement comportant les éléments de calcul détaillés du prélèvement était joint ; que, par suite, le moyen tiré du défaut d'indication des bases de la liquidation doit être écarté ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 9 du règlement (CEE) n° 3950/92 du Conseil du 28 décembre 1992 établissant un prélèvement supplémentaire dans le secteur du lait et des produits laitiers : « aux fins du présent règlement, on entend par : / (…) e) « acheteur » : une entreprise ou un groupement qui achète du lait ou d'autres produits laitiers auprès du producteur : / - pour les traiter ou les transformer / - pour les céder à une ou plusieurs entreprises traitant ou transformant du lait ou d'autres produits laitiers. / Toutefois, est considéré comme acheteur un groupement d'acheteurs, situés dans une même zone géographique, qui effectue pour le compte de ses adhérents les opérations de gestion administrative et comptable nécessaires au versement du prélèvement (…) » ; que l'article 7 du règlement (CEE) n° 536/93 de la commission du 9 mars 1993 fixant les modalités d'application du prélèvement supplémentaire dans le secteur du lait et des produits laitiers institue une procédure d'agrément des acheteurs ; qu'il résulte des dispositions précitées que lorsque, comme en l'espèce, une entreprise qui achète du lait aux producteurs en vue de le traiter ou de le transformer adhère à un groupement qui effectue pour son compte les opérations de gestion administrative et comptable nécessaires au versement du prélèvement, cette entreprise et ce groupement sont tous les deux des acheteurs au sens de ces dispositions ; que la circonstance que, dans ce cas, seul le groupement soit agréé, ne fait pas, par elle-même, obstacle à ce que le paiement d'un prélèvement imputable à un adhérent déterminé du groupement ayant fait l'objet d'un contrôle, soit réclamé directement à cet adhérent qui, comme on l'a dit, a la qualité d'acheteur, à supposer même qu'il ne puisse être regardé comme un acheteur agréé à travers l'agrément dont bénéficie le groupement ; que le moyen tiré de ce que le « Groupement Jura Gestion Quotas Lait » était, en sa qualité de bénéficiaire de l'agrément, le seul redevable du prélèvement en litige, doit, par suite, être écarté ;

Considérant, en cinquième et dernier lieu, que le moyen tiré de ce que l'Onilait n'aurait pas démontré la réalité du dépassement des quantités de référence dont bénéficiaient les producteurs auprès desquels ont été collectés les volumes de lait ayant donné lieu à la rectification des bases déclarées, n'est pas, compte tenu notamment des constatations circonstanciées opérées par les agents ayant procédé au contrôle sur place, assorti de précisions suffisantes pour permettre à la Cour d'en apprécier le bien-fondé

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'UNION DE COOPERATIVES « LES LAITERIES BRESSANES » n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté l'opposition formée par l'Union de coopératives « Les Laiteries du Revermont » contre l'état exécutoire du 29 juillet 1998 ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

Considérant que l'Onilait n'est pas, dans la présente instance, une partie perdante et que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font dès lors obstacle à ce qu'une somme quelconque soit mise à sa charge au titre des frais exposés par l'UNION DE COOPERATIVES « LES LAITERIES BRESSANES » et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de l'UNION DE COOPERATIVES « LES LAITERIES BRESSANES » une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par l'Onilait et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'UNION DE COOPERATIVES « LES LAITERIES BRESSANES » est rejetée.

Article 2 : L'UNION DE COOPERATIVES « LES LAITERIES BRESSANES » versera une somme de 1 000 euros à l'Onilait en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 01LY00984


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 01LY00984
Date de la décision : 23/03/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. VIALATTE
Rapporteur ?: M. Yves BOUCHER
Rapporteur public ?: M. BESSON
Avocat(s) : CHATON

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2006-03-23;01ly00984 ?
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