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02/03/2006 | FRANCE | N°05LY01791

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 2ème chambre, 02 mars 2006, 05LY01791


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 18 novembre 2005, présenté pour le PREFET DE LA SAVOIE ;

Le PREFET DE LA SAVOIE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0507023 en date du 20 octobre 2005 en tant que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé la décision distincte contenue dans son arrêté du 15 octobre 2005 qui fixe l'Albanie comme pays à destination duquel M. Bléart X sera reconduit ;

2°) de rejeter les conclusions de la demande de M. X

devant le Tribunal administratif de Lyon dirigées contre la décision fixant le pay...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 18 novembre 2005, présenté pour le PREFET DE LA SAVOIE ;

Le PREFET DE LA SAVOIE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0507023 en date du 20 octobre 2005 en tant que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé la décision distincte contenue dans son arrêté du 15 octobre 2005 qui fixe l'Albanie comme pays à destination duquel M. Bléart X sera reconduit ;

2°) de rejeter les conclusions de la demande de M. X devant le Tribunal administratif de Lyon dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 février 2006 :

- le rapport de M. du Besset, président ;

- et les conclusions de Mme Verley-Cheynel, commissaire du gouvernement ;

Sur le recours du PREFET DE LA SAVOIE :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants » ; que l'arrêté de reconduite à la frontière pris à l'encontre de M. X fixe l'Albanie comme pays à destination duquel l'intéressé sera reconduit ; que si M. X soutient qu'il est, ainsi que les membres de sa famille, soumis à la vengeance déclarée d'une autre famille, en application du code coutumier « le Kanun », qui prévoit que la famille d'une victime doit venger son sang jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de garçon vivant dans l'autre tribu, l'intéressé, dont l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a relevé, lors du rejet de sa demande d'asile politique, les propos confus et peu sérieux et dont la demande d'asile territorial a été rejetée le 10 mars 2004, n'apporte pas d'éléments suffisamment probants et précis de nature à établir la réalité des risques allégués ; que, par suite, le PREFET DE LA SAVOIE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 15 octobre 2005 en tant qu'il fixe l'Albanie comme pays de destination de la reconduite en retenant le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X tant devant le Tribunal administratif que devant la Cour ;

Considérant, en premier lieu, que Mme Sylvaine Astic, sous-préfet de Saint-Jean-de- Maurienne, disposait d'une délégation régulièrement publiée du PREFET DE LA SAVOIE aux fins de signer, à l'occasion des permanences départementales, les arrêtés de reconduite à la frontière ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination aurait été signée par une autorité incompétente doit être écarté ;

Considérant, en second lieu, que le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur d'appréciation en prenant la décision litigieuse n'est assorti d'aucune précision permettant à la Cour d'en apprécier le bien-fondé ; que, par suite, le moyen ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA SAVOIE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 15 octobre 2005 en tant qu'il fixe l'Albanie comme pays de destination de la reconduite à la frontière de M. X ;




Sur le recours incident de M. X :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité albanaise, ne justifiait à la date de son interpellation, le 15 octobre 2005, ni d'une entrée régulière sur le territoire français, ni d'un titre de séjour en cours de validité ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application des dispositions précitées, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien ;être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (…) » ;

Considérant que si M. X fait valoir qu'il vit en concubinage avec une ressortissante française depuis trois ans, il ne l'établit pas alors notamment qu'en première instance il faisait état d'une vie maritale commencée le 21 juin 2005 ; qu'ainsi, et en tout état de cause, alors que M. X est entré en France en décembre 2001 et n'a versé au dossier aucun élément de nature à établir qu'il n'aurait plus d'attaches familiales en Albanie, l'arrêté préfectoral de reconduite à la frontière pris à son encontre ne peut être regardé comme ayant porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, dès lors, être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le recours incident de M. X doit être rejeté ;


DECIDE :


Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon en date du 20 octobre 2005 est annulé en tant qu'il a annulé la décision distincte contenue dans l'arrêté du 15 octobre 2005 fixant l'Albanie comme pays à destination duquel M. X sera reconduit.
Article 2 : Les conclusions de M. X présentées devant le Tribunal administratif de Lyon tendant à l'annulation de la décision du 15 octobre 2005 fixant l'Albanie comme pays de destination de la reconduite et ses conclusions incidentes tendant à l'annulation de la mesure de reconduite à la frontière sont rejetées.
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N° 05LY01791


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 05LY01791
Date de la décision : 02/03/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Emmanuel du BESSET
Rapporteur public ?: Mme VERLEY-CHEYNEL
Avocat(s) : LAURENT PASCAL

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2006-03-02;05ly01791 ?
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