Vu la requête, enregistrée le 21 août 2003, présentée pour la SA AUTO DAUPHINE, dont le siège est situé ..., représentée par son président-directeur-général en exercice, par Me X..., avocat ;
La SA AUTO DAUPHINE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 9902144 du 12 juin 2003 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été assigné au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 1993, ainsi que des pénalités y afférentes, à la réduction du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été assigné pour la période du 1er janvier au 31 décembre 1995, ainsi que des pénalités y afférentes et à la restitution d'une somme de 371 079 francs acquittée au titre de la taxe sur la valeur ajoutée de cette dernière période ;
2°) de prononcer la décharge, la réduction et la restitution demandées ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 décembre 2005 :
- le rapport de Mlle Vinet, conseiller ;
- les observations de Me X..., pour la SA AUTO DAUPHINE ;
- et les conclusions de M. Pourny, commissaire du gouvernement ;
Sur le complément de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier au 31 décembre 1993 :
Considérant que la SA AUTO DAUPHINE, qui ne conteste pas le bien-fondé du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été notifié à raison d'opérations de l'exercice 1993, fait valoir, en invoquant les pouvoirs de vérification et de rectification que donnent au service des impôts les articles L. 10 et L. 13 du livre des procédures fiscales, que l'administration aurait dû imputer ce rehaussement sur le crédit de taxe d'amont d'un montant de 575 020 francs qu'elle avait déclaré au 31 décembre 1993, crédit dont il est constant qu'il a, entre-temps, été imputé sur la taxe due par l'entreprise au titre des mois de janvier et février 1994 ;
Considérant qu'aux termes de l'article 224 de l'annexe II au code général des impôts : « 1. Les entreprises doivent mentionner le montant de la taxe dont la déduction leur est ouverte sur les déclarations qu'elles déposent pour le paiement de la taxe sur la valeur ajoutée. (…) 2. Lorsque le montant de la taxe déductible ainsi mentionné sur une déclaration excède le montant de la taxe due d'après les éléments qui figurent sur cette déclaration, l'excédent de taxe dont l'imputation ne peut être faite est reporté, jusqu'à épuisement, sur la ou les déclarations suivantes. Toutefois, cet excédent peut faire l'objet de remboursements dans les conditions fixées par les articles 242-0 A à 242-0 K et par l'article 271-4 du code général des impôts. 3. Les régularisations de déductions auxquelles les assujettis procèdent doivent également être mentionnées distinctement sur ces déclarations. » ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions du livre des procédures fiscales relatives au pouvoir de rehaussement du service des impôts et en particulier de ses articles L. 10 et L. 13, ainsi que des dispositions précitées de l'article 224 de l'annexe II au code général des impôts, pris sur le fondement de l'article 271 de ce code, que lorsqu'une entreprise a disposé, à l'intérieur de la période vérifiée, d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée dû à des opérations comprises dans cette période, crédit qu'elle a imputé sur la taxe due à raison d'opérations postérieures, mais encore comprises dans la période vérifiée, et qu'elle a fait l'objet d'un rehaussement, le service des impôts est en droit de remettre en cause le crédit déclaré et, éventuellement, si à un moment donné de cette période, la situation nette de l'entreprise au regard de la taxe sur la valeur ajoutée devient débitrice, d'établir un rappel de taxe ; que, toutefois, il ne le peut qu'en tenant compte de la situation nette de l'entreprise au regard de la taxe sur la valeur ajoutée tout au long de ladite période ; que ce n'est qu'au titre des mois ou trimestres où le crédit de taxe, recalculé en fonction des redressements opérés, est épuisé que peut être mise en recouvrement la taxe issue du rehaussement ; qu'il appartient cependant au juge de l'impôt, juge de plein contentieux, d'assurer le correct rattachement des rappels établis ou à établir au titre des mois ou trimestres compris dans la période en litige ; que, dans les circonstances susrelatées de l'espèce, le rehaussement en cause n'a pu donner lieu à un rappel de taxe effectif qu'au titre des mois de janvier et, éventuellement, février 1994 ; que la société est donc seulement fondée, dans cette mesure, à demander la décharge des pénalités de retard mises à sa charge ;
Sur le complément de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier au 31 décembre 1995 :
Considérant qu'aux termes de l'article 297 A du code général des impôts, issu de la loi n° 94-1163 du 29 décembre 1994 et entré en vigueur le 1er janvier 1995 : « I. 1° La base d'imposition des livraisons par un assujetti revendeur de biens d'occasion, d'oeuvres d'art, d'objets de collection ou d'antiquité qui lui ont été livrés par un non redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ou par une personne qui n'est pas autorisée à facturer la taxe sur la valeur ajoutée au titre de cette livraison est constituée de la différence entre le prix de vente et le prix d'achat. (…) II. La base d'imposition définie au I peut être déterminée globalement, pour chacune des périodes couvertes par les déclarations mentionnées à l'article 287, par la différence entre le montant total des livraisons et le montant total des achats de biens d'occasion, d'oeuvres d'art, d'objets de collection ou d'antiquité effectués au cours de chacune des périodes considérées. Si au cours d'une période le montant des achats excède celui des livraisons, l'excédent est ajouté aux achats de la période suivante. Les assujettis revendeurs qui se placent sous ce régime procèdent à une régularisation annuelle en ajoutant la différence entre le stock au 31 décembre et le stock au 1er janvier de la même année aux achats de la première période suivante, telle que définie à l'alinéa précédent, si cette différence est négative, ou en la retranchant si elle est positive. Cette modalité de calcul de la base d'imposition ne fait naître, au profit des assujettis revendeurs, aucun droit à restitution de la taxe sur la valeur ajoutée au titre de ces opérations (…) » ;
Considérant que la société AUTO DAUPHINE a notamment pour activité le négoce de véhicules d'occasion ; qu'antérieurement à l'entrée en vigueur de l'article 297 A du code général des impôts, elle avait appliqué, à raison de ses opérations imposées à la taxe sur la valeur ajoutée selon le régime d'imposition sur la marge, le régime de détermination globale de la marge, sur le fondement de la doctrine administrative alors en vigueur ; que le litige porte sur le montant de la régularisation annuelle à opérer en 1995 à raison de la diminution de la valeur des stocks constatée au cours de l'année 1994 ; que la société requérante soutient que la diminution de stocks entre le 1er janvier et le 31 décembre 1994, à ajouter aux achats de l'année 1995 pour venir en atténuation de la marge imposable de l'année 1995, s'établit à 5 448 654 francs, compte tenu des véhicules en stocks au 1er janvier 1994, d'une valeur totale non contestée de 8 556 866 francs, et de ceux des véhicules en stocks au 31 décembre 1994 qui avaient été acquis sans taxe sur la valeur ajoutée, d'une valeur totale de 3 108 212 francs ; que l'administration soutient quant à elle que la diminution de stocks entre le 1er janvier et le 31 décembre 1994 s'établit à 1 664 451 francs, compte tenu des véhicules en stocks au 1er janvier 1994 et de ceux des véhicules en stocks au 31 décembre 1994 qui avaient été acquis sans taxe sur la valeur ajoutée ou avec taxe sur la valeur ajoutée mais sans que la déduction en ait été opérée, d'une valeur totale de 6 892 415 francs ;
Considérant qu'avant l'entrée en vigueur le 1er janvier 1995, de l'article 297 A du code général des impôts, aucune disposition législative ou réglementaire ne prévoyait, pour les ventes de biens d'occasion, la possibilité de déterminer globalement la marge et de prendre en compte la variation des stocks pour la détermination du montant de marge taxable ; que cette possibilité n'était prévue que par une instruction administrative ; que l'administration ne saurait, à l'encontre des redevables s'étant placés sous ce régime avant le 1er janvier 1995, les obliger à tenir compte des conséquences de ce régime dérogatoire lorsqu'ils entendent, pour la période postérieure, appliquer purement et simplement les dispositions légales applicables à compter de cette date ; que la société soutient sans être contredite qu'elle a appliqué le système de la taxe sur la valeur ajoutée sur le prix de vente total pour tous les véhicules qui lui avaient été facturés avec de la taxe sur la valeur ajoutée, qu'ils aient ou non déduit cette taxe avant le 1er janvier 1995 ; que, ce faisant, la société a appliqué le système légal, qui ne comporte aucune distinction, s'agissant des véhicules acquis avec de la taxe sur la valeur ajoutée, entre ceux pour lesquels la taxe a été déduite avant le 1er janvier 1995, et ceux pour lesquels cette déduction n'est pas encore intervenue à cette date ; que, dès lors, l'administration ne peut lui opposer les termes de l'instruction 3 K-1-95 du 17 février 1995, qui impose cette distinction et prescrit de compter les véhicules acquis avec la taxe, mais pour lesquels la déduction de taxe n'était pas encore intervenue au 1er janvier 1995 dans la différence de stocks soumise à la taxe sur la marge ; que la société requérante est donc fondée à contester le rappel de taxe d'un montant de 221 440 francs établi par le service des impôts au titre de 1995 à raison de la marge sur les ventes de véhicules d'occasion ;
Considérant en revanche que les dispositions précitées de l'article 297 A du code général des impôts font expréssément obstacle à ce que la requérante obtienne la restitution de la somme de 371 079 francs acquittée au titre de la taxe sur la valeur ajoutée de la même période ; que, la société n'ayant pas appliqué l'instruction 3 K-1-95 du 17 février 1995 qui, contrairement à ce qu'elle soutient, prescrit bien les modalités de calcul de stocks susdécrites, elle n'est pas fondée à s'en prévaloir pour demander la restitution de cette somme ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA AUTO DAUPHINE est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble n'a pas fait droit à sa demande dans les limites susdéfinies ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés dans l'instance par la SA AUTO DAUPHINE et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le rappel de droits simples de 270 068 francs (41 171,60 euros), établi à raison des activités de l'année 1993 de la SA AUTO DAUPHINE s'imputera sur le crédit de taxe sur la valeur ajoutée de 575 020 francs déclaré par la société au titre du dernier trimestre de 1993 et devra être mis à la charge de la société au titre des mois de janvier et, éventuellement, février 1994, les intérêts de retard dus étant recalculés en conséquence.
Article 2 : La SA AUTO DAUPHINE est déchargée, pour la fraction excédant le montant calculé comme indiqué à l'article 1er, des intérêts de retard mis à sa charge à raison du rappel de taxe de 270 068 francs (41 171,60 euros).
Article 3 : La SA AUTO DAUPHINE est déchargée à hauteur de 221 440 francs (33 758,31 euros) du complément de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de l'année 1995.
Article 4 : Le jugement n° 9902144 du 12 juin 2003 du Tribunal administratif de Grenoble est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à la SA AUTO DAUPHINE.
Article 6 : le surplus des conclusions de la requête de la SA AUTO DAUPHINE est rejeté.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la SA AUTO DAUPHINE et au ministre de l'économie,
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N° 03LY01505
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