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24/03/1999 | FRANCE | N°98LY01310

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2e chambre, 24 mars 1999, 98LY01310


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 17 juillet 1998, présentée pour la société anonyme ROADIS, ayant son siège rue du Fuyant (42153) Riorges par Me X..., cabinet juridique Saône Rhône, avocat au barreau de Lyon ;
la S.A. ROADIS demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 2 juin 1998 du tribunal administratif de Lyon en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge du principal des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée laissées à sa charge au titre des années 1986 et 1987 ;
2°)

de prononcer la décharge des impositions et, à titre subsidiaire, d'ordonner un...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 17 juillet 1998, présentée pour la société anonyme ROADIS, ayant son siège rue du Fuyant (42153) Riorges par Me X..., cabinet juridique Saône Rhône, avocat au barreau de Lyon ;
la S.A. ROADIS demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 2 juin 1998 du tribunal administratif de Lyon en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge du principal des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée laissées à sa charge au titre des années 1986 et 1987 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions et, à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise ;
3°) de prononcer leur sursis à exécution jusqu'à l'intervention de la décision au fond ; la S.A. ROADIS soutient qu'elle a remis au vérificateur tous les éléments comptables et pièces de nature à justifier l'exactitude des résultats déclarés ; que l'administration a donné acte à la société de la procédure d'enregistrement des recettes de la caisse autonome par rapport à la ligne de caisses du magasin ; que le tribunal administratif a écarté la mauvaise foi, dont la présomption par le vérificateur a vicié l'analyse des circonstances ; que le vérificateur n'a mis en oeuvre aucune méthode de reconstitution autre que la simple totalisation des rouleaux de la caisse autonome figurant parmi les justificatifs présentés ; que le tribunal ne pouvait exiger la conservation d'un " ticket client " ne correspondant pas à un passage en caisse, édité lorsque les recettes étaient retapées sur une caisse en ligne ; que le rapprochement entre les bandes de la caisse autonome et les caisses " en ligne " ayant enregistré les ventes était possible ; qu'une expertise doit permettre un tel rapprochement ; que la société ne dispose pas de la trésorerie nécessaire pour acquitter les impositions élevées mises à sa charge, dont le paiement lui occasionnerait un préjudice difficilement réparable ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense enregistré le 22 octobre 1998, présenté par le directeur régional des impôts de Rhône-Alpes ; le directeur conclut au rejet de la requête ; il soutient que les recettes de la caisse autonome n'apparaissaient pas dans la comptabilité et ont été reconstituées ; que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a estimé, dans son avis, qu'il était impossible de considérer que les recettes de la caisse autonome avaient été reportées sur les caisses connectées ; que le brouillard de caisse ne comportait aucun total journalier des recettes de la caisse autonome et l'entreprise n'a conservé et remis qu'une partie des rouleaux de contrôle concernant cette caisse ; qu'au vu de la comptabilité présentée il n'a pas été possible de connaître le chiffre d'affaires enregistré par la caisse non connectée et de vérifier si ce chiffre avait été inclus ou non dans les recettes déclarées, faute d'identification de la caisse " en ligne " utilisée pour la saisie de la recette ; que la conservation du " ticket client " fictif lors de la saisie de la recette aurait
permis de vérifier sa provenance et son enregistrement ; que le vérificateur a admis les justificatifs produits en cours de contrôle permettant d'établir qu'une partie des recettes avait bien été saisie sur l'une des caisses connectées ; que pour la foire aux vins des discordances importantes ont été relevées entre les recettes enregistrées figurant sur les bandes de caisses connectées et le ticket de la caisse non connectée ; que ni le caractère moins performant de la caisse autonome, ni la qualification insuffisante de personnel ne peuvent excuser les insuffisances relevées ; que pour les jours au titre desquels un ticket X ou Z a pu être présenté, il a servi à reconstituer le chiffre d'affaires, tandis que pour les jours manquants le chiffre d'affaires journalier a été calculé d'après la moyenne des premiers ; que la société se borne à contester cette méthode sans présenter d'arguments assortis de justifications ; qu'elle ne produit aucun élément de preuve justifiant l'expertise demandée ; qu'elle ne justifie pas d'un risque de préjudice difficilement réparable et n'invoque pas de moyen de nature à lui permettre d'obtenir le sursis à exécution des impositions litigieuses ;
Vu le mémoire en réplique enregistré le 6 novembre 1998, présenté pour la S.A. ROADIS qui conclut aux mêmes fins que dans sa requête ; elle soutient en outre que le redressement se fonde seulement sur l'absence d'enregistrement des recettes de la caisse autonome sur une ligne distincte du livre de caisse ; que les recettes de cette caisse étaient retapées sur les lignes " bazar " ou bien " liquides " pour la foire aux vins ; qu'une ligne spéciale était ouverte au livre de caisse lorsque la caisse autonome remplaçait une caisse en panne sur la ligne ; que les chiffres d'affaires des journées pour lesquelles les tickets X ou Z n'ont pas été retrouvés n'ont pas été établis par encaissement moyen journalier mais de façon théorique en ajoutant ces chiffres à des recettes mentionnées sur les tickets totalisateurs et déjà intégrées au chiffre d'affaires du magasin ; qu'il a été démontré au vérificateur au titre de plusieurs journées qu'il avait ainsi prix en compte deux fois certaines recettes, sans vérification préalable, mais seules ont été admises des corrections ponctuelles ; que les justifications produites ont été délibérément ignorées ; que la perte de tickets X et Z ne pouvait à elle seule justifier un redressement sur l'ensemble de la période, dans la mesure où il est établi que la méthode conduit à une double imposition des recettes de la caisse autonome ; qu'il est inexact que le livre de caisse n'enregistrait pas les recettes de la caisse autonome lorsqu'elle remplaçait une caisse en panne ; que la commission a seulement constaté que la société n'apportait pas de preuve formelle indubitable ; que l'administration s'est opposée à une expertise qui permettrait de révéler la part des recettes de la caisse autonome par rapport au total ; qu'il est inexact que la société n'a pas contesté la méthode employée et n'apporte pas de commencement de preuve ; que le paiement de 3 millions de francs d'impôt compte tenu de la situation financière très tendue telle qu'elle apparaît au dernier bilan, mettrait la continuation de l'exploitation en péril compte tenu des délais légaux de règlement aux fournisseurs et de son endettement ; que le dernier résultat connu est déficitaire et l'insuffisance de trésorerie atteint 13 millions de francs ;

Vu l'ordonnance en date du 17 novembre 1998 fixant la clôture de l'instruction au 15 décembre 1998 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mars 1999 :
- le rapport de M. RICHER, président ;
- les observations de Me X..., avocat, pour la S.A. ROADIS ;
- et les conclusions de M. MILLET, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.192 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable : " ...la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière, lorsque le litige ou le redressement est soumis au juge ... " ;
Considérant que la S.A. ROADIS, qui exploite un supermarché à l'enseigne " Leclerc " à Roanne a, au cours des années 1986 et 1987, comptabilisé en fin de journée les recettes des onze caisses enregistreuses " en ligne " du magasin ; qu'au cours de la vérification de comptabilité le vérificateur a été informé de l'existence, au cours des années en litige, d'une douzième caisse enregistreuse non raccordée aux précédentes qui, aux dires des dirigeants de la société, aurait permis habituellement d'encaisser certaines recettes dites " bazar " correspondant à la vente d'articles exposés sous vitrine fermée et le règlement de travaux photographiques ainsi que, occasionnellement, des ventes en dehors du magasin d'articles promotionnels (foire aux vins, chrysantèmes, sapins de Noël), et enfin des recettes du magasin lorsqu'une caisse raccordée était en panne ; que le vérificateur a relevé que les recettes de cette caisse " autonome " ne faisaient pas l'objet d'un enregistrement distinct sur le livre de caisse ; que si la société requérante a expliqué que les recettes de cette caisse étaient incorporées une ou plusieurs fois par jour dans celles du magasin par ajout dans l'une des caisses " en ligne ", d'un montant égal à celui d'un " ticket X " de la caisse déconnectée, elle a été dans l'incapacité de justifier la totalité du produit journalier de ladite caisse et son report dans la comptabilité de l'entreprise ; qu'ainsi c'est à bon droit que l'administration a regardé la comptabilité de la société comme comportant de graves irrégularités la privant de caractère probant ;
Considérant que les redressements ayant été établis conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, la S.A. ROADIS supporte la charge de démonter le caractère excessif des impositions mises à sa charge ;
Considérant que, pour reconstituer les recettes de la caisse "autonome", le vérificateur a totalité les tickets "X" ou "Z" qui ont pu être présentés par la société pour des journées entières et, pour les jours d'ouverture au titre desquels aucun ticket n'a été produit, a procédé à une reconstitution des recettes sur la base de la moyenne des recettes journalières justifiées ; qu'il a en outre admis de réduire le montant de certaines recettes dont le report sur une caisse "raccordée" paraissait vraisemblable nonobstant certaines discordances de chiffres ;

Considérant, en premier lieu, que, comme il vient d'être dit, la société qui n'a produit ni la totalité des tickets "X" et "Z" de la caisse autonome, ni le moyen d'identifier sur l'ensemble des bandes des onze caisses enregistreuses "raccordées en ligne" au cours des deux années vérifiées, les opérations ayant consisté à reporter les montants des tickets "X" ou "Z" de la caisse autonome, ne met pas la cour, alors qu'elle supporte la charge de la preuve, en mesure de vérifier l'exactitude de ses affirmations relatives à la comptabilisation de ses recettes ; que pas davantage que devant le tribunal administratif la société ne propose de produire d'éléments susceptibles de corroborer ses assertions ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'en se bornant à soutenir que la méthode utilisée serait incohérente et conduirait, comme elle ne le démontre pas, à prendre en compte deux fois les mêmes recettes, la société n'établit pas que cette méthode serait impropre à permettre la reconstitution de ses recettes et de son chiffre d'affaires ;
Considérant, en dernier lieu, que la requérante ne saurait se borner à demander l'organisation d'une expertise de l'ensemble de ses bandes de caisse sans préciser sur quels éléments clairement identifiables et qu'elle n'aurait pas été en mesure de produire précédemment, pourrait utilement porter une telle expertise ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la S.A. ROADIS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;
Article 1 er : La requête de la S.A. ROADIS est rejetée.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 98LY01310
Date de la décision : 24/03/1999
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - CONTROLE FISCAL - VERIFICATION DE COMPTABILITE.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - CALCUL DE L'IMPOT.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILEES - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTEE - PROCEDURE DE TAXATION - PROCEDURE DE REDRESSEMENT.


Références :

CGI Livre des procédures fiscales L192


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. RICHER
Rapporteur public ?: M. MILLET

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1999-03-24;98ly01310 ?
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