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19/06/1998 | FRANCE | N°94LY00228

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3e chambre, 19 juin 1998, 94LY00228


Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 4 février 1994, présentée par la société d'avocats Caillat Day et associés, pour M. Gérard X..., demeurant à Martenex par Rumilly (Haute-Savoie) ; M. X... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement, en date du 5 novembre 1993, par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande de condamnation de la régie des remontées mécaniques d'Orcières-Merlette à l'indemniser de divers chefs de préjudice résultant du licenciement illégal dont il a fait l'objet alors qu'il était directeur de ladite régie ;

2 ) de condamner la régie des remontées mécaniques d'Orcières- Merlette à l...

Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 4 février 1994, présentée par la société d'avocats Caillat Day et associés, pour M. Gérard X..., demeurant à Martenex par Rumilly (Haute-Savoie) ; M. X... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement, en date du 5 novembre 1993, par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande de condamnation de la régie des remontées mécaniques d'Orcières-Merlette à l'indemniser de divers chefs de préjudice résultant du licenciement illégal dont il a fait l'objet alors qu'il était directeur de ladite régie ;
2 ) de condamner la régie des remontées mécaniques d'Orcières- Merlette à lui verser :
- une somme 63 273 francs au titre de la perte de revenus qu'il a subie pour la période du 9 juillet au 26 septembre 1991, avec les intérêts de droit à compter du 25 janvier 1992 et les intérêts des intérêts ;
- une somme de 336 693 francs représentant le montant des charges patronales et salariales assises sur son traitement brut pour la période du 1er février 1990 au 26 septembre 1991 ;
- une somme de 293 943,72 francs représentant le montant des allocations qu'il a perçues de l'ASSEDIC de l'Ain et dont cet organisme demande la restitution ;
3 ) de lui accorder les intérêts sur les sommes qu'il demande à compter du 25 janvier 1992 ainsi que les intérêts des intérêts ;
4 ) de lui allouer une somme de 30 000 francs en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juin 1998 :
- le rapport de M. BOUCHER, premier conseiller ;
- les observations de M. X... ;
- et les conclusions de M. QUENCEZ, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions relatives à la perte de revenus subie du 9 juillet au 26 septembre 1991 :
Considérant que M. X... est fondé à soutenir que sa demande au tribunal administratif de Marseille, qui portait sur le paiement de ses salaires au titre d'une période postérieure à la date retenue par un précédent jugement pour le calcul du préjudice résultant pour lui d'une mesure d'éviction illégale, devait être regardée comme tendant à la réparation d'un préjudice supplémentaire subi du fait de la date à laquelle la régie des remontées mécaniques d'Orcières-Merlette avait prononcé sa réintégration à la suite de ce jugement ; qu'il résulte de l'instruction que M. X..., dont le licenciement a été annulé par un jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 9 juillet 1991 devenu définitif, n'a été réintégré qu'à compter du 27 septembre 1991 ; que M. X... est en droit de prétendre à la réparation du préjudice résultant pour lui des pertes de revenus subies de la date de son éviction jusqu'à celle de sa réintégration, quelle que soit la date de notification du jugement prononçant l'annulation de son licenciement ; que s'il a déjà obtenu une indemnité au titre de ses pertes de revenus, il est constant que cette réparation a été arrêtée par le tribunal administratif à la date de son jugement du 9 juillet 1991 ; que le requérant est dès lors fondé à demander un supplément d'indemnité pour la période du 9 juillet 1991 au 26 septembre 1991, date de sa réintégration effective ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'indemnité au titre des pertes de salaires ; qu'il y a lieu, après déduction des revenus perçus par M. X... au cours de la période en litige, notamment au titre de l'indemnisation du chômage, de fixer le montant de l'indemnité due de ce chef au requérant à la somme de 30 000 francs ;
Sur les conclusions relatives au paiement des charges patronales et salariales dues sur les traitements au titre de la période d'éviction illégale :
Considérant que si la juridiction administrative n'eût pas été compétente pour connaître de litiges relatifs aux obligations de la régie des remontées mécaniques d'Orcières-Merlette vis-à-vis d'organismes de sécurité sociale, de prévoyance ou d'assurance-chômage, les conclusions susmentionnées de M. X... ne se rapportent pas à un tel litige mais tendent à la réparation d'un préjudice résultant pour lui d'un licenciement illégal par ladite régie et ressortissent ainsi à la juridiction administrative ;

Considérant qu'il est constant que la régie des remontées mécaniques d'Orcières-Merlette n'a pas régularisé la situation de M. X... vis à vis des organismes de sécurité sociale, d'assurance chômage et de retraite pour la période du 1er février 1990 au 26 septembre 1991, alors qu'elle aurait dû le faire en exécution du jugement du 9 juillet 1991 ; que M. X... n'a pas demandé cette régularisation en tant que mesure d'exécution de ce jugement et en application de l'article L.8-4 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; qu'il se borne à demander réparation du préjudice qu'il a subi du fait de cette absence de régularisation, par une condamnation de la régie à lui verser le montant des cotisations sociales de la période en cause, et en s'engageant à les reverser aux organismes sociaux concernés ;
Considérant qu'il incombe normalement au seul employeur de régulariser la situation d'un salarié vis à vis des organismes de protection sociale ; que M. X... n'apporte aucune précision et aucune justification sur la possibilité d'une régularisation à son initiative, en particulier par rachat de points de retraite, alors qu'il affirme que ses pensions de retraite ont déjà été liquidées ; qu'en cet état du dossier il n'est donc pas possible d'admettre les modalités de réparation de son préjudice demandées par M. X... ;
Considérant que M. X... peut être regardé comme demandant une indemnité réparant la diminution des montants des prestations dont il bénéficie, diminution qui résulte de la carence de la régie des remontées mécaniques d'Orcières-Merlette à régulariser sa situation vis à vis des organismes de protection sociale ; qu'il ressort des pièces du dossier et des explications données que cette diminution ne pourrait concerner que ses pensions de retraite ; que cependant aucune précision ou justification n'a été apportée à ce sujet, alors qu'une telle diminution des pensions de retraite ne pourrait avoir un caractère certain qu'en fonction des dispositions des régimes de retraite auxquels M. X... est affilié et des modalités de prise en compte ou non de la période en cause lors de la liquidation des pensions de retraite, points sur lesquels aucune justification n'a été apportée ; que, par suite, dès lors qu'en l'état du dossier le préjudice dont fait état M. X... n'apparaît pas certain, ses conclusions ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions relatives aux allocations dont l'ASSEDIC demande le remboursement :

Considérant que, d'une part, il a été tenu compte des allocations de chômage perçues par M. X... pour le calcul de son préjudice au titre des pertes de revenus ; que, d'autre part, l'ASSEDIC lui a demandé le remboursement de ces allocations et que cette demande de remboursement est la conséquence directe de l'annulation du licenciement par le tribunal administratif de Marseille ; que M. X... est fondé à demander à la régie des remontées mécaniques d'Orcières-Merlette de réparer le préjudice résultant pour lui de l'obligation dans laquelle il se trouve de rembourser l'ASSEDIC et qu'en l'état de cette demande de remboursement son préjudice présente un caractère certain ; que le requérant est dès lors fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande en se fondant sur le caractère éventuel du préjudice faute pour lui d'avoir déjà procédé au remboursement demandé ; qu'il y a lieu, dès lors, de condamner la régie des remontées mécaniques d'Orcières-Merlette à verser au requérant la somme de 293 943,72 francs sous réserve qu'il justifie de son règlement à l'ASSEDIC ;
Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :
Considérant que M. X... a droit aux intérêts au taux légal de la somme de 30 000 francs à compter du 25 janvier 1992, date de réception par la régie des remontées mécaniques d'Orcières-Merlette de sa demande préalable de paiement ; qu'il y a lieu également de faire droit à la demande de capitalisation des intérêts présentée le 4 février 1994, date à laquelle il était dû au moins une année d'intérêts ;
Considérant que M. X... a droit aux intérêts au taux légal de la somme de 293 943,72 francs du jour où il remboursera cette somme à l'ASSEDIC jusqu'à la date à laquelle la régie des remontées mécaniques d'Orcières-Merlette la lui réglera ; que la capitalisation a été demandée le 4 février 1994, date à laquelle, ainsi qu'il vient d'être dit, les intérêts n'étaient pas dus et que, dès lors, cette demande de capitalisation ne peut être accueillie ;
Sur l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la régie des remontées mécaniques d'Orcières-Merlette à verser à M. X... une somme de 5 000 francs au titre des frais exposés par lui à l'occasion du présent litige et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La régie des remontées mécaniques d'Orcières-Merlette est condamnée à verser à M. X... une indemnité de trente mille francs (30 000 francs) ; cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 25 janvier 1992 et ces intérêts seront capitalisés à la date du 4 février 1994 pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 2 : La régie des remontées mécaniques d'Orcières-Merlette est condamnée à verser à M. X... une indemnité de deux cent quatre-vingt treize mille neuf cent quarante-trois francs et soixante-douze centimes (293 943,72 francs) sous réserve que celui-ci justifie de son remboursement à l'ASSEDIC ; cette somme portera intérêts au taux légal à compter du jour de son remboursement par M. X... jusqu'à la date à laquelle la régie des remontées mécaniques d'Orcières-Merlette procédera à son règlement.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 5 novembre 1993 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : La régie des remontées mécaniques d'Orcières-Merlette est condamnée à verser à M. X... une somme de 5 000 francs au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 94LY00228
Date de la décision : 19/06/1998
Type d'affaire : Administrative

Analyses

36-13-03 FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - CONTENTIEUX DE LA FONCTION PUBLIQUE - CONTENTIEUX DE L'INDEMNITE


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-4, L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. BOUCHER
Rapporteur public ?: M. QUENCEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1998-06-19;94ly00228 ?
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