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10/03/1998 | FRANCE | N°94LY01151

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1e chambre, 10 mars 1998, 94LY01151


Enregistrée au greffe de la cour le 26 juillet 1994, la requête présentée pour la commune de Nice, représentée par son maire en exercice, par Me P..., avocat au barreau de Nice ;
La commune de Nice demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement en date du 5 mai 1994 par lequel le tribunal administratif de Nice a, à la demande de l'Association Niçoise Borriglione-Saint-Maurice et autres, annulé le permis de construire délivré le 30 novembre 1989 par le maire de Nice à la Société Immobilière de la ville de Nice, ensemble l'arrêté du maire de Nice du même jour portant au

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Enregistrée au greffe de la cour le 26 juillet 1994, la requête présentée pour la commune de Nice, représentée par son maire en exercice, par Me P..., avocat au barreau de Nice ;
La commune de Nice demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement en date du 5 mai 1994 par lequel le tribunal administratif de Nice a, à la demande de l'Association Niçoise Borriglione-Saint-Maurice et autres, annulé le permis de construire délivré le 30 novembre 1989 par le maire de Nice à la Société Immobilière de la ville de Nice, ensemble l'arrêté du maire de Nice du même jour portant autorisation de dépassement du coefficient d'occupation des sols pour le projet en cause ;
2 ) de rejeter les demandes de l'Association Niçoise Borriglione-Saint-Maurice et autres devant le tribunal administratif ;
Les défendeurs demandent à la cour :
1 ) de rejeter la requête de la commune de Nice ;
2 ) de la condamner à leur payer une somme de 25 000 francs sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ; Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 février 1998 :
- le rapport de M. FONTBONNE, conseiller ,
- les observations de Me WAGNER, avocat de la société immobilière de la ville de Nice,
- et les conclusions de M. VESLIN, commissaire du gouvernement ;

- Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que le tribunal administratif a annulé les décisions litigieuses au motif qu'elles étaient intervenues sur le fondement d'une délibération du conseil municipal de Nice du 5 octobre 1988 entachée de détournement de pouvoir en tant qu'elle décidait la cession à la Société Immobilière de la ville de Nice d'un terrain de 8 458 m2 dont la commune était propriétaire à charge pour la société acquéreur de rétrocéder gratuitement la parcelle de 5 660 m2 inscrite en emplacement réservé au plan d'occupation des sols ; que ce moyen ainsi tiré de l'exception d'illégalité de cette délibération n'avait pas été soulevé par les demandeurs et n'était pas d'ordre public ; que la commune de Nice est par suite fondée à soutenir qu'en soulevant un tel moyen d'office, le tribunal administratif a entaché son jugement d'irrégularité ; qu'il y a lieu en conséquence d'annuler le jugement attaqué, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de l'Association Borriglione-Saint-Maurice et autres devant le tribunal administratif ;
Sur la légalité des décisions attaquées :
Considérant qu'aux termes de l'article R.123-22 du code de l'urbanisme : " ...Les emplacements réservés visés à l'article R.123-18 sont déduits de la superficie prise en compte pour le calcul des possibilités de construction. Toutefois le propriétaire d'un terrain dont une partie est comprise dans un de ces emplacements et qui accepte de céder gratuitement cette partie à la collectivité bénéficiaire de la réserve peut être autorisé à reporter sur la partie restante un droit de construire correspondant à tout ou partie du coefficient d'occupation des sols affectant la superficie du terrain qu'il cède gratuitement à la collectivité. Cette autorisation est instruite et le cas échéant accordée comme en matière de dérogation ..." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la ville de Nice propriétaire depuis 1954 d'un terrain de 8458 m2 dépendant de son domaine privé l'a dans un premier temps, cédé à titre onéreux à la société immobilière de la ville de Nice ; que dans un second temps, cette dernière société a, ainsi que cela avait été prévu et stipulé initialement, rétrocédé gratuitement à la ville de Nice, la fraction de ce terrain de 5660 m2 inscrite en emplacement réservé au plan d'occupation des sols en vue de la réalisation d'un équipement public ; que par une décision du 30 novembre 1989 le maire de Nice a, en faisant application de l'article R.123-22 précité du code de l'urbanisme, autorisé la Société Immobilière de la ville de Nice à reporter sur la partie restante de son terrain d'une surface de 2 798 m2, les droits de construire correspondants au coefficient d'occupation des sols attaché à la parcelle de 5 660 m2 ; que le même jour, le maire de Nice a, en conséquence, délivré à la Société Immobilière de la ville de Nice, un permis de construire pour la réalisation sur la parcelle de 2 798 m2 d'un immeuble de 176 logements pour 12 029 m2 de surface hors oeuvre nette ;

Considérant que les dispositions précitées de l'article R.123-22 du code de l'urbanisme ont pour but de faciliter l'appréhension par la collectivité publique des terrains nécessaires à la réalisation d'équipements publics, en incitant leurs propriétaires à envisager une cession gratuite par l'octroi, en contrepartie de l'avantage qu'ils consentent à la collectivité publique, de la possibilité de bénéficier, contrairement au droit commun, de la prise en compte de la superficie totale de la parcelle pour la détermination des droits à construire ;
Considérant qu'en l'espèce la ville de Nice qui disposait de longue date de la propriété de la surface en cause de 5 660 m2 pouvait, à tout moment, envisager l'édification de l'équipement public projeté ; qu'elle n'a cédé cette surface de 5 660 m2 à la société immobilière de la ville de Nice que pour permettre à cette dernière de la lui rétrocéder ensuite gratuitement et de se placer dans la situation de pouvoir obtenir un report de coefficient d'occupation des sols ; que la société immobilière a ainsi bénéficié d'une possibilité s'écartant du droit commun sans que cet avantage trouve parallèlement sa justification dans un avantage parallèlement consenti en vue de la satisfaction d'un besoin public ; qu'alors même qu'une partie du rez-de-chaussée de l'immeuble à construire sur la parcelle restante de 2 798 m2 était destinée à recevoir une halte-garderie et que la société immobilière de la ville de Nice constitue une société d'économie mixte, l'opération en cause ne pouvait davantage être regardée comme poursuivant un intérêt public ; que les dispositions de l'article R.123-22 du code de l'urbanisme ont dès lors été utilisées dans un but autre que celui pour lequel elles ont été édictées ; que les requérants sont par suite fondés à soutenir que l'autorisation de dépassement du coefficient d'occupation des sols du 30 novembre 1989, et par voie de conséquence le permis de construire délivré le même jour, sont entachés de détournement de pouvoir, et à en demander l'annulation ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que la ville de Nice doit être condamnée à payer à l'Association Borriglione-Saint-Maurice une somme de 10 000 francs ;
Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les conclusions présentées par les autres défendeurs ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 5 mai 1994 est annulé.
Article 2 : L'autorisation de dépassement du coefficient d'occupation des sols accordée le 30 novembre 1989 par le maire de Nice à la Société Immobilière de la ville de Nice est annulée, ensemble le permis de construire délivré le même jour à la même société.
Article 3 : La ville de Nice est condamnée à payer à l'Association Borriglione-Saint-Maurice une somme de 10 000 francs sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 4 :Les conclusions tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel présentées par M. Clément D..., M. Félix E..., Mme Francine K...
A..., Mme Claire C..., Mme X... née T..., Mme Hélène Y..., Mme Juliette R..., Mme Fernande U..., M. Louis Y..., M. André J..., Mme Renée O..., M. Paul B..., M. Ernest Z..., Mme Colette F..., Mme Ginette S..., M. Eugène I..., Mme Hélène L..., M. Serge L..., Mme Bernadette M..., M. Joseph N..., Mme Suzanne Q..., M. H... TESTA, Mme G... TESTA sont rejetées.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 94LY01151
Date de la décision : 10/03/1998
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - DETOURNEMENT DE POUVOIR ET DE PROCEDURE - DETOURNEMENT DE POUVOIR - Existence - Permis de construire - Autorisation de dépassement de C - O - S - accordée au propriétaire d'un terrain pour partie en emplacement réservé et qui cède gratuitement cette partie à la collectivité (R - 123-22 du code de l'urbanisme) - Commune déjà propriétaire du terrain pour partie en emplacement réservé - Cession en totalité à charge pour l'acquéreur de rétrocéder gratuitement l'emplacement réservé - Autorisation de report du COS afférent à l'emplacement réservé sur la partie restante.

01-06-01, 68-01-01-02-02-15, 68-01-01-02-02-16-01, 68-03-03-03 Si les dispositions de l'article R.123-22 du code de l'urbanisme ouvrent au propriétaire d'un terrain dont une partie est comprise dans un emplacement réservé au plan d'occupation des sols et qui accepte de céder gratuitement cette partie à la collectivité publique la possibilité de bénéficier du report sur la partie restante du terrain du coefficient d'occupation du sol afférent à la partie cédée, cet avantage n'est accordé qu'en contrepartie de celui résultant pour la collectivité de l'acquisition gratuite d'un terrain nécessaire à la réalisation d'un équipement public. La collectivité publique qui possède un terrain dont une partie est inscrite en emplacement réservé ne peut le céder en totalité à une société immobilière en convenant que celle-ci lui rétrocédera gratuitement la partie réservée et bénéficiera d'un report de C.O.S. sur le surplus, sans entacher de détournement de pouvoir l'autorisation de dépassement de C.O.S. et le permis de construire ensuite délivré à ladite société.

URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - PLANS D'AMENAGEMENT ET D'URBANISME - PLANS D'OCCUPATION DES SOLS - APPLICATION DES REGLES FIXEES PAR LES P - O - S - REGLES DE FOND - DEPASSEMENT DE COEFFICIENT D'OCCUPATION DU SOL (ART - 15) - Report du C - O - S - en cas de cession d'une partie de terrain classée en emplacement réservé (art - R - 123-22 du code de l'urbanisme) - Terrain cédé par une commune en vue d'une rétrocession partielle permettant le report de C - O - S - Détournement de pouvoir.

URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - PLANS D'AMENAGEMENT ET D'URBANISME - PLANS D'OCCUPATION DES SOLS - APPLICATION DES REGLES FIXEES PAR LES P - O - S - REGLES DE FOND - REGLES APPLICABLES AUX SECTEURS SPECIAUX - EMPLACEMENTS RESERVES - Report de C - O - S - en cas de cession d'une partie de terrain classée en emplacement réservé (art - R - 123-22 du code de l'urbanisme) - Terrain cédé par une commune en vue d'une rétrocession partielle permettant le report du C - O - S - Détournement de pouvoir.

URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - PERMIS DE CONSTRUIRE - LEGALITE INTERNE DU PERMIS DE CONSTRUIRE - DETOURNEMENT DE POUVOIR - Report du C - O - S - sur un terrain cédé par une commune en vue d'une rétrocession de sa partie classée en emplacement réservé.


Références :

Code de l'urbanisme R123-22
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Président : M. Lavoignat
Rapporteur ?: M. Fontbonne
Rapporteur public ?: M. Veslin

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1998-03-10;94ly01151 ?
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