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03/02/1998 | FRANCE | N°95LY01414;95LY01479

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1e chambre, 03 février 1998, 95LY01414 et 95LY01479


Vu, 1°) sous le n° 95LY01414, la requête, enregistrée au greffe de la cour le 3 août 1995, présentée par le préfet de l'Ain ;
Le préfet demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 7 juin 1995 par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé, à la demande de la Société civile d'exploitation agricole (SCEA) des piscicultures PETIT, son arrêté du 16 juin 1994 autorisant la société des autoroutes Paris-Rhin-Rhône (S.A.P.R.R.) à rejeter dans le ruisseau du Combet les eaux pluviales provenant de l'autoroute A40 ;
2°) de rejeter la demande présent

e devant le tribunal administratif de Lyon par la SCEA des piscicultures PETIT ...

Vu, 1°) sous le n° 95LY01414, la requête, enregistrée au greffe de la cour le 3 août 1995, présentée par le préfet de l'Ain ;
Le préfet demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 7 juin 1995 par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé, à la demande de la Société civile d'exploitation agricole (SCEA) des piscicultures PETIT, son arrêté du 16 juin 1994 autorisant la société des autoroutes Paris-Rhin-Rhône (S.A.P.R.R.) à rejeter dans le ruisseau du Combet les eaux pluviales provenant de l'autoroute A40 ;
2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif de Lyon par la SCEA des piscicultures PETIT ;
Vu, 2°) sous le n° 95LY01479, la requête, enregistrée au greffe de la cour le 11 août 1995, présentée pour la S.A.P.R.R. dont le siège est situé ..., (21850), Saint Apollinaire, par Me ANDRES, avocat ;
La S.A.P.R.R. demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement susvisé ; 2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif de Lyon par la SCEA des piscicultures PETIT, et de condamner celle-ci à lui verser une somme de 6 000 francs au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 janvier 1998 :
- le rapport de M. GAILLETON, conseiller ;
- les observations de Mme X..., chef du bureau opérations immobilières représentant le préfet de l'Ain, de Me ANDRES, avocat de la société des autoroutes Paris-Rhin-Rhône (S.A.P.R.R.) et de Me ARDUIN, avocat de la société SCEA des piscicultures PETIT ;
- et les conclusions de M. VESLIN, commissaire du gouvernement ;

Sur la jonction :
Considérant que les requêtes du préfet de l'Ain et de la société des autoroutes Paris-Rhin-Rhône (S.A.P.R.R.), ainsi que les conclusions du ministre de l'environnement, sont dirigées contre un même jugement du tribunal administratif de Lyon, en date du 7 juin 1995, annulant un arrêté du préfet de l'Ain du 16 juin 1994 ; que ces requêtes et conclusions présentant à juger des questions semblables, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur l'arrêté attaqué :
Sans qu'il y ait lieu de se prononcer sur la recevabilité des requêtes et des conclusions susvisées :
Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la loi du 3 janvier 1992 sur l'eau: "Les dispositions de la présente loi ont pour objet une gestion équilibrée de la ressource en eau. Cette gestion équilibrée vise à assurer ... la protection contre toute pollution et la restauration de la qualité des eaux superficielles et souterraines ... de manière à satisfaire ou à concilier, lors des différents usages, activités ou travaux, les exigences ... de l'agriculture, des pêches et des cultures marines, de la pêche en eau douce ..." ; qu'aux termes de son article 10 : "I - Sont soumis aux dispositions du présent article les installations, ouvrages, travaux et activités réalisés à des fins non domestiques par toute personne physique ou morale, publique ou privée et entraînant des prélèvements sur les eaux superficielles ou souterraines, restitués ou non, une modification du niveau ou du mode d'écoulement des eaux ou des déversements, écoulements, rejets ou dépôts directs ou indirects, chroniques ou épisodiques, même non polluants. II - Les installations, ouvrages, travaux et activités visés au I sont définis dans une nomenclature, établie par décret en Conseil d'Etat après avis du Comité national de l'eau, et soumis à autorisation ou à déclaration suivant les dangers qu'ils présentent et la gravité de leurs effets sur la ressource en eau et les écosystèmes aquatiques ..." ; que la nomenclature des opérations soumises à autorisation ou déclaration en application de ces dispositions a été fixée par un tableau annexé au décret n 93-743 du 29 mars 1993 susvisé ;
Considérant que le préfet de l'Ain, par l'arrêté attaqué, a autorisé la société des autoroutes Paris-Rhin-Rhône (S.A.P.R.R.) à rejeter dans le ruisseau du Combet, au lieu-dit "L'Arret", les eaux pluviales en provenance de la section de l'autoroute A40 comprise entre l'échangeur de Sylans et le viaduc de Charix, qui étaient jusqu'alors déversées dans le lac de Sylans ; qu'il est constant que cette opération, qui nécessite notamment la réalisation d'un collecteur récupérant les eaux de quatre bassins de décantation, est susceptible de modifier d'au moins 25% le régime des eaux du Combet ; que, par suite, elle figure comme telle au nombre de celles soumises à autorisation par la nomenclature précitée ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret n 93-742 du 29 mars 1993 relatif aux procédures d'autorisation et de déclaration prévues par l'article 10 de la loi sur l'eau : "Toute personne souhaitant réaliser une installation, un ouvrage, des travaux ou une activité soumise à autorisation adresse une demande au préfet du département ou des départements où ils doivent être réalisés. Cette demande ... comprend ... 4 Un document indiquant, compte tenu des variations saisonnières et climatiques, les incidences de l'opération sur la ressource en eau, le milieu aquatique, l'écoulement, le niveau et la qualité des eaux, y compris de ruissellement, ainsi que sur chacun des éléments mentionnés à l'article 2 de la loi du 3 janvier 1992 susvisée, en fonction des procédés mis en oeuvre, des modalités d'exécution des travaux ou de l'activité, du fonctionnement des ouvrages ou installations, de la nature, de l'origine et du volume des eaux utilisées ou concernées. Ce document précise, s'il y a lieu, les mesures compensatoires ou correctives envisagées ... Si ces informations sont données dans une étude d'impact ou une notice d'impact, celle-ci remplace le document exigé à l'alinéa précédent" ; qu'aux termes de l'article 4 du même décret : "Le dossier de demande d'autorisation est, dès qu'il est jugé régulier et complet, soumis à enquête publique ..." ;
Considérant que même si le document exigé par ces dispositions ne constitue pas une étude d'impact, il doit cependant indiquer tous les éléments de nature à permettre d'apprécier les conséquences de l'opération envisagée sur le milieu aquatique au regard des intérêts protégés par l'article 2 de la loi du 3 janvier 1992 ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le ruisseau du Combet devra supporter l'écoulement d'importantes quantités d'eaux de ruissellement chargées en période hivernale des sels de déverglaçage versés sur l'autoroute, et que des hydrocarbures ainsi que des métaux et diverses matières en suspension sont également susceptibles d'être présents dans ces effluents malgré le traitement qu'ils subissent dans les bassins de décantation et de déshuilage ; que ceux-ci modifieront le biotope du ruisseau jusqu'à son confluent avec La Sémine et ne resteront pas sans conséquence sur la flore et le comportement de la faune aquatique, essentiellement composée de salmonidés ; que si le document sur les incidences de l'opération, joint par la S.A.P.R.R. à sa demande conformément aux dispositions de l'article 2 du décret précité, étudie les conséquences sur la faune des variations des concentrations salines des eaux du ruisseau, il ne donne, en revanche, pas d'indication suffisante quant à l'incidence sur le milieu aquatique des hydrocarbures et autres matières en suspension, et n'envisage aucune mesure compensatoire ou corrective à leur égard ; que, par suite, ledit document ne répond pas aux exigences du décret du 29 mars 1993 précité ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la S.A.P.R.R. et le ministre de l'environnement ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté préfectoral susvisé ;
Sur les conclusions de la SCEA des piscicultures PETIT tendant à la condamnation de la S.A.P.R.R. à lui rembourser une somme de 24 212 francs correspondant aux frais qu'elle a dû engager dans le cadre d'une procédure de constat d'urgence :

Considérant que les frais concernés n'ayant en tout état de cause pas été utiles à la solution du litige, les conclusions susmentionnées ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant que les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que la SCEA des piscicultures PETIT qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à la S.A.P.R.R. la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la S.A.P.R.R. à verser à la SCEA des piscicultures PETIT une somme de 6 000 francs à ce titre ;
Article 1er : Les requêtes du préfet de l'Ain et de la société des autoroutes Paris-Rhin-Rhône (S.A.P.R.R.), ainsi que les conclusions du ministre de l'environnement, sont rejetées.
Article 2 : La société des autoroutes Paris-Rhin-Rhône est condamnée à verser à la SCEA des piscicultures PETIT une somme de 6 000 francs au titre de l'article L.8-1 des code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la SCEA des piscicultures PETIT est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 95LY01414;95LY01479
Date de la décision : 03/02/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

- RJ1 EAUX - TRAVAUX - Travaux entraînant des prélèvements d'eaux - des déversements ou une modification de l'écoulement des eaux (article 10-I de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992) - Document indiquant les incidences du projet (article 2 - 4e - du décret du 29 mars 1993) - Contenu.

27-03, 27-05-03, 44-05-02 Même si le document exigé par l'article 2 du décret du 29 mars 1993 relatif aux procédures d'autorisation et de déclaration prévues par l'article 10 de la loi sur l'eau du 3 janvier 1992 ne constitue pas une étude d'impact, il doit cependant indiquer tous les éléments de nature à permettre d'apprécier les conséquences de l'opération envisagée sur le milieu aquatique au regard des intérêts protégés par l'article 2 de la loi du 3 janvier 1992.

- RJ1 EAUX - GESTION DE LA RESSOURCE EN EAU - AUTORISATIONS DE DEVERSEMENT - Document indiquant les incidences du projet (article 2 - 4e - du décret du 29 mars 1993) - Contenu.

- RJ1 NATURE ET ENVIRONNEMENT - AUTRES MESURES PROTECTRICES DE L'ENVIRONNEMENT - LUTTE CONTRE LA POLLUTION DES EAUX - Contenu du document indiquant les incidences du projet (article 2 - 4e - du décret du 29 mars 1993 relatif aux procédures d'autorisation et de déclaration prévues par l'article 10 de la loi du 3 janvier 1992) (1).


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Décret 93-742 du 29 mars 1993 art. 2, art. 4
Décret 93-743 du 29 mars 1993 annexe
Loi 92-3 du 03 janvier 1992 art. 2, art. 10

1.

Rappr. CE, 1997-10-03, Association Picardie-Nature, T. p. 825 et 953


Composition du Tribunal
Président : M. Lavoignat
Rapporteur ?: M. Gailleton
Rapporteur public ?: M. Veslin

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1998-02-03;95ly01414 ?
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