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31/12/1996 | FRANCE | N°94LY00549

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2e chambre, 31 décembre 1996, 94LY00549


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 1 avril 1994, présentée pour la compagnie d'assurances LA FRANCE S.A dont le siège social est ..., par Me MOUISSET, avocat;
La Compagnie d'assurances LA FRANCE demande à la cour :
1 - d'annuler le jugement en date du 22 décembre 1993 par lequel le tribunal administratif de MARSEILLE a rejeté sa demande, enregistrée le 22 janvier 1991 sous le n 91-1196, et tendant à la condamnation de l'Assistance publique de Marseille à lui rembourser les sommes qu'elle a été condamnée à verser à M. Y... et à la C.P.A.M des Bouches-du-

Rhône, par un arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence;
2 - de cond...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 1 avril 1994, présentée pour la compagnie d'assurances LA FRANCE S.A dont le siège social est ..., par Me MOUISSET, avocat;
La Compagnie d'assurances LA FRANCE demande à la cour :
1 - d'annuler le jugement en date du 22 décembre 1993 par lequel le tribunal administratif de MARSEILLE a rejeté sa demande, enregistrée le 22 janvier 1991 sous le n 91-1196, et tendant à la condamnation de l'Assistance publique de Marseille à lui rembourser les sommes qu'elle a été condamnée à verser à M. Y... et à la C.P.A.M des Bouches-du-Rhône, par un arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence;
2 - de condamner l'Assistance publique de MARSEILLE à lui verser les sommes de 36 000 francs, 648 750 francs et 47 180,69 francs avec intérêts au taux légal, à compter du jour de chaque réglement, et une somme de 10 000 francs au titre des frais irrépétibles ;
Vu les autres piéces du dossier;
Vu le code des assurances;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience;
Aprés avoir entendu, au cours de l'audience publique du 19 décembre 1996 :
- le rapport de M. BERTHOUD, conseiller ;
- les observations de Me BONNET, substituant Me MOUISSET, avocat de la compagnie LA FRANCE ;
- et les conclusions de Mme ERSTEIN, commissaire du gouvernement ;

Sur la responsabilité :
Considérant que M. François Y..., alors âgé de 64 ans, qui souffrait d'hémoptysies itératives, a été hospitalisé le 8 novembre 1976 dans le service de pneumologie de l'hôpital Saint-Joseph, dirigé par le docteur X... et dépendant de l'association hospitalière du Prado; que sur prescription de ce médecin, il a subi le 7 décembre 1976, à l'hôpital Sainte-Marguerite, qui dépend de l'Assistance publique de Marseille, une artériographie bronchique; qu' à la suite de cette intervention, M. Y... est demeuré atteint d'hémiplégie ; que la compagnie d'assurances "La France" agissant pour le compte de son assuré, le docteur X..., a indemnisé M. Y... et la Caisse primaire d'assurance-maladie des Bouches-du-Rhône des préjudices subis; que cette compagnie, qui se trouve ainsi subrogée, en vertu de l'article L. 151-12 du code des assurances, dans les droits et actions dont disposent son assuré et la victime qu'elle a indemnisée, a mis en cause devant le tribunal administratif de Marseille la responsabilité de service public hospitalier;
Considérant que si les trois experts, désignés dans le cadre de l'instance engagée par M. Y... devant le tribunal de grande instance de Marseille, se sont déclarés incapables de déterminer avec certitude les causes médicales exactes de l'accident vasculaire encéphalique dont l'intéressé a été victime, il est constant que cet accident est survenu au cours de l'artériographie subie par le patient; que l'investigation n'a pas été menée à son terme, en raison de l'hémiparésie apparue en cours d'intervention et vraisemblablement due, selon les experts, au décrochage d'une plaque d'athérome par manipulation; qu'aucune autre origine à cet accident cérébral ne peut être trouvée dans les antécédents médicaux de la victime; que par suite, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a considéré que le lien de causalité entre l'intervention médicale et cet accident n'était pas établi;
Considérant qu'il appartenait au docteur X..., qui connaissait la situation clinique du malade hospitalisé dans son service, ainsi qu'aux praticiens qui ont effectué l'artériographie bronchique susmentionnée au sein de l'hôpital Sainte-Marguerite, de vérifier au préalable que cette méthode d'examen n'était pas contre-indiquée dans le cas de M. Y...; que compte-tenu de la facilité avec laquelle il pouvait être procédé à un examen Doppler, qui aurait mis en évidence l'importance des lésions aréthomateuses situées à la base du cou du patient, et par voie de conséquence le risque majeur que présentait pour lui une artériographie bronchique, le fait de n'avoir pas procédé, avant l'intervention, à un tel examen, est constitutif d'une faute de nature à engager la responsabilité du service public hospitalier vis-à-vis de M. Y...;

Considérant cependant que la subrogation ne confère au subrogé les droits et actions qui appartiennent au subrogeant que dans les limites dans lesquelles le subrogeant peut les exercer; que la compagnie d'assurances "La France", subrogée dans les droits de la victime, M. Y..., dans la limite des droits de son assuré, le docteur X..., peut se voir opposer la faute qui a été commise par ce dernier en ne faisant pas procéder à l'examen Doppler susmentionné avant de prescrire l'artériographie litigieuse; que compte tenu de cette faute, qui est de nature à exonérer partiellement le service public hospitalier de sa responsabilité, il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'affaire en déclarant l'Assistance publique de Marseille responsable d'un tiers seulement des conséquences dommageables de cette intervention ;
Sur le préjudice et les droits à réparation :
Considérant que n'est pas contestée l'évaluation à 695.930,69 francs du préjudice subi par M. Y..., retenue par le juge judiciaire, en vertu de laquelle la compagnie requérante a été condamnée à payer à M. Y... et à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône les sommes de 648 750 francs et 47.180,69 francs ; qu'il convient d'inclure dans le préjudice indemnisable les dépens mis à la charge de la compagnie requérante par le juge judiciaire, et dont elle justifie, lesquels s'élèvent à 6 000 francs ; qu'en revanche, la compagnie " La France" n'est pas fondée à demander que soit intégrée une seconde fois dans ce préjudice la provision de 30.000 francs versée à M. Y..., qui doit s'imputer sur l'indemnité définitive payée à l'intéressé; qu'ainsi, compte tenu du partage de responsabilité susmentionné, les droits de la requérante s'établissent à la somme de 233.976,90 francs ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la compagnie "La France" est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué, par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'indemnité, ainsi que la condamnation de l'assistance publique de Marseille à lui payer la somme de 233.976,90 francs, avec intérêts au taux légal à compter de la date de chaque versement, soit le 1 février 1991 à concurrence de 36.000 francs, et le 1 février 1992, pour ce qui concerne le solde de l'indemnité ;
Sur les frais irrépétibles :
Considérant qu'aux termes de l'article L 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel: " Dans toutes les instances devant les tribunaux adminstratifs et des cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y lieu d'allouer à la compagnie d'assurances "La France S.A" la somme de 5 000 francs au titre des frais irrépétibles ;
Article 1er - Le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 22 décembre 1993 est annulé.
Article 2 : L'assistance publique de Marseille est condamnée à payer à la compagnie d'assurances "La France S.A" la somme de 233.976,90 francs ; cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 1 février 1991 à concurrence de 36.000 francs, et du 1 février 1992, pour ce qui concerne le solde de l'indemnité.
Article 3 : L'assistance publique de Marseille est condamnée à payer à la compagnie d'assurances "La France S.A" la somme de 5 000 francs au titre des frais irrépétibles.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la compagnie d'assurances "La France S.A" et de sa demande de première instance est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 94LY00549
Date de la décision : 31/12/1996
Type d'affaire : Administrative

Analyses

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICE PUBLIC DE SANTE - ETABLISSEMENTS PUBLICS D'HOSPITALISATION - RESPONSABILITE POUR FAUTE MEDICALE : ACTES MEDICAUX - EXISTENCE D'UNE FAUTE MEDICALE DE NATURE A ENGAGER LA RESPONSABILITE DU SERVICE PUBLIC - ACTES MEDICAUX D'INVESTIGATION.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RECOURS OUVERTS AUX DEBITEURS DE L'INDEMNITE - AUX ASSUREURS DE LA VICTIME ET AUX CAISSES DE SECURITE SOCIALE - SUBROGATION - SUBROGATION DE L'ASSUREUR.


Références :

Code des assurances L151-12
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. BERTHOUD
Rapporteur public ?: Mme ERSTEIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1996-12-31;94ly00549 ?
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