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22/02/1996 | FRANCE | N°94LY00438

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2e chambre, 22 février 1996, 94LY00438


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 14 mars 1994, présentée pour le DEPARTEMENT de l'ISERE, par la SCP FOLCO-TOURRETTE, avocat ;
Le DEPARTEMENT de l'ISERE demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du 30 décembre 1993 par lequel le tribunal administratif de GRENOBLE a condamné M. X... et la société GENTILINI-BERTHON à lui verser une somme de 8 272,46 francs, qu'il estime insuffisante, en réparation des désordres affectant les bâtiments du collège de VILLEFONTAINE ;
2°) de condamner M. X... et la société GENTILINI-BERTHON à lui verser une somm

e de 21 966,38 francs, outre intérêts, ainsi qu'une somme de 3 000 francs au...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 14 mars 1994, présentée pour le DEPARTEMENT de l'ISERE, par la SCP FOLCO-TOURRETTE, avocat ;
Le DEPARTEMENT de l'ISERE demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du 30 décembre 1993 par lequel le tribunal administratif de GRENOBLE a condamné M. X... et la société GENTILINI-BERTHON à lui verser une somme de 8 272,46 francs, qu'il estime insuffisante, en réparation des désordres affectant les bâtiments du collège de VILLEFONTAINE ;
2°) de condamner M. X... et la société GENTILINI-BERTHON à lui verser une somme de 21 966,38 francs, outre intérêts, ainsi qu'une somme de 3 000 francs au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 février 1996 :
- le rapport de Mme HAELVOET, conseiller ;
- les observations de Me Y... substituant la SCP PHILIPON SAINT AVIT, avocat de la société OTH RHONE-ALPES ;
- et les conclusions de M. COURTIAL, commissaire du gouvernement ;

Sur la responsabilité des constructeurs :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les désordres pour lesquels le DEPARTEMENT DE L'ISERE a obtenu réparation sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ont pour origine un excès de vapeur résultant de l'absence, d'une part, de système de ventilation dans le local de laverie et, d'autre part, de condenseur de buées sur le lave-vaisselle ;
Considérant, en premier lieu, que les conséquences de tels manquements ne pouvaient être ignorées lors de la réception de l'ouvrage, laquelle est intervenue sans réserve, s'agissant du lot considéré ; qu'ainsi ils constituaient un vice apparent et ne pouvaient, dès lors, engager la responsabilité décennale des constructeurs ; que, par suite, M. X... est fondé à soutenir par appel incident que, pour ce motif, sa responsabilité a été reconnue à tort par les premiers juges ; qu'il convient, dans cette mesure, d'annuler le jugement attaqué et de rejeter la demande du DEPARTEMENT DE L'ISERE, exclusivement fondée sur les principes susmentionnés, devant le tribunal administratif de Grenoble, en tant qu'elle était dirigée contre M. X... et par voie de conséquence l'appel provoqué de celui-ci contre la société GENTILINI-BERTHON et la société OTRA et l'appel de cette dernière contre M. X... ;
Considérant, en second lieu, que si les désordres en cause résultent d'une erreur de conception, ils sont également imputables à la société GENTILINI-BERTHON, chargée de l'exécution du lot considéré et qui n'a émis aucune réserve sur l'absence de ventilation du local et la suppression du condenseur de buées ; que, dès lors, ladite société, qui ne soutient pas en appel que les vices de l'ouvrage étaient apparents lors des opérations de réception, et qui n'était pas engagée solidairement avec M. X... vis à vis du maître de l'ouvrage, a été à juste titre reconnue responsable des dommages subis par le DEPARTEMENT DE L'ISERE ;
Sur les fautes du maître de l'ouvrage :
Considérant que, selon les pièces du dossier, il a été décidé, en cours de chantier, de ne pas installer le condenseur dont s'agit, pourtant prévu au marché initial ; qu'aucun document du dossier d'instruction ne permet d'affirmer que cette modification, ordonnée par l'un des maîtres d'oeuvre, a été effectuée à la demande expresse du maître de l'ouvrage ; qu'ainsi, c'est à tort que les premiers juges n'ont condamné les constructeurs qu'à la réparation de la moitié du préjudice subi ; qu'il convient de condamner l'entreprise GENTILINI-BERTHON à la réparation de la totalité du dommage ;
Sur le montant du préjudice :

Considérant que les travaux destinés à faire cesser les désordres ont consisté notamment en l'installation d'un système de ventilation et en la réfection des peintures du local ; qu'il ne résulte pas des pièces du dossier, et notamment, du rapport de l'expert, que le système de ventilation retenu aurait apporté une amélioration à l'ouvrage ; qu'il apparaît, au contraire, qu'il s'agissait d'un procédé très simple uniquement destiné à faire cesser les désordres et à permettre une utilisation normale des locaux ; que, par suite, son coût n'avait pas à être diminué du montant d'une plus-value de 3 000 francs ; qu'il convient, ainsi, de fixer à 8 307,46 francs, le montant de l'indemnité à allouer à ce titre ; que les travaux de peinture, nécessaires à la réfection de la laverie, endommagée par les condensations, ont été estimés par l'expert, "en l'absence de devis et par provision", à la somme de 5 000 francs hors taxes ; que le DEPARTEMENT produit la copie d'une facture afférente à ces travaux d'un montant de 13 658,92 francs toutes taxes comprises ; qu'aucun élément du dossier ne permet d'affirmer que cette somme serait excessive ou que les prestations réalisées ne correspondraient pas à celles strictement nécessaires pour remédier aux désordres ; qu'il convient ainsi de porter à 13 658,92 francs l'indemnité à allouer au titre de ce préjudice, alors même que ladite facture n'aurait pas été soumise à l'expert ;
Considérant que le DEPARTEMENT DE L'ISERE a droit aux intérêts de la somme de 21 966,38 francs à compter du jour de l'enregistrement de sa demande devant le tribunal administratif de Grenoble ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le DEPARTEMENT DE L'ISERE est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble, n'a fait que partiellement droit à sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant que la société GENTILINI-BERTHON succombe dans la présente instance ; que sa demande tendant à ce que le DEPARTEMENT de l'ISERE soit condamné à lui verser une somme au titre des frais qu'elle a exposés doit, en conséquence être rejetée ; que le DEPARTEMENT DE L'ISERE succombe également au regard des conclusions de M. X... ; que, par suite, sa demande tendant à ce que ce dernier soit condamné à lui verser une somme au titre des frais qu'il a exposés doit, en conséquence être rejetée ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'une part, de condamner M. X... à payer à la société OTRA une somme au titre des frais qu'elle a exposés et, d'autre part, de condamner le DEPARTEMENT DE L'ISERE à payer à M. X... une somme au titre des frais qu'il a exposés ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de GRENOBLE du 30 décembre 1993 est annulé en tant qu'il a condamné M. X... à la réparation des dommages subis par le DEPARTEMENT de l'ISERE.
Article 2 : La demande présentée par le DEPARTEMENT de l'ISERE devant le TRIBUNAL ADMINISTRATIF de GRENOBLE est rejetée en tant qu'elle est dirigée contre M. X....
Article 3 : La somme que la société GENTILINI-BERTHON a été condamnée à verser au DEPARTEMENT de l'ISERE par le jugement du tribunal administratif de GRENOBLE du 30 décembre 1993 est portée à 21 966,38 francs, avec intérêts au taux légal à compter du 10 août 1990.
Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de GRENOBLE est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 3 ci-dessus.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête du DEPARTEMENT de l'ISERE est rejeté.
Article 6 : Les conclusions incidentes et les conclusions tendant au bénéfice de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel de la société GENTILINI-BERTHON, de M. X... et de la société OTH Rhône-Alpes sont rejetées.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 94LY00438
Date de la décision : 22/02/1996
Sens de l'arrêt : Annulation partielle réformation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

- RJ1 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - POUVOIRS ET OBLIGATIONS DU JUGE - Moyens d'ordre public - Absence - Caractère apparent des vices à raison desquels une condamnation sur le fondement de la garantie décennale a été prononcée (1).

39-08-03, 54-07-01-04-01-01 La mise hors de cause, en appel, de l'un des constructeurs condamné solidairement en première instance avec un autre constructeur à indemniser le maître de l'ouvrage sur le fondement de la garantie décennale ne peut être étendue à cet autre constructeur, dès lors que le moyen justifiant cette mise hors de cause qui, en l'espèce, est tiré du caractère apparent des vices affectant l'ouvrage dont s'agit, n'a été invoqué que par le premier et que ces constructeurs n'étaient pas engagés solidairement vis-à-vis du maître de l'ouvrage.

- RJ1 PROCEDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - QUESTIONS GENERALES - MOYENS - MOYENS D'ORDRE PUBLIC A SOULEVER D'OFFICE - ABSENCE - Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage - Caractère apparent des vices à raison desquels une condamnation sur le fondement de la garantie décennale a été prononcée (1).


Références :

Code civil 1792, 2270
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1

1. Comp. CE, 1982-01-20, Souchon, T. p. 720


Composition du Tribunal
Président : M. Lukaszewicz
Rapporteur ?: Mme Haelvoet
Rapporteur public ?: M. Courtial

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1996-02-22;94ly00438 ?
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