Vu, enregistrée au greffe de la cour le 7 décembre 1993, la requête présentée pour la société ISOMA dont le siège social est ... représentée par son gérant M. Y... par Me Z..., avocat au barreau de Clermont-Ferrand ;
La société ISOMA demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 12 octobre 1993, par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation du permis de construire délivré le 25 octobre 1991 par le maire du Cendre à la société L.I.D.L. pour l'implantation d'un bâtiment à usage commercial ;
2°) d'annuler le permis de construire litigieux ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu la loi n°73-1193 du 27 décembre 1973 modifiée ;
Vu la loi n°90-1260 du 31 décembre 1990 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 décembre 1995 :
- le rapport de M. FONTBONNE, conseiller ;
- les observations de Me X... substituant Me BRAUN, avocat de la société L.I.D.L. ;
- et les conclusions de M. GAILLETON, commissaire du gouvernement ;
Sur le fond :
Considérant que l'article 29 de la loi du 27 décembre 1973, codifié à l'article L.451-5 du code de l'urbanisme, dispose : "Préalablement à l'octroi du permis de construire, s'il y a lieu, et avant réalisation, si le permis de construire n'est pas exigé, sont soumis pour autorisation à la commission départementale d'urbanisme commercial les projets : 1° De constructions nouvelles entraînant création de magasins de commerce de détail d'une surface de plancher hors oeuvre supérieure à 3 000 m 2 , ou d'une surface de vente supérieure à 1 500 m 2 , les surfaces précitées étant ramenées, respectivement à 2 000 et 1 000 m 2 dans les communes dont la population est inférieure à 40 000 habitants ..." ; que l'article 29-1 de la loi précitée, issu de l'article 2 de la loi n°90-1260 du 31 décembre 1990 dispose en outre : "Pour la détermination des seuils de superficie prévus au 1° de l'article 29 ci-dessus, il est tenu compte de tous les magasins de commerce de détail qui font partie ou sont destinés à faire partie d'un même ensemble commercial. Sont regardés comme faisant partie d'un même ensemble commercial, qu'ils soient ou non situés dans des bâtiments distincts et qu'une même personne en soit ou non le propriétaire ou l'exploitant, les magasins qui sont réunis sur un même site et qui : - soit ont été conçus dans le cadre d'une même opération d'aménagement foncier, que celle-ci soit réalisée en une ou plusieurs tranches ; - soit bénéficient d'aménagements conçus pour permettre à une même clientèle l'accès des divers établissements ; ..." ;
Considérant que pour demander l'annulation du permis de construire litigieux délivré à la société L.I.D.L pour l'édification d'un bâtiment à usage commercial, la société ISOMA qui exploite à proximité immédiate des commerces groupés de vente au détail à l'enseigne Intermarché, soutient que son établissement et l'implantation projetée forment, au sens des dispositions précitées, un même ensemble commercial dépassant le seuil de 1 000 m 2 au-delà duquel dans les communes de moins de 40 000 habitants, la création d'une surface de vente nouvelle doit être soumise pour autorisation à la commission départementale d'urbanisme commercial préalablement à la délivrance du permis de construire ;
Considérant que les bâtiments de la société ISOMA ont été construits en 1986 sur des parcelles dépendant d'un lotissement ; que l'implantation litigieuse de la société L.I.D.L. s'inscrit dans le périmètre de la zone d'aménagement concerté de Graveyroux créée par délibération du conseil municipal du Cendre du 17 décembre 1988 ; que, par suite, alors même que le lotissement puis la zone d'aménagement concerté ont successivement concouru à l'aménagement du même secteur, l'implantation des deux magasins en cause ne peut être regardée comme relevant de la même opération d'aménagement foncier réalisée en plusieurs tranches au sens des dispositions précitées de l'article L. 451-5 du code de l'urbanisme ;
Considérant que si l'institution d'une zone d'aménagement différé ouvrant à la collectivité publique un droit de préemption sur les mutations foncières, peut avoir pour but de préparer une opération d'aménagement foncier ultérieure, elle ne saurait néanmoins être regardée comme une modalité de réalisation d'une opération de cette nature ; que la société ISOMA ne peut en conséquence utilement faire valoir qu'une zone d'aménagement différé englobait à l'origine l'ensemble du secteur ;
Considérant que la société ISOMA a obtenu le 9 septembre 1991 de la commission départementale d'urbanisme commercial l'autorisation d'étendre sa surface de vente de 1 460 m 2 ; qu'elle fait valoir que cette extension a été réalisée pour partie sur la Z.A.C. de Graveyroux et qu'en conséquence les deux magasins forment dans le cadre de la même opération d'aménagement foncier un ensemble commercial de plus de 1 000 m 2 de surface de vente ;
Considérant que contrairement à ce que soutient la société ISOMA l'extension de 1 460 m 2 de son magasin ne saurait, en tout état de cause, pour déterminer si le seuil de 1 000 m 2 était dépassé, être retenue pour sa totalité mais seulement pour la fraction dont l'implantation a été autorisée dans le périmètre de l'opération d'aménagement foncier constituée par la zone d'aménagement concerté des Graveyroux ;
Considérant que la société ISOMA verse au dossier l'attestation d'un architecte indiquant que la surface de vente bâtie qu'elle a réalisée à l'intérieur du périmètre de la Z.A.C. est de 412 m 2 ; qu'elle soutient par ailleurs que la surface de vente de la société L.I.D.L. s'établit non pas à 570 m 2 mais à 605 m 2 ; que la société ISOMA ne produit toutefois aucun document établissant que l'extension de son magasin telle qu'elle a été autorisée par le permis de construire qui lui a été délivré le 7 mai 1992 comportait à l'intérieur de la Z.A.C. de Graveyroux une surface de vente excédant la surface de 354 m 2 à laquelle plusieurs pièces du dossier de première instance font référence et en particulier une lettre du maire du Cendre au préfet du Puy-de-Dôme en date du 23 décembre 1991 ; que, par suite, alors même que la surface de vente de la société L.I.D.L. se serait élevée à 605 m 2 , la société ISOMA ne peut soutenir qu'à l'intérieur de la même opération d'aménagement foncier constituée par la Z.A.C. de Graveyroux les surfaces cumulées de vente des deux magasins en cause, dépasseraient le seuil de 1 000 m 2 au delà duquel le permis de construire litigieux ne pouvait être délivré qu'au vu de l'autorisation préalable de la commission départementale d'urbanisme commercial ;
Considérant que les deux magasins de la société L.I.D.L. et de la société ISOMA sont implantés le long d'une voie communale préexistante qui a vocation à desservir l'ensemble du secteur ; que, par suite alors même qu'hormis une maison de retraite, les deux magasins en cause constituent les seules implantations, ladite voie ne peut être regardée comme un aménagement conçu dans le but de permettre leur accès par la même clientèle ; que, par ailleurs aucune voirie publique ou privée n'assure une circulation interne entre les deux magasins concernés ; que si la rue du marché assure ce rôle entre les différents commerces à l'enseigne Intermarché, la société ISOMA ne peut utilement invoquer cette circonstance à l'égard du projet de la société L.I.D.L. ;
Considérant que si en raison de l'implantation des deux magasins sur des parcelles cadastrales contiguës, l'implantation très proche de leurs parcs de stationnement débouchant sur la même voie publique peut amener une partie de la clientèle à aller de l'un à l'autre magasin sans reprendre sa voiture, cette circulation ne peut en l'absence de passage piétonnier aménagé entre les deux parcs de stationnement, se faire que par la voie publique ; que dans ces conditions les deux magasins en cause ne peuvent être regardés comme bénéficiant de parcs de stationnement communs conçus dans le but de permettre leur accès par la même clientèle ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le magasin projeté par la société L.I.D.L. ne peut, au sens des dispositions précitées de l'article 2 de la loi du 31 décembre 1990 être regardé comme faisant partie ou étant destiné à faire partie avec les bâtiments déjà construits ou projetés de la société ISOMA d'un même ensemble commercial d'une surface de vente supérieure à 1 000 m 2 ; que la société ISOMA ne peut par suite soutenir que le permis de construire litigieux aurait dû être délivré au vu d'une autorisation de la commission départementale d'urbanisme commercial ; qu'elle n'est en conséquence pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif à rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que les conclusions de la société ISOMA ne peuvent qu'être rejetées dès lors qu'elle est la partie perdante ;
Considérant qu'il y a lieu de condamner la société ISOMA à payer à la société L.I.D.L une somme de 5 000 francs ;
Article 1er : La requête de la société ISOMA est rejetée.
Article 2 : La société ISOMA est condamnée à payer à la société L.I.D.L. une somme de 5 000 francs sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.