Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 19 mai 1995, présentée pour la société SOGEA dont le siège social est situé 3 cours Ferdinand de Lesseps, 92851 Rueil-Malmaison, par M° Balique, avocat ; la société SOGEA demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance en date du 21 avril 1995 par laquelle le vice-président du tribunal administratif de Marseille l'a condamnée solidairement avec la société GUINTOLI à verser à M. Z... une provision de 130.000 francs ainsi qu'une somme de 3.000 francs à titre de provision en application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
2°) de rejeter la demande de M. Z... tendant à la condamnation solidaire de la société SOGEA et de la société GUINTOLI à lui verser une provision de 350.000 francs ;
3) de condamner M. Z... à lui payer une somme de 5.960 francs en application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 octobre 1995 :
- le rapport de M. JOUGUELET président-rapporteur ;
- les observations de Me X... substituant de Me BALIQUE, avocat de la société SOGEA SA, de Me LESAGE, avocat de M. Z... et de Me NOTARI, avocat de la société GUINTOLI ;
- et les conclusions de M. COURTIAL, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 129 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : " Le président du tribunal administratif ou de la cour administrative d'appel ou le magistrat que l'un d'eux délègue peut accorder une provision au créancier qui a saisi le tribunal ou la cour d'une demande au fond lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable " ;
Considérant que la société SOGEA et la société GUINTOLI demandent à la cour d'annuler l'ordonnance par laquelle le vice-président du tribunal administratif de Marseille les a condamnées à verser à M. Z... une provision de 130.000 francs à valoir sur l'indemnité qu'il réclame en réparation des pertes de cultures qu'il a subies du fait de l'inondation de ses terrains situés en dehors de l'emprise d'un gazoduc, par suite du débordement d'un ruisseau dû à la présence d'une piste provisoire de circulation nécessaire à la pose dudit gazoduc; que M. Z... réclame par la voie de l'appel incident et provoqué la majoration de cette provision ;
Considérant en premier lieu que la juridiction administrative est seule compétente, en vertu de la loi du 28 pluviôse an VIII, pour statuer sur les demandes d'indemnité formées à raison des dommages causés par une opération de travaux publics dès lors que les personnes dont la responsabilité est recherchée participent au travail public et ont la qualité de tiers par rapport à la victime ; que, par suite, la société SOGEA et la société GUINTOLI qui participaient en qualité respectivement d'entrepreneur principal et de sous-traitant aux travaux publics de pose du gazoduc pour le compte de GAZ DE FRANCE ne sont fondées à soutenir ni que la demande au fond présentée par M. Z... ne relevait pas de la compétence du tribunal administratif ni que l'obligation dont ce dernier se prévaut devant le juge du référé près ce tribunal est, pour ce motif, sérieusement contestable ;
Considérant en deuxième lieu que la responsabilité des participants aux travaux publics à l'égard des victimes qui sont des tiers par rapport à ces travaux, est engagée même en l'absence de fautes de leur part ; que par suite le moyen tiré de l'absence de faute des entreprises dans la réalisation des travaux est inopérant ;
Considérant en troisième lieu que la société GUINTOLI ne peut utilement invoquer, pour contester le principe de sa responsabilité à l'égard de la victime, les stipulations de son contrat de sous-traitance dès lors que M. Z... est un tiers par rapport audit contrat ;
Considérant en dernier lieu que le lien de causalité entre les travaux en cause et les inondations des terres exploitées par M. Z... n'est pas contesté ; qu'il résulte des pièces du dossier et notamment des rapports de M. Y..., expert désigné par les assureurs des deux sociétés, que le juge des référés n'a pas fait une évaluation inexacte de l'obligation non contestable à la charge des deux sociétés en accordant à M. Z... une provision de 130.000 francs à valoir sur l'indemnité qu'il réclame au titre des pertes de récoltes de maïs, d'aulx et de pommes de terres qu'il a subies ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de la société SOGEA et de la société GUINTOLI tendant à l'annulation de l'ordonnance attaquée et celles de M. Z... tendant à une majoration de la provision qui lui a été accordée par cette ordonnance ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant d'une part que ces dispositions font obstacle à ce que M. Z... qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer aux sociétés SOGEA et GUINTOLI une somme quelconque au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;
Considérant d'autre part qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de condamner les sociétés SOGEA et GUINTOLI à payer à M. Z... chacune une somme de 3.000 francs au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La société SOGEA et la société GUINTOLI sont condamnées à verser chacune une somme de 3.000 francs à M. Z....
Article 2 : La requête de la société SOGEA, les conclusions de la société GUINTOLI et le surplus des conclusions de M. Z... sont rejetés.