Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 30 décembre 1993, présentée pour la SARL "Les trois résidences Hestia" dont le siège social est ... représentée par son gérant en exercice par Me Genin, avocat ;
La SARL "Les trois résidences Hestia" demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance en date du 21 décembre 1993 par laquelle le vice-président délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble statuant en référé a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une somme de 800 000 francs à titre de provision sur le préjudice qu'elle a subi du fait de l'impossibilité dans laquelle elle se trouve de se faire rembourser un crédit de taxe sur la valeur ajoutée de 820 394 francs ;
2°) de lui allouer la provision sollicitée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 juillet 1995 :
- le rapport de M. MILLET, conseiller ;
- les observations de Me LLINAS substituant Me GENIN, avocat de la société Les trois résidences Hestia ;
- et les conclusions de M. BONNAUD, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité de l'ordonnance :
Considérant qu'il résulte des dispositions des articles R. 128 à R. 131 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, relatives au référé devant le tribunal administratif, que l'ordonnance de référé est rendue à la suite d'une procédure particulière adaptée à la nature de la demande et à la nécessité d'assurer une décision rapide ; que cette procédure qui garantit le caractère contradictoire de l'instruction, se suffit à elle-même et ne comporte obligatoirement ni audience publique, ni convocation des parties ; que, par suite, la société "Les trois résidences Hestia" n'est pas fondée à se plaindre de n'avoir pas été convoquée à une audience publique de référé ; que le juge du référé, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments du demandeur, a exposé les raisons pour lesquelles il considérait l'obligation dont se prévalait la société "Les trois résidences Hestia" comme étant sérieusement contestable ; qu'ainsi, sa décision n'est pas entachée d'une insuffisance de motivation ;
Sur la demande de provision :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 129 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Le président du tribunal administratif ou de la cour administrative d'appel ou le magistrat que l'un d'eux délègue peut accorder une provision au créancier qui a saisi le tribunal ou la cour d'une demande au fond lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie" ;
Considérant que la société "Les trois résidences Hestia" poursuit la condamnation de l'Etat à lui verser une provision de 800 000 francs sur le montant du crédit de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle détiendrait à concurrence de 820 394 francs, à raison de la faute qu'auraient commise les services comptables de la Direction générale des impôts en acceptant d'imputer ce crédit, à la demande du gérant de la société, sur la taxe sur la valeur ajoutée due par d'autres sociétés du groupe ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales : "Les réclamations relatives aux impôts, contributions, droits, taxes, redevances, soultes et pénalités de toute nature, établis ou recouvrés par les agents de l'administration, relèvent de la juridiction contentieuse lorsqu'elles tendent à obtenir la réparation d'erreurs commises dans l'assiette ou le calcul des impositions, soit le bénéfice d'un droit résultant d'une disposition législative ou réglementaire ..." et qu'aux termes de l'article L. 199 de ce livre : "En matière de ... taxes sur le chiffre d'affaires ..., les décisions rendues par l'administration sur les réclamations contentieuses et qui ne donnent pas entière satisfaction aux intéressés peuvent être portées devant le tribunal administratif ..." ;
Considérant que la demande de la société "Les trois résidences Hestia" tendant au remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle prétend détenir et qui a été imputé en paiement d'impositions dues par des tiers, relève du contentieux visé par les dispositions précitées du livre des procédures fiscales ; que de telle demandes sont soumises à des conditions et délais particuliers fixés par le livre des procédures fiscales et par les articles 242 OA et suivants de l'annexe II au code général des impôts ; que l'existence de cette voie de droit, dont les effets seraient, en l'espèce, si elle était recevable et fondée, identiques à l'action en responsabilité engagée, font obstacle à la recevabilité de la demande de condamnation de l'Etat par un recours qui ne respecte pas les règles de procédure particulières fixées par le législateur pour ces contestations ; qu'il suit de là que l'obligation de l'Etat doit être regardée comme sérieusement contestable et que la société "Les trois résidences Hestia" n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge délégué du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande de provision ;
Article 1er : La requête de la société "Les trois résidences Hestia" est rejetée.