Vu la décision en date du 1er décembre 1988 enregistrée au greffe de la cour le 19 décembre 1988, par laquelle le président de la 9e sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée pour la Société Civile Immobilière "Les Minguettes" dont le siège social est ... par la S.C.P. LABBE, DELAPORTE, avocat aux Conseils ;
Vu la requête et le mémoire complémentaire de la S.C.I. "Les Minguettes" enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 13 mars 1987 et 10 juillet 1987 et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement du 13 janvier 1987 par lequel le tribunal administratif de LYON a rejeté sa demande en décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 1978, 1979 et 1980 ;
- prononce la décharge des impositions litigieuses ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 9 mai 1988, et le décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 28 septembre 1989 :
- le rapport de M. BONIFAIT, président de chambre ;
- les observations de la S.C.P. LE PRADO substituant la S.C.P. DELAPORTE, BRIARD, avocat de la Société Civile Immobilière "Les Minguettes" ;
- et les conclusions de Mme HAELVOET, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité de la procédure :
Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 81 de la loi n° 86-1317 du 30 décembre 1986 et de l'article 93 de la loi n° 87-1060 du 30 décembre 1987, que l'administration ainsi que le contribuable peuvent faire valoir tout moyen nouveau jusqu'à la clôture de l'instruction et que ces nouvelles règles sont applicables aux moyens nouveaux présentés depuis le 1er janvier 1987 ; qu'il est constant que dans sa requête introduite postérieurement au 1er janvier 1987, la S.C.I "Les Minguettes" a critiqué pour la première fois la régularité de la procédure d'imposition ; que, par suite, ce moyen, bien qu'il n'ait pas été invoqué en première instance est recevable en application des dispositions sus-viséés de la loi du 30 décembre 1987 ;
Considérant qu'il résulte de l'article 1649 quinquies A du code général des impôts, alors applicable, que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ne peut être saisie que lorsque le désaccord entre l'administration et le contribuable porte sur une question de fait ; qu'il résulte de l'instruction que le point de savoir si la société requérante, d'une part, remplissait ou non les conditions exigées par l'article 239 ter du code précité et, d'autre part, pouvait se prévaloir de la note administrative du 11 octobre 1965 sur le fondement de la garantie offerte par l'article 1649 quinquies E du code sus-visé, alors en vigueur, est une question de droit qui ne relève pas de la compétence de ladite commission ; qu'ainsi, le moyen tiré du défaut de consultation de cet organisme doit être écarté ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article 239 ter du code général des impôts, l'exonération d'impôt sur les sociétés s'applique, notamment : I. "Aux sociétés civiles ayant pour objet la construction d'immeubles en vue de la vente, qui ont été créées avant la date de publication de la loi n° 64-1278 du 23 décembre 1964 mais n'ont procédé, avant cette date, à aucune vente d'immeuble ou de fraction d'immeuble ; II. Aux sociétés civiles ayant pour objet la construction d'immeubles en vue de la vente qui sont issues de la transformation de sociétés en nom collectif ayant le même objet, ou de sociétés visées à l'article 1655 ter sous réserve qu'elles soient en mesure de justifier que, jusqu'à la date de la transformation inclusivement, elles n'ont consenti aucune vente d'immeuble ou de fraction d'immeuble et qu'aucune de leurs parts ou actions n'a été cédée à titre onéreux à une personne autre qu'un associé initial ..." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la S.C.I. "Les Minguettes", créée en 1962 sous la forme d'une des sociétés visées par l'article 1655 ter du code général des impôts, a été transformée en société civile de construction-vente par acte du 18 novembre 1975 ; que par actes des 7 août 1974, 20 septembre 1974 et 18 septembre 1975, MM. X... et Y..., alors associés de la société requérante, ont cédé leurs parts à la Société Générale Bâtiment Rhône ; qu'ainsi, une des conditions posées par l'article 239 ter sus-visé n'a pas été respectée, nonobstant la circonstance que l'un des associés de la S.C.I. "Les Minguettes" détenait 87,50 % du capital de la Société Générale Bâtiment Rhône ;
Mais considérant que, sur le fondement de l'article 1649 quinquies E du code précité alors en vigueur, la société requérante demande à bénéficier de la tolérance admise par la note administrative du 11 octobre 1965 selon laquelle l'exonération d'impôt sur les sociétés n'est pas remise en cause en cas de cessions de parts sans caractère spéculatif consenties au prix de revient à de nouveaux associés désireux de prendre des participations financières dans le programme de construction projeté en vue de leur permettre de se joindre au groupe des associés d'origine postérieurement à la constitution de la société ; qu'il résulte de l'instruction que les parts litigieuses, acquises pour leur montant nominal, soit 10 francs, ont été cédées au prix unitaire de 72,95 francs ; qu'en admettant même que les cédants n'aient été animés d'aucune intention spéculative, il n'est nullement établi que la différence entre le prix de cession et la valeur d'acquisition corresponde au coût de détention desdites parts et, par suite, que le prix de cession soit égal au prix de revient des valeurs cédées ; qu'en outre, MM. X... et Y... ayant vendu la totalité des parts qu'ils détenaient dans le capital de la S.C.I "Les Minguettes", la Société Générale Bâtiment Rhône ne s'est donc pas jointe au groupe des associés d'origine, contrairement à la démarche envisagée par la note précitée ; que, par suite, la mesure de tempérament prévue par ladite note n'est pas applicable en l'espèce ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la S.C.I "Les Minguettes" n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de LYON a rejeté sa demande en décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés ;
Article 1er : La requête de la S.C.I. "Les Minguettes" est rejetée.