Vu l'ordonnance du président de la 9e sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat en date du 1er décembre 1988 transmettant le dossier de la requête ci-après visée à la cour administrative d'appel de LYON ;
Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 11 février 1988 présentée par la société civile immobilière (S.C.I.) "les Chavants", ayant son siège social ... représentée par son gérant, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement en date du 1er décembre 1987 du tribunal administratif de LYON en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1974 à 1976 ;
- lui accorde décharge desdites impositions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 9 mai 1988, et le décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 6 juillet 1989 :
- le rapport de M. RICHER, conseiller ;
- et les conclusions de M. ROUVIERE, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que, pour contester la régularité de la procédure de taxation d'office mise en oeuvre à son encontre, la S.C.I. "Les Chavants" a soutenu devant les premiers juges que les avis de redressement lui avaient été notifiés dans des conditions irrégulières ; qu'il ressort du jugement attaqué que le tribunal a répondu à ce moyen ; que, dès lors, le moyen tiré de l'omission de statuer manque en fait ;
Sur la régularité de la procédure d'impo-sition :
Considérant, en premier lieu, qu'il est constant que la S.C.I. "Les Chavants" n'a pas souscrit de déclarations de bénéfices au titre des années 1974, 1975 et 1976 ; qu'aucune disposition applicable aux années d'imposition litigieuses ne faisait obligation à l'administration d'adresser une mise en demeure à la société d'avoir à déposer lesdites déclarations ; que la requérante ne saurait utilement invoquer, en se fondant sur l'article L 80 A du livre des procédures fiscales, le contenu d'une intervention ministérielle du 13 décembre 1977 à l'assemblée nationale qui ne peut pas être regardée comme une interprétation de la loi fiscale au sens dudit article L 80 A ; que, dès lors, par application des articles 170 et 179 du code général des impôts, l'administration était en droit de l'imposer par voie de taxation d'office au titre de chacune de ces trois années ; qu'il s'ensuit, dès lors que l'absence de production des déclarations dans les délais légaux n'a pas été mise en évidence par la vérification de comptabilité à laquelle l'adminis-tration a procédé avant d'arrêter les bases d'impo-sition, que les éventuelles irrégularités qui, selon la contribuable, auraient entaché la vérification de comptabilité, sont en tout état de cause sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que si la société requérante soutient qu'elle n'a pas reçu de notification régulière des avis de redressement expédiés par l'administration à son ancien siège et au comptable de la société, elle n'allègue pas avoir informé l'administration fiscale de son changement d'adresse ou avoir accompli, auprès de l'administration des postes ou de tiers, les diligences nécessaires pour que le courrier qui lui était destiné puisse lui parvenir ; que, dans ces conditions, dès lors que les notifications de redressement qui lui ont été adressées ont été régulièrement effectuées, le moyen manque en fait ; qu'en outre, les diligences effectuées par l'administration pour faire parvenir ces avis à la société par l'intermédiaire de son comptable ne sont pas de nature à entacher la régularité de la procédure d'imposition ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
En ce qui concerne les années 1974 et 1975 :
Considérant qu'en vertu du 2 de l'article 206 du code général des impôts, les sociétés civiles sont passibles de l'impôt sur les sociétés "si elles se livrent à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35" ; qu'aux termes de l'article 35 du même code dans sa rédaction applicables aux années 1974 à 1976 : "I. Présentent également le caractère de bénéfices industriels et commerciaux ... les bénéfices réalisés par les ... 3° Personnes qui procèdent au lotissement et à la vente de terrains leur appartenant dans les conditions prévues par la législation et la réglementation applicables en matière de lotissements ..." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'en 1964 la société requérante s'est constituée sous la forme d'une société civile immobilière de copropriété et a acquis un terrain de 18 000 m2 aux HOUCHES (HAUTE-SAVOIE), en vue d'y construire des maisons d'habitation et de les attribuer aux associés ; qu'en 1969 les statuts ont été modifiés et, transformée en société civile de construction-vente, la société s'est fixée pour objet la construction en vue de la vente de sept chalets sur le terrain acquis en 1964 ; que, faute d'avoir pu réaliser intégralement son objet, la société a vendu trois chalets, dont un inachevé et a procédé au lotissement du reste du terrain, viabilisé et divisé en huit lots ; qu'au cours de la période litigieuse il a été vendu deux terrains en 1974, et un en 1975 ; qu'ainsi et quelles que soient les raisons pour lesquelles la société n'a pu réaliser le projet de construction prévu en 1969, les cessions de terrain ont été réalisées dans le cadre d'une opération de lotissement ; que, dès lors, c'est par une exacte application des dispositions précitées du code général des impôts que l'administration a regardé le profit réalisé à l'occasion de la cession comme passible de l'impôt sur les sociétés ;
En ce qui concerne l'année 1976 :
Considérant que le seul redressement relatif à l'année 1976 porte sur la contribution exceptionnelle due par les sociétés et la majoration de 10 % y afférente ; que la société requérante ne formule aucun moyen tendant à contester le bien-fondé de cette contribution ; que sa demande est sur ce point irrecevable ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande en décharge de l'impôt sur les sociétés des années 1974 à 1976 ;
Article 1er : La requête de la société civile immobilière "Les Chavants" est rejetée.