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31/07/1989 | FRANCE | N°89LY00141

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Pleniere, 31 juillet 1989, 89LY00141


Vu l'ordonnance en date du 1er décembre 1988 par laquelle le président de la 2ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis le dossier de la requête ci-après visée à la cour administrative d'appel de LYON ;
Vu la requête sommaire, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 26 juin 1987, et le mémoire complémentaire, enregistré le 30 septembre 1987, présentés pour le département de la Savoie par Me X..., avocat au Conseil d'Etat et à la cour de cassation, et tendant :
1°) à la réformation du jugement du 17 avril 1987 p

ar lequel le tribunal administratif de GRENOBLE a condamné la société POM...

Vu l'ordonnance en date du 1er décembre 1988 par laquelle le président de la 2ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis le dossier de la requête ci-après visée à la cour administrative d'appel de LYON ;
Vu la requête sommaire, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 26 juin 1987, et le mémoire complémentaire, enregistré le 30 septembre 1987, présentés pour le département de la Savoie par Me X..., avocat au Conseil d'Etat et à la cour de cassation, et tendant :
1°) à la réformation du jugement du 17 avril 1987 par lequel le tribunal administratif de GRENOBLE a condamné la société POMAGALSKI à lui verser une indemnité de 379 932 Francs majorée des intérêts, qu'il estime insuffisante, en réparation de désordres affectant les trois gares de la télécabine du jardin alpin à COURCHEVEL ;
2°) à la condamnation de la société POMAGALSKI à lui verser la somme de 745 638,20 Francs, avec les intérêts et la capitalisation des intérêts ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 9 mai 1988, et le décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 6 juillet 1989 :
- le rapport de M. JANNIN, conseiller ;
- et les conclusions de M. JOUGUELET, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par marché en date du 26 juin 1979, le département de la Savoie a confié à la société POMAGALSKI la conception et la réalisation de la télécabine du jardin alpin à COURCHEVEL ; que, l'étanchéité de trois gares de ladite télécabine s'étant révélée défectueuse, le tribunal administratif de GRENOBLE a, par jugement du 17 avril 1987, condamné la société POMAGALSKI à verser au département de la Savoie une indemnité de 379 932 Francs représentant le coût des travaux nécessaires pour remédier aux désordres, après déduction d'un abattement de 50 % pour tenir compte des améliorations apportées aux ouvrages par rapport aux prévisions du marché ; que, par la requête susvisée, le département de la Savoie sollicite la majoration de cette indemnité qu'il estime insuffisante et la suppression de tout abattement pour plus-value ; que, par la voie du recours incident, la société POMAGALSKI conteste le principe de sa responsabilité et demande à être déchargée de la condamnation prononcée contre elle ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que l'évaluation par le juge administratif du préjudice dont il lui est demandé réparation doit tenir compte de tous les éléments figurant au dossier et susceptibles d'avoir une influence sur l'étendue dudit préjudice ; qu'ainsi le juge peut être amené à appliquer au coût de remise en état d'un ouvrage endommagé un abattement pour plus-value, alors même que l'existence d'une telle plus-value n'aurait été alléguée par aucune des parties, dès lors qu'elle ressort du dossier ; que, dans ce cas, le juge ne peut être regardé ni comme ayant soulevé d'office un moyen non invoqué par les parties ni comme ayant statué au-delà des conclusions dont il était saisi ; qu'il s'ensuit que, contrairement à ce que soutient le département de la Savoie, le tribunal administratif de GRENOBLE n'a entaché le jugement attaqué d'aucune irrégularité en appliquant au montant des travaux nécessaires pour remédier aux désordres affectant les gares de la télécabine du jardin alpin un abattement de 50 % destiné à tenir compte d'une plus-value qui n'avait pas été invoquée par la société POMAGALSKI ;
Sur la responsabilité :
Considérant que les malfaçons affectant l'étanchéité des trois gares de la télécabine du jardin alpin ont rendu ces ouvrages impropres à leur destination ; que, dès lors, la société POMAGALSKI n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de GRENOBLE l'a déclarée responsable des désordres en cause, notamment sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ;
Sur le préjudice :

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert désigné par les premiers juges que, si les travaux nécessaires pour assurer l'étanchéité des trois gares de la télécabine du jardin alpin comportaient des améliorations par rapports aux prévisions du marché, le coût desdits travaux n'était pas supérieur à celui d'une réfection à l'identique ; qu'ainsi les améliorations apportées par ces travaux n'ont pas été constitutives d'une plus-value devant être déduite du montant de la réparation due au maître de l'ouvrage ; que le département de la Savoie est, dès lors, fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de GRENOBLE a tenu compte, dans le calcul de l'indemnité qu'il lui a accordée, d'un abattement pour plus-value de 50 % ;
Considérant que les travaux de réfection se sont élevés à 628 700 Francs ; que les infiltrations dans les gares ont entraîné une dépense de 2 700 Francs pour le déplacement d'armoires électriques ; qu'ainsi le montant total de l'indemnité due au département de la Savoie par la société POMAGALSKI et que cette dernière doit être condamnée à lui payer s'établit à 631 400 Francs ;
Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :
Considérant que le département requérant a droit aux intérêts de la somme de 631 400 Francs à compter du 24 juillet 1985 ; que la capitalisation des intérêts a été demandée le 26 juin 1987 ; qu'à cette date il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Article 1er : La somme de 379 932 Francs que la société POMAGALSKI a été condamnée à verser au département de la Savoie par le jugement du tribunal administratif de GRENOBLE le 17 avril 1987 est portée à 631 400 Francs. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 24 juillet 1985. Les intérêts échus le 26 juin 1987 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de GRENOBLE du 17 avril 1987 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du département de la Savoie est rejeté ainsi que le recours incident de la société POMAGALSKI.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Pleniere
Numéro d'arrêt : 89LY00141
Date de la décision : 31/07/1989
Sens de l'arrêt : Réformation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - REPARATION - PREJUDICE INDEMNISABLE - EVALUATION - PLUS-VALUES APPORTEES AUX OUVRAGES PAR LA REPARATION DES DESORDRES - Prise en compte d'office par le juge pour l'évaluation du préjudice.

39-06-01-07-03-02-03, 54-07-03, 60-04-03 L'évaluation par le juge administratif du préjudice dont il lui est demandé réparation doit tenir compte de tous les éléments figurant au dossier et susceptibles d'avoir une influence sur l'étendue dudit préjudice. Ainsi, le juge peut être amené à appliquer au coût de remise en état d'un ouvrage endommagé un abattement pour plus-value, alors même que l'existence d'une telle plus-value n'aurait été alléguée par aucune des parties, dès lors qu'elle ressort du dossier. Dans ce cas, le juge ne peut être regardé ni comme ayant soulevé d'office un moyen non invoqué par les parties, ni comme ayant statué au-delà des conclusions dont il était saisi.

PROCEDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - POUVOIRS DU JUGE DE PLEIN CONTENTIEUX - Evaluation du préjudice - Prise en compte d'office de tous les éléments susceptibles d'avoir une influence sur son étendue - Plus-values.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - EVALUATION DU PREJUDICE - Pouvoirs et devoirs du juge - Prise en compte d'office de tous les éléments susceptibles d'avoir une influence sur son étendue - Plus-values.


Références :

Code civil 1792, 2270, 1154


Composition du Tribunal
Président : M. Gentot
Rapporteur ?: M. Jannin
Rapporteur public ?: M. Jouguelet

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1989-07-31;89ly00141 ?
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