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17/08/2023 | FRANCE | N°22DA00080

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 17 août 2023, 22DA00080


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013, 2014 et 2015.

Par un jugement n° 2000786 du 16 novembre 2021, le tribunal administratif de Rouen a, d'une part, déclaré ne pas avoir lieu de statuer sur les conclusions de la demande de M. A... tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotis

ations supplémentaires de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013, 2014 et 2015.

Par un jugement n° 2000786 du 16 novembre 2021, le tribunal administratif de Rouen a, d'une part, déclaré ne pas avoir lieu de statuer sur les conclusions de la demande de M. A... tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2015 à concurrence de la somme de 5 333 euros, d'autre part, rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 14 janvier 2022 et 22 juin 2022, M. A..., représenté par Me Horrie, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il ne lui donne pas entière satisfaction ;

2°) de prononcer la décharge des impositions demeurant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'administration a modifié la base légale des impositions demeurant en litige entre la proposition de rectification et la réponse aux observations du contribuable, sans respecter les garanties prévues à l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

- l'administration ne pouvait pas imposer les sommes en cause en affirmant que leur origine était indéterminée, sans mettre en œuvre la procédure prévue à l'article L. 16 du livre des procédures fiscales ;

- l'abandon par l'administration des rehaussements au titre du passif injustifié de la SARL Auto 2000 aurait dû entraîner l'abandon des rectifications qui en découlent au titre des revenus distribués de M. A... ;

- les sommes inscrites au crédit du compte courant d'associé sont des remboursements de véhicules payés en espèces par M. A... pour le compte de la société à responsabilité limitée (SARL) Auto 2000.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 mai 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 24 mai 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 26 juillet 2022.

Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique a produit, le 22 août 2022, après la clôture de l'instruction, un mémoire qui n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Sauveplane, président assesseur,

- les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... est le gérant de la ..., qui exerce une activité d'achat - revente de véhicules d'occasion et effectue à titre accessoire des prestations de réparation de véhicules automobiles. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle le vérificateur a constaté, d'une part, que des dépenses comptabilisées en charges par la société à hauteur de 3 224 euros au titre de l'exercice 2013 et 5 173 euros au titre de l'exercice 2014 n'étaient pas déductibles pour le calcul du bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés et, d'autre part, que le compte courant d'associé ouvert au nom de M. A... dans la comptabilité de la société présentait un solde créditeur de 73 950 euros au titre de l'exercice 2013, 63 875 euros au titre de l'exercice 2014 et 19 100 euros au titre de l'exercice 2015. En l'absence de justification par la société de l'origine de ces crédits sur le compte courant d'associé, le vérificateur a estimé qu'il s'agissait de revenus distribués imposables entre les mains de M. A... sur le fondement du 1° et du 2° du 1. de l'article 109 du code général des impôts, à hauteur de 77 174 euros pour 2013, 69 048 euros pour 2014 et 19 100 euros pour 2015. En conséquence, l'administration a assujetti M. A... à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre des années 2013, 2014 et 2015 en suivant la procédure de rectification contradictoire, qu'elle a assorties de la majoration de 40 % pour manquement délibéré. M. A... relève appel du jugement du 16 novembre 2021 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Rouen, après avoir déclaré ne pas avoir lieu de statuer sur les conclusions de sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2015 à concurrence de la somme de 5 333 euros, a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / (...) / Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée. ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que l'administration doit indiquer au contribuable, dans la proposition de rectification qu'elle lui adresse, les motifs et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et la catégorie de revenus dans laquelle ils sont opérés ainsi que les années d'imposition concernées. Hormis le cas où elle se réfère à un document qu'elle joint à la proposition de rectification ou à la réponse aux observations du contribuable, l'administration peut satisfaire cette obligation en se bornant à se référer aux motifs retenus dans une proposition de rectification ou une réponse aux observations du contribuable, consécutive à un autre contrôle et qui lui a été régulièrement notifiée, à la condition qu'elle identifie précisément la proposition ou la réponse en cause et que celle-ci soit, elle-même, suffisamment motivée.

4. Il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 30 novembre 2016 et la réponse aux observations du contribuable du 9 juillet 2019 comportent l'indication des années d'imposition concernées, les motifs et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal ainsi que la catégorie de revenus dans laquelle ils sont opérés. La réponse aux observations du contribuable répond aux arguments formulés par l'avocat de la ... et mentionne les conséquences à tirer, au niveau des revenus distribués imposés entre les mains de M. A..., de l'abandon des rectifications relatif au passif injustifié pour la .... Par suite, la proposition de rectification et la réponse aux observations du contribuable étaient suffisamment motivées. Contrairement à ce que soutient le requérant, l'administration a toujours fondé les rectifications sur l'article 109 du code général des impôts et n'a pas opéré de substitution de base légale dans la réponse aux observations du contribuable du 9 juillet 2019 et si l'administration a invoqué les dispositions du 2. de l'article 38 du code général des impôts, ces dispositions ne constituent pas le fondement de l'imposition mise à la charge de M. A... et n'ont été mentionnées dans la réponse aux observations du contribuable adressée à celui-ci qu'en reproduisant la réponse faite à la .... En tout état de cause, M. A... n'ayant pas répondu à la proposition de rectification du 20 novembre 2016 qui lui avait été adressée, il ne peut se prévaloir de l'absence de motivation de la réponse aux observations du contribuable. Par suite, le moyen doit être écarté.

5. En second lieu, il est constant que les sommes n'ont pas été taxées sur le fondement de l'article L. 69 du code général des impôts. Par suite, le vérificateur pouvait, au cours de la vérification de comptabilité de la ..., demander à cette société de justifier de l'origine des sommes portées au crédit du compte courant d'associé de M. A... et, en l'absence de réponse probante sur la nature et l'origine de ces sommes, les imposer entre les mains de ce dernier en tant que revenus distribués sur le fondement de l'article 109 du code général des impôts sans avoir recours à la procédure de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales. Dès lors, le moyen doit être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

6. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. ".

7. M. A... n'a pas répondu à la proposition de rectification du 30 novembre 2016 dont il a accusé réception le 8 décembre 2016. Par suite, en application des dispositions précitées de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, la charge de la preuve lui incombe. En vertu du principe d'indépendance des procédures, la circonstance que la ... a présenté des observations en réponse à la proposition de rectification du 8 septembre 2016 qui lui avait été adressée, est sans incidence sur l'acceptation tacite des rectifications par M. A....

8. Il résulte des mentions de la proposition de rectification du 30 novembre 2016 que M. A... a disposé d'un compte courant d'associé dont le solde créditeur résultait d'opérations portées au crédit de ce compte qui n'ont pu être justifiées, à hauteur de 73 950 euros pour l'exercice 2013, 63 875 euros pour l'exercice 2014 et 19 100 euros pour l'exercice 2015, et qui ont été regardées comme des revenus distribués imposables entre les mains de M. A... sur le fondement du 2° du 1. de l'article 109 du code général des impôts.

9. Aux termes du 1. de l'article 109 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus distribués : / (...) / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. / (...) ".

10. Les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés sont, sauf preuve contraire, à la disposition de cet associé, alors même que l'inscription résulterait d'une erreur comptable involontaire, et ont donc, même dans une telle hypothèse, le caractère de revenus distribués, imposables entre les mains de cet associé dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en vertu du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts. Pour que l'associé échappe à cette imposition, il lui incombe de démontrer, le cas échéant, qu'il n'a pas pu avoir la disposition de ces sommes ou que ces sommes ne correspondent pas à la mise à disposition d'un revenu.

11. En premier lieu, les sommes inscrites au crédit du compte courant d'associé de M. A... doivent être regardées comme des sommes mises à la disposition de l'associé, au sens et pour l'application du 2° du 1. de l'article 109 du code général des impôts, quel que soit le sort de la rectification adressée à la société sur le fondement d'un passif injustifié constitué par les sommes créditées sur le compte courant d'associé et réintégrées dans la base imposable de l'impôt sur les sociétés sur le fondement du 2. de l'article 38 du code général des impôts. Par suite, le moyen doit être écarté.

12. En second lieu, si M. A... soutient que les sommes inscrites au crédit du compte courant d'associé sont des remboursements de véhicules payés en espèces par lui pour le compte de la ..., il se borne à de simples allégations, alors que la charge de la preuve lui incombe et que les pièces produites en appel ne permettent pas d'établir que les sommes inscrites au crédit du compte courant d'associé correspondraient à des avances effectuées par ses soins. En particulier, les relevés du livret d'épargne ne portent pas trace de retrait d'argent liquide, tandis que les relevés du compte ouvert au Crédit Agricole au nom de M. A... font certes état de retraits mais aucune correspondance ne peut être établie entre ces retraits et les sommes figurant au crédit du compte courant d'associé et que les bordereaux de retrait en espèces du compte ouvert au Crédit du Nord au nom de la ... n'attestent que des retraits d'espèces effectués sur ce compte et ne peuvent établir l'existence d'avances effectuées par M. A... à la société. Par suite, le moyen doit être écarté.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge des impositions demeurant en litige. Par voie de conséquence, les conclusions qu'il présente sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience publique du 29 juin 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Christian Heu, président de chambre,

- M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 août 2023.

Le président, rapporteur,

M. SauveplaneLe président de chambre,

C. Heu

La greffière,

N. Roméro

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière,

Nathalie Roméro

N°22DA00080 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA00080
Date de la décision : 17/08/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Mathieu Sauveplane
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SELARL HORRIE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 27/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-08-17;22da00080 ?
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