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12/01/2023 | FRANCE | N°22DA01263

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 12 janvier 2023, 22DA01263


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler la décision du 3 novembre 2017 par laquelle l'inspecteur du travail en charge de l'unité de contrôle n° 1 de l'unité départementale de l'Aisne a délivré à la société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) Graves-Randoux, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Soficable, son employeur, l'autorisation de le licencier pour motif économique, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat une so

mme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler la décision du 3 novembre 2017 par laquelle l'inspecteur du travail en charge de l'unité de contrôle n° 1 de l'unité départementale de l'Aisne a délivré à la société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) Graves-Randoux, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Soficable, son employeur, l'autorisation de le licencier pour motif économique, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1703543 du 21 mai 2019, le tribunal administratif d'Amiens a, d'une part, annulé la décision du 3 novembre 2017 autorisant le licenciement de M. C..., d'autre part, mis à la charge de l'Etat le versement à M. C... de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour avant renvoi :

Par une requête, enregistrée le 9 juillet 2019, la SELARL Grave-Randoux, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Soficable, représentée par Me Mangel, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif d'Amiens ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'obligation de reclassement de M. C... a été respectée dès lors qu'elle justifie avoir recherché les postes disponibles au sein des entreprises du groupe Cablysis ainsi que des postes à l'extérieur du groupe ;

- les autres moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à M. C..., représenté par Me Brun, lequel n'a pas produit de mémoire.

La requête a été communiquée à la ministre du travail, laquelle n'a pas produit d'observations.

Par une ordonnance n° 19DA01572 du 23 septembre 2020, la présidente de la 3ème chambre de la cour administrative d'appel de Douai a rejeté la requête de la SELARL Grave-Randoux.

Par une décision n° 446792 du 14 juin 2022, le Conseil d'Etat a annulé l'ordonnance du 23 septembre 2020 de la présidente de la 3ème chambre de la cour administrative d'appel de Douai et renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Douai.

Procédure devant la cour après renvoi :

Par un mémoire, enregistré le 27 juillet 2022, la SELARL Evolution, nouvelle dénomination de la SELARL Grave-Randoux, mandataire judiciaire agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Soficable, représentée par Me Mangel, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 21 mai 2019 du tribunal administratif d'Amiens ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif d'Amiens ;

3°) de mettre à la charge de M. C... la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le respect du délai de 15 jours prévu à l'article L. 3253-8 du code de travail ne dispense pas le mandataire-liquidateur de l'obligation de procéder à la recherche de reclassement ; toutefois, le juge doit tenir compte de la brièveté de ce délai pour apprécier le respect de l'obligation légale de reclassement incombant au liquidateur judiciaire ;

- l'inspecteur du travail a pu exercer son contrôle et rendre sa décision sur la base des mandats fondant la protection de M. C... ;

- l'obligation de reclassement de M. C... a été respectée et la procédure de licenciement économique collectif menée par le liquidateur judiciaire n'est entachée d'aucune irrégularité.

Par un mémoire, enregistré le 23 septembre 2022, M. C..., représenté par Me Felix, demande à la cour :

1°) de le recevoir en sa demande et de le déclarer bien-fondé ;

2°) d'ordonner le rabat de l'ordonnance de clôture du 21 septembre 2022 ;

Par une ordonnance du 13 octobre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 30 novembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code du travail ;

- l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Sauveplane, président assesseur,

- les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 22 septembre 2017, le tribunal de commerce de Saint-Quentin a prononcé la liquidation judiciaire de la société Soficable, qui appartenait au groupe Cablysis, spécialisé dans la réalisation de faisceaux électriques et d'ensembles électriques et électroniques. La société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) Graves-Randoux, désignée par ce même jugement en qualité de liquidateur judiciaire de la société Soficable, a demandé en cette qualité le 13 octobre 2017 à être autorisée à licencier pour motif économique M. A... C..., représentant de section syndicale, candidat aux élections des représentants du personnel et exerçant le mandat de représentant des salariés dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire de la société. Par une décision du 3 novembre 2017, l'inspecteur du travail en charge de l'unité de contrôle n° 1 de l'unité départementale de l'Aisne a délivré au liquidateur judiciaire l'autorisation de licencier M. C... pour motif économique. Le tribunal administratif d'Amiens, par un jugement du 21 mai 2019, a annulé la décision du 3 novembre 2017 autorisant le licenciement de M. C.... La SELARL Evolution, nouvelle dénomination de la SELARL Grave-Randoux, mandataire judiciaire agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Soficable, demande l'annulation de ce jugement et le rejet de la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif d'Amiens.

2. Aux termes de l'article L. 1233-4 du code du travail : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel. / (...) / L'employeur adresse de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ou diffuse par tout moyen une liste des postes disponibles à l'ensemble des salariés, dans des conditions précisées par décret. / Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises. ".

3. Pour apprécier si l'employeur a satisfait à son obligation de recherche de reclassement, l'autorité administrative doit s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, qu'il a procédé à une recherche sérieuse des possibilités de reclassement du salarié sur le territoire national ainsi que, pour autant que l'article L. 1233-4-1 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi du 6 août 2015 soit encore applicable, lorsque le salarié l'a demandé, hors du territoire national, d'une part, au sein de l'entreprise, d'autre part, dans les entreprises du groupe auquel elle appartient, dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent avec elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie de son personnel.

4. La SELARL Graves-Randoux, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Soficable a sollicité, par lettre circulaire du 26 septembre 2017, l'ensemble des entreprises du groupe Cablysis auquel la société Soficable appartenait, et notamment les sociétés Cablysis France et Barelec situées sur le territoire national. Ces courriers précisaient que devaient être communiquées dans les plus brefs délais au liquidateur judiciaire les offres de postes disponibles auprès de ces sociétés de manière écrite, précise et individualisée. La liste annexée à ces courriers mentionnait l'intitulé des emplois occupés par les salariés de la société Soficable. La circonstance que ce courrier ne comportait aucune précision quant aux caractéristiques de ces emplois, notamment quant à leur rémunération et à leurs conditions d'exercice, est, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, sans incidence sur le caractère suffisant de la recherche par la SELARL Graves-Randoux de reclassement.

5. Il ressort des pièces du dossier que la société Barelec a proposé, par lettre du 26 octobre 2017, deux offres de reclassement qui portaient, l'une, sur un poste de comptable à raison de huit heures par semaine, l'autre, sur un poste d'opérateur de production et que ces offres de reclassement ont été proposées à M. C.... Toutefois, ces deux offres, qui ne mentionnaient ni la rémunération proposée, ni le type de contrat envisagé, ne peuvent, en conséquence, être regardées comme des offres de reclassement précises, au sens des dispositions précitées de l'article L. 1233-4 du code du travail. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges, pour annuler la décision du 3 novembre 2017 de l'inspecteur du travail en charge de l'unité de contrôle n° 1 de l'unité départementale de l'Aisne, ont accueilli le moyen tiré de ce que le liquidateur judiciaire de la société Soficable n'avait pas satisfait à son obligation légale de reclassement.

6. Il résulte de ce qui précède que la SELARL Evolution, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Soficable, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision du 3 novembre 2017 de l'inspecteur du travail. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SELARL Evolution est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) Evolution, à M. A... C... et au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.

Copie en sera transmise à la direction régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarité Hauts de France.

Délibéré après l'audience publique du 15 décembre 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Christian Heu, président de chambre,

- M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur,

- M. D... B..., premier-conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 janvier 2023.

Le président, rapporteur,

Signé : M. Sauveplane Le président de chambre,

Signé : C. Heu

La greffière,

Signé : S. Pinto Carvalho

La République mande et ordonne au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière,

Suzanne Pinto Carvalho

N°22DA01263 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA01263
Date de la décision : 12/01/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Mathieu Sauveplane
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : IFAC AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-01-12;22da01263 ?
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