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27/10/2022 | FRANCE | N°21DA00381

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 27 octobre 2022, 21DA00381


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société d'exercice libéral par actions simplifiée (SELAS) Pharmacie de Ferrières a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014.

Par un jugement n° 1804539 du 15 décembre 2020, le tribunal admi

nistratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société d'exercice libéral par actions simplifiée (SELAS) Pharmacie de Ferrières a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014.

Par un jugement n° 1804539 du 15 décembre 2020, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 février 2021, et un mémoire, enregistré le 22 septembre 2021, qui n'a pas été communiqué, la SELAS Pharmacie de Ferrières, représentée par Me Laleouse, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a justifié la réalité des prestations de management commercial réalisées pour son compte par la société Pharmacie de la Grande Poste ; les charges de sous-traitance ne constituent donc pas un acte anormal de gestion ;

- la majoration de 40 % appliquée sur ce chef de redressement est injustifiée ;

- c'est à tort que le vérificateur a retenu la période 2009 à 2014 pour analyser l'évolution économique de l'entreprise ; l'analyse doit être effectuée à compter de l'année 2004 au regard des chiffres ayant déterminé le prix d'acquisition du fonds de commerce en 2006 ;

- la constitution de provision pour dépréciation était justifiée par l'analyse des indices qui ont montré une dépréciation significative de la valeur du fonds de commerce par rapport à son prix d'acquisition.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 août 2021, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SELAS Pharmacie de Ferrières ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 19 janvier 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 28 février 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Sauveplane, président assesseur,

- les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SELAS Pharmacie de Ferrières, qui exploite une officine de pharmacie à Gournay-en-Bray (Seine-Maritime), a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration l'a assujettie, en suivant la procédure de rectification contradictoire, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des années 2013 et 2014 et a rappelé des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1e janvier 2013 au 31 décembre 2014. Elle relève appel du jugement du 15 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a ainsi été assujettie au titre des années 2013 et 2014 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014.

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

En ce qui concerne les charges de sous-traitance :

2. Il résulte des mentions de la proposition de rectification adressée le 21 juillet 2016 à la SELAS Pharmacie de Ferrières que l'administration a refusé d'admettre en charges déductibles du bénéfice imposable de cette société deux factures, d'un montant de 60 000 euros au titre de l'exercice 2013 et 80 000 euros au titre de l'exercice 2014, émises par la SELAS Pharmacie de la Grande Poste à Lyon en exécution de deux contrats de prestation de services conclus avec cette dernière et par lesquels la SELAS Pharmacie de Ferrières lui a confié une mission de prestation de conseils de mise en place des procédures de commande, logistique et informatique, de mise en place de fiches de conseils, de mise en place, organisation et affichage des promotions et de journées d'animation.

3. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable pour la détermination de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature (...) ". Si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.

4. Pour justifier la réalité des prestations confiées à la SELAS Pharmacie de la Grande Poste, la société requérante produit trois documents à l'en-tête de la Pharmacie de la Grande Poste intitulés " procédures commandes ", " procédure DASRI " et " procédures animation ". Toutefois ces documents, rédigés en termes très généraux, ne comportent aucune référence à la pharmacie de Ferrières ni aucune analyse critique des méthodes et pratiques de la pharmacie de Ferrières, et se bornent à décrire les pratiques en vigueur au sein de la SELAS Pharmacie de la Grande Poste. De surcroit, ces documents sont datés du 6 mars et 13 juin 2013 alors que le contrat de prestation de services signé le 31 octobre 2013 stipule expressément que la mission débute à la signature du contrat. Par ailleurs, l'administration fait valoir que la SELAS Pharmacie de la Grande Poste est actionnaire, depuis le 26 avril 2013, à hauteur de 95 % du capital social, de la SELAS Pharmacie de Ferrières, que les missions confiées au prestataire de service correspondent à des compétences qui ne font pas défaut à la SELAS Pharmacie de Ferrières, cette dernière employant, outre sa gérante, deux autres pharmaciens salariés. L'administration fait également valoir qu'aucun frais de déplacement n'a été constaté en comptabilité alors même que les contrats prévoyaient un remboursement des frais de déplacements. Si la SELAS Pharmacie de Ferrières a fourni des billets de train comme justificatif des déplacements allégués du gérant de la SELAS Pharmacie de la Grande Poste et des réunions au cours des opérations de vérification de comptabilité, ces billets n'étaient pas nominatifs et ne correspondaient pas aux dates des visites supposées du gérant le 26 novembre 2013, le 10 novembre 2014 et les 11, 12, 18 et 19 décembre 2014. Enfin, les comptes rendus de réunion, sans date certaine, se bornent à rappeler les obligations légales des pharmaciens et à dresser une liste de conseils de bon sens tels que : " ne pas faire crédit, être souriant et regarder et dire bonjour aux clients, ne pas sur-stocker et faire attention à l'étiquetage des prix ". Dès lors, la SELAS Pharmacie de Ferrières ne peut être regardée comme apportant la preuve de l'existence et la valeur de la contrepartie des deux factures, d'un montant de 60 000 euros au titre de l'exercice 2013 et de 80 000 euros au titre de l'exercice 2014, émises par la SELAS Pharmacie de la Grande Poste en exécution de deux contrats de prestation de services. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause la déductibilité de ces charges du bénéfice imposable de la SELAS Pharmacie de Ferrières.

En ce qui concerne les provisions pour dépréciation du fonds de commerce :

5. Les impositions supplémentaires ayant été établies selon la procédure de redressement contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, la preuve du bien fondé de celles-ci incombe à l'administration. Toutefois, il incombe à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de ses prétentions et les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. S'agissant d'une rectification portant sur une écriture comptable de dépréciation, il appartient au contribuable de justifier non seulement du montant de la dépréciation, mais de la correction de son inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de sa déductibilité.

6. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / (...) / 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice. (...) ". Aux termes de l'article 38 sexies de l'annexe III au code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " La dépréciation des immobilisations qui ne se déprécient pas de manière irréversible, notamment les terrains, les fonds de commerce, les titres de participation, donnent lieu à la constitution de provisions dans les conditions prévues au 5° du I de l'article 39 du code général des impôts ".

7. Il résulte de ces dispositions qu'une entreprise qui constate, par suite d'événements en cours à la clôture de l'exercice, une dépréciation non définitive d'un élément de son actif immobilisé, peut, alors même que celui-ci est amortissable, constituer une provision dont le montant ne peut excéder, à la clôture de l'exercice, la différence entre la valeur nette comptable et la valeur probable de réalisation de l'élément dont il s'agit, à la condition notamment que le mode de calcul de la provision soit propre à exprimer avec une approximation suffisante le montant probable de cette dépréciation.

8. Pour les exercices ouverts depuis le 1er janvier 2005, le plan comptable général et notamment son article 322-5 impose aux entreprises d'apprécier, à chaque clôture des comptes et à chaque situation intermédiaire, s'il existe un indice quelconque montrant qu'un ou plusieurs de leurs actifs ont pu perdre de leur valeur. Lorsqu'un tel indice existe, un test de dépréciation consistant à comparer la valeur nette du bien considéré et sa valeur actuelle doit être effectué afin de confirmer ou non la perte de valeur. En présence d'une telle perte de valeur, l'entreprise peut, le cas échéant, déprécier l'actif concerné en fonction de sa valeur actuelle.

9. Il résulte des mentions de la proposition de rectification adressée le 21 juillet 2016 à la SELAS Pharmacie de Ferrières que le fonds de commerce de pharmacie d'officine exploité par cette société a été acquis par la SELAS Pharmacie de Ferrières le 20 avril 2006 pour un montant de 2 090 000 euros au titre des éléments incorporels. La société a commencé à comptabiliser des dotations pour dépréciation du fonds de commerce à compter de l'exercice 2010, jusqu'à atteindre un montant cumulé de 420 000 euros en 2014, soit 20 % de la valeur immobilisée du fonds de commerce. Elle a notamment comptabilisé deux provisions pour dépréciation de son fonds de commerce, pour un montant de 40 000 euros au titre de l'exercice 2013 et de 30 000 euros au titre de l'exercice 2014, et a constaté à due concurrence une diminution de la valeur comptable du fonds de commerce. Pour calculer le montant des provisions, la société s'est fondée sur l'évolution de son chiffre d'affaires et sur l'indice Interfimo basé sur l'évolution des prix de cession d'officine en pourcentage du chiffre d'affaires, un taux de 85 % ayant ainsi été appliqué pour déterminer la valeur du fonds de commerce à la clôture des exercices 2013 et 2014.

10. L'administration a refusé d'admettre en déduction du bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés ces deux dotations pour dépréciation du fonds de commerce au motif que la société s'était limitée à appliquer à l'évolution de son chiffre d'affaires un indice statistique qui ne lui est pas propre alors que le chiffre d'affaires était stable entre 2009 et 2013, seul un repli de 9 % pouvant être constaté en 2014, et que le résultat comptable retraité des provisions montrait une augmentation de 31 % entre 2010 et 2014 ainsi qu'une augmentation de la marge nette retraitée. L'administration a également constaté que ni le coefficient de bénéfice brut (chiffre d'affaires HT/achats revendus HT) ni le rapport entre le chiffre d'affaires et les salariés ne traduisait de baisse de rentabilité de la société. Pour ces mêmes motifs, le vérificateur a réintégré le montant des provisions ainsi comptabilisées par la SELAS Pharmacie de Ferrières au cours des exercices 2010 à 2012 à hauteur de 350 000 euros.

11. En premier lieu, la SELAS Pharmacie de Ferrières soutient que l'analyse de la situation économique qui était la sienne devait être effectuée à partir des données économiques de l'exercice 2004. Toutefois, ainsi qu'il a été dit, le fonds de commerce ayant été acquis en 2006, l'analyse de l'évolution de la rentabilité économique ne pouvait en aucun cas remonter aux exercices précédents l'acquisition. De surcroit, par ce moyen, la société requérante ne justifie pas, alors que la charge de la preuve lui incombe, ni du montant de la dépréciation ni de la correction de son inscription en comptabilité. Par suite, le moyen doit être écarté.

12. En second lieu, la société requérante présente un tableau retraçant l'évolution, de 2004 à 2016, des indicateurs économiques, pour conclure que l'analyse de ce tableau permet, selon elle, de constater une dépréciation de la valeur du fonds de commerce par rapport à son prix d'acquisition. Toutefois, pour conclure à l'existence d'une diminution de la valeur du fonds de commerce, la société s'est bornée à appliquer à l'évolution de son chiffre d'affaires un pourcentage de l'indice Interfimo. Or, si l'évolution à la baisse de cet indice basé sur l'évolution des prix de cession des officines de pharmacie peut constituer un indice pertinent de la perte de valeur du fonds de commerce, la société ne saurait se limiter à appliquer un tel indice à son chiffre d'affaires pour calculer le montant de la provision pour dépréciation. Il lui revenait, en plus, de pratiquer un test de dépréciation consistant à comparer la valeur nette du bien considéré et sa valeur actuelle. Et l'évolution du chiffre d'affaires ne peut constituer, à lui seul, un test de dépréciation du fonds de commerce, en l'absence d'autres indicateurs économiques corroborant la baisse de rentabilité économique de la société. En l'espèce, si le chiffre d'affaires de la SELAS Pharmacie de Ferrières a subi une baisse entre 2006 et 2014, passant de 2 500 169 euros à 2 199 837 euros, le résultat fiscal retraité, après neutralisation des provisions litigieuses, a été porté de 60 542 euros en 2006 à 119 064 euros en 2010 et 161 392 euros en 2014. La marge nette retraitée a augmenté, quant à elle, de 2,42 euros en 2006 à 5,62 euros en 2010 et 7,33 euros en 2014. L'excédent brut d'exploitation retraité a augmenté de 273 169 euros en 2006 à 283 244 euros en 2014. Dès lors, aucune dégradation de la rentabilité économique ne peut être constatée de 2006, année de l'acquisition du fonds de commerce, à la période 2010-2014 de constitution des provisions. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause l'ensemble des provisions constituées depuis 2014 par la SELAS Pharmacie de Ferrières pour dépréciation du fonds de commerce.

En ce qui concerne le rappel de taxe sur la valeur ajoutée :

13. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. / (...) / II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : / a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures ; / (...) ". Aux termes du 2 du IV de l'article 206 de l'annexe II au même code : " Le coefficient d'admission est nul dans les cas suivants : / 1° Lorsque le bien ou le service est utilisé par l'assujetti à plus de 90 % à des fins étrangères à son entreprise ; / (...) ".

14. L'administration a par ailleurs remis en cause la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux factures émises par la SELAS Pharmacie de la Grande Poste au motif que la SELAS Pharmacie de Ferrières n'ayant pas justifié ces charges, celles-ci n'ont pas été exposées dans l'intérêt direct de l'exploitation. En conséquence d'un coefficient d'admission nul, la taxe sur la valeur ajoutée grevant ces factures n'était pas déductible et l'administration a rappelé la taxe sur la valeur ajoutée correspondante.

15. La société requérante ne conteste pas la remise en cause de la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée par des moyens autres que ceux mentionnés au point 4. Or, dans les circonstances de l'espèce, les charges en cause ne peuvent être regardées comme ayant été engagées pour les besoins de l'exploitation. C'est donc à bon droit que l'administration a remis en cause la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à ces factures.

En ce qui concerne la majoration de 40 % appliquée au chef de redressement afférent au redressement portant sur les charges de sous-traitance :

16. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ".

17. Pour justifier l'application de la majoration prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts aux droits supplémentaires procédant du rehaussement, en matière d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée, à raison du rejet des charges de sous-traitance, l'administration a relevé, dans la proposition de rectification adressée le 21 juillet 2016 à la SELAS Pharmacie de Ferrières, qu'alors qu'aucune pièce probante n'avait été produite quant à la réalité des prestations de service en cause et qu'aucune justification de ce que ces charges avaient été engagées dans l'intérêt de l'exploitation n'avait été apportée, la SELAS Pharmacie de Ferrières avait nécessairement connaissance de ces éléments et que ces manquements, du fait de leur nature et de leur importance, excédaient le cadre strict de l'erreur ou de l'omission mais permettaient de caractériser l'intention d'éluder l'impôt. Par suite, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'intention délibérée de la SELAS Pharmacie de Ferrières de se soustraire au paiement de l'impôt dû, justifiant l'application de la majoration de 40 % pour manquement délibéré.

18. Il résulte de tout ce qui précède que la SELAS Pharmacie de Ferrières n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions en litige.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

19. L'Etat n'étant pas partie perdante à l'instance, les conclusions de la SELAS Pharmacie de Ferrières tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SELAS Pharmacie de Ferrières est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SELAS Pharmacie de Ferrières et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience publique 13 octobre 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Christian Heu, président de chambre,

- M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur,

- M. Bertrand Ballard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022.

Le président, rapporteur,

Signé : M. SauveplaneLe président de chambre,

Signé : C. Heu

La greffière,

Signé : N. Roméro

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière,

Nathalie Roméro

N°21DA00381 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21DA00381
Date de la décision : 27/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Mathieu Sauveplane
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : IDEOJ AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-10-27;21da00381 ?
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