Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la décision du 8 novembre 2018 par laquelle le directeur des ressources humaines du centre hospitalier universitaire de Rouen a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie, d'enjoindre au centre hospitalier de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie, dans un délai de deux mois à compter du jugement à intervenir ou subsidiairement de consulter un médecin agréé dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir, le tout sous astreinte de 150 euros par jour de retard et de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Rouen la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1900051 du 4 mars 2021, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 3 mai 2021, Mme A..., représentée par Me Hervé Suxe, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de faire droit à ses demandes de première instance ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Rouen la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision contestée a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière, la commission de réforme ayant été irrégulièrement composée, en l'absence d'un médecin spécialisé en psychiatrie, ce qui l'a privée d'une garantie et a nécessairement eu une influence sur le sens de la décision ;
- elle est entachée d'une erreur de droit, le directeur des ressources humaines du centre hospitalier s'étant cru lié par l'avis de la commission de réforme ;
- elle est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors que sont établis la lente dégradation de son état de santé psychique depuis l'accident de service subi en 2014 et le refus obstiné de sa hiérarchie de faire droit à ses demandes d'aménagement de son temps de travail.
Par un mémoire, enregistré le 15 juin 2021, le centre hospitalier universitaire de Rouen, représenté par Me Violaine Lacroix, conclut au rejet de la requête et demande qu'il soit mis à la charge de cette dernière la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par Mme A... n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- l'arrêté interministériel du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Anne Khater, première conseillère,
- les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public,
- et les observations de Me Hervé Suxe, représentant Mme A... et de Me Violaine Lacroix, représentant le centre hospitalier universitaire de Rouen.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... A..., née le 15 janvier 1974, infirmière diplômée d'État, a été recrutée par le centre hospitalier universitaire de Rouen le 16 décembre 1996, titularisée le 27 février 1998 et affectée au service d'aide médicale urgente, de nuit, à compter de janvier 2005. Le 4 mai 2014, alors qu'elle était enceinte de son quatrième enfant, Mme A... a subi un accident de la circulation à bord du véhicule d'intervention du service mobile d'urgence et de réanimation. A la suite de cet accident, elle a été placée en arrêt de maladie imputable au service du 9 au 22 mai 2014 puis en congé de maternité en raison de la naissance de son quatrième enfant. Du 23 février au 21 mars 2015, Mme A... a été placée en congé de maladie en raison des suites de son accouchement pathologique. A compter du 21 mars 2015, son congé de maladie a été poursuivi, cette fois en raison d'un état anxio-dépressif réactionnel ayant ensuite justifié un congé de longue maladie renouvelé jusqu'au 22 février 2016 et transformé en congé de longue durée renouvelé jusqu'au 22 novembre 2017. Entre-temps, le 14 octobre 2017, le médecin généraliste de Mme A... a formé une demande de reconnaissance d'imputabilité au service de ce syndrome anxio-dépressif. Malgré deux expertises médicales des 28 février 2018, et 2 août 2018, concluant à l'imputabilité au service de la maladie dont souffre Mme A..., la commission de réforme a émis un avis défavorable à cette reconnaissance lors de sa séance du 25 octobre 2018, au motif de " l'absence d'éléments prouvant un dysfonctionnement de l'employeur ". Par une décision du 8 novembre 2018, le directeur des ressources humaines du centre hospitalier universitaire de Rouen a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie de Mme A.... Par un jugement du 4 mars 2021, le tribunal administratif de Rouen a rejeté la demande de Mme A... tendant à l'annulation de cette décision. Mme A... relève appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents publics de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière prévoit que la commission de réforme comprend, notamment, deux praticiens de médecine générale auxquels est adjoint, s'il y a lieu, un médecin spécialiste qui participe aux débats mais ne prend pas part aux votes. En l'espèce, il ne résulte pas des éléments du dossier que les troubles anxio-dépressifs dont souffrait Mme A... requéraient nécessairement, pour l'examen de l'imputabilité au service de sa pathologie qui reposait au demeurant essentiellement sur l'appréciation de ses conditions de travail, le concours d'un médecin psychiatre afin d'éclairer la commission de réforme. Au surplus, la commission de réforme disposait, s'agissant des considérations médicales, de deux expertises établies par deux médecins psychiatres. Il s'ensuit que la circonstance que cette commission ait siégé sans la présence d'un tel médecin spécialiste est sans incidence sur la régularité de la décision contestée. Ainsi, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que l'avis formulé par cette instance l'a été à l'issue d'une procédure irrégulière.
3. En deuxième lieu, la seule circonstance que le directeur des ressources humaines s'est approprié l'avis de la commission de réforme n'implique pas qu'il se serait estimé tenu d'en reprendre le sens, méconnaissant ainsi sa propre compétence. Le moyen tiré de l'erreur de droit doit donc être écarté.
4. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, dans sa rédaction applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité à droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de la maladie ou de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ". Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.
5. Pour justifier du lien direct entre son état dépressif et ses conditions de travail, Mme A... fait valoir qu'il est la conséquence du refus obstiné de sa hiérarchie à faire droit à ses demandes d'aménagement de son temps de travail depuis l'année 2014. A cet égard, il ressort des pièces du dossier que dès le 19 mars 2014, en prévision de la fin de son congé de maternité, Mme A... a demandé à bénéficier d'un temps partiel de 80 % sur son poste, demande à laquelle le centre hospitalier a fait droit le 17 octobre 2014, pour une durée de six mois renouvelables. Mme A... a ensuite demandé à bénéficier de ce temps partiel pendant une durée de trois ans, ce que le centre hospitalier lui a refusé mais en lui proposant un maintien à 80 % au-delà de six mois sur une autre affectation. Le 28 janvier 2015, Mme A... a présenté une nouvelle demande tendant à obtenir un temps partiel de 50 % pour une durée de trois ans sur son poste au service mobile d'urgence et de réanimation, demande à laquelle il n'a pas été donné de réponse, Mme A... ayant ensuite été informée qu'en raison de son congé de maladie à compter du 23 février 2015, elle avait été remplacée sur son poste au service mobile d'urgence et de réanimation et qu'elle était désormais affectée à l'unité polaire de remplacement sur un poste à 80 %. S'il ressort des expertises médicales versées au dossier que le syndrome dépressif dont Mme A... soutient qu'il est imputable au service trouve son origine dans la contrariété ressentie par l'intéressée en raison de la non satisfaction de ses demandes de travail à temps partiel dans les conditions qu'elle demandait, ces décisions ont été prises dans l'intérêt du service dans le cadre de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique, sans caractériser des conditions de travail pathogènes de nature à susciter le développement de la maladie anxio-dépressive de l'intéressée. Dès lors, c'est sans commettre d'erreur d'appréciation que le centre hospitalier universitaire de Rouen a rejeté la demande de reconnaissance d'imputabilité au service de la pathologie dont souffre Mme A....
6. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions d'appel de Mme A... doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dont elles sont assorties. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... la somme demandée par le centre hospitalier universitaire de Rouen, au même titre.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier universitaire de Rouen au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au centre hospitalier universitaire de Rouen.
Délibéré après l'audience publique du 26 avril 2022, à laquelle siégeaient :
- Mme Anne Seulin, présidente de chambre,
- Mme Aurélie Chauvin, présidente-assesseure,
- Mme Anne Khater, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 mai 2022.
La rapporteure,
Signé : A. KhaterLa présidente de chambre,
Signé : A. Seulin
La greffière,
Signé : A.S. Villette
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
La greffière,
Anne-Sophie Villette
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N°21DA00963