Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2010 à 2012.
Par ordonnance du 29 septembre 2016, le premier vice-président du tribunal administratif de Montreuil a transmis le dossier de la demande de M. B... au tribunal administratif d'Amiens.
Par un jugement n° 1603079 du 6 juin 2019, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 31 juillet 2019 et 5 novembre 2021, M. B..., représenté par Me Garnier, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de renvoyer l'affaire au tribunal administratif de Montreuil territorialement compétent ou, à défaut, de renvoyer l'affaire devant le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat pour régler la question de compétence territoriale ;
3°) de lui accorder la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2010 à 2012 ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 14 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal administratif d'Amiens était territorialement incompétent ;
- la procédure d'imposition est irrégulière en raison de l'absence de débat oral et contradictoire au cours des opérations de contrôle ;
- il est domicilié en Belgique depuis 2006 ; il n'était pas résident fiscal en France au titre des années 2011 et 2012 ;
- l'arrêt de la Cour d'appel d'Amiens en date du 19 juin 2014 est revêtu de l'autorité de la chose jugée ;
- la priorité du droit interne doit s'effacer dès lors que la convention fiscale franco-belge définit la résidence fiscale de façon autonome et sans renvoi aux législations nationales ; conformément à la convention fiscale franco-belge, il est résident fiscal en Belgique ;
- le quantum de l'imposition est infondé ; en effet, il était marié du 28 avril 2010 au 27 décembre 2012 et trois filles vivaient avec lui en Belgique de sorte que le quotient familial ne peut être de 1,5 mais de 2 parts ;
- les pénalités ne sont pas motivées.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 novembre 2019, et par un mémoire, enregistré le 14 janvier 2022, qui n'a pas été communiqué, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient, sous réserve de ce qu'il s'en remet à la sagesse de la cour quant au bien-fondé du moyen tiré par M. B... de l'incompétence territoriale du tribunal administratif d'Amiens, que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 19 janvier 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 28 février 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention conclue entre la France et la Belgique en vue d'éviter les doubles impositions et d'établir des règles d'assistance administrative et juridique réciproque en matière d'impôts sur les revenus, signée le 10 mars 1964 ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Sauveplane, président assesseur,
- les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle à l'issue duquel l'administration a remis en cause sa domiciliation en Belgique et a estimé qu'il était résident fiscal en France pendant les années 2011 et 2012. En conséquence, l'administration l'a assujetti, en droits et pénalités, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2011 et 2012, en suivant la procédure de redressement contradictoire. M. B... demande l'annulation du jugement du 6 juin 2019 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.
Sur la compétence territoriale du tribunal administratif d'Amiens :
2. Par ordonnance du 29 septembre 2016, le premier vice-président du tribunal administratif de Montreuil a transmis au tribunal administratif d'Amiens le dossier de la demande de M. B... tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2011 et 2012. Par courrier du 6 octobre 2016 adressé au président du tribunal administratif de Montreuil, M. B... a contesté cette ordonnance de renvoi de sa demande au tribunal administratif d'Amiens. Par courrier du 18 octobre 2016, il a demandé au tribunal administratif d'Amiens de se déclarer incompétent et de renvoyer au tribunal administratif de Montreuil le dossier de sa demande.
3. Aux termes de l'article L. 312-1 du code de justice administrative : " Lorsqu'il n'en est pas disposé autrement par les dispositions de la section 2 du présent chapitre ou par un texte spécial, le tribunal administratif territorialement compétent est celui dans le ressort duquel a légalement son siège l'autorité qui, soit en vertu de son pouvoir propre, soit par délégation, a pris la décision attaquée (...) / Sous les mêmes réserves en cas de recours préalable à celui qui a été introduit devant le tribunal administratif, la décision à retenir pour déterminer la compétence territoriale est celle qui a fait l'objet du recours administratif (...) ".
4. Il résulte de ces dispositions que le tribunal administratif territorialement compétent est celui dans le ressort duquel a légalement son siège l'autorité qui, soit en vertu de son pouvoir propre, soit par délégation, a pris la décision attaquée. Le même texte précise qu'en cas de recours préalable à celui introduit devant le tribunal administratif, la décision à retenir pour déterminer la compétence territoriale est celle qui a fait l'objet du recours préalable et non la décision prise sur recours préalable.
5. Il résulte de l'instruction que les impositions en litige ont été établies par le service des impôts des non-résidents situé à Noisy-le-Grand dans le département de la Seine-Saint-Denis, lequel se situe dans le ressort du tribunal administratif de Montreuil. L'avis d'imposition supplémentaire émis par le service des impôts des non-résidents mentionne explicitement que le lieu d'imposition se situe à Noisy-le-Grand. Par suite, et alors même que le contrôle à l'issue duquel les impositions en litige ont été assignées à M. B... a été effectué par la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord, laquelle a statué par une décision du 7 juillet 2016 sur la réclamation préalable du contribuable, le tribunal administratif d'Amiens était, en application des dispositions précitées de l'article L. 312-1 du code de justice administrative, territorialement incompétent pour connaître de la demande de M. B... tendant à la décharge de ces impositions.
6. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens, qui n'était pas territorialement compétent pour connaître de sa demande, a statué sur sa demande. Dès lors, il y a lieu d'annuler ce jugement et de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Montreuil, territorialement compétent pour connaître de la demande de M. B....
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. B... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1603079 du 6 juin 2019 du tribunal administratif d'Amiens est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif d'Amiens est renvoyée au tribunal administratif de Montreuil.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'économie, des finances et de la relance et au président du tribunal administratif de Montreuil.
Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
Délibéré après l'audience publique du 31 mars 2022 à laquelle siégeaient :
- M. Christian Heu, président,
- M. Mathieu Sauveplane, président assesseur,
- M. Jean-François Papin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 mai 2022.
Le président, rapporteur,
Signé : M. SauveplaneLe président de chambre,
Signé : C. Heu
La greffière,
Signé : N. Roméro
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière,
Nathalie Roméro
N°19DA01803 2