Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) C... Avocats a demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2012, 2013 et 2014.
Par un jugement n°1701327 du 3 octobre 2019, le tribunal administratif d'Amiens a, d'une part, réduit la base de l'impôt sur les sociétés assignée à la SELARL C... Avocats d'un montant de 1 251,12 euros pour l'exercice clos en 2012, de 3 378,84 euros pour l'exercice clos en 2013 et de 3 382,20 euros pour l'exercice clos en 2014 et prononcé, dans cette mesure, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 à 2014, d'autre part, rejeté le surplus des conclusions de la demande de la SELARL C... Avocats.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 2 décembre 2019, 3 janvier 2020, 28 juillet 2020 et 9 août 2021, la SELARL C... Avocats, représentée par la SCP Croissant de Limerville Ortis, demande à la cour :
1°) d'annuler l'article 3 du jugement du 3 octobre 2019 du tribunal administratif d'Amiens ;
2°) de lui accorder la décharge, en droits et pénalités, des impositions demeurant en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Sauveplane, président assesseur,
- les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La SELARL C... Avocats a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, au titre des exercices clos en 2012, 2013 et 2014, à l'issue de laquelle l'administration a remis en cause le caractère déductible de certaines dépenses. En conséquence, l'administration l'a assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices concernés. Par un jugement du 3 octobre 2019, le tribunal administratif d'Amiens a, d'une part, réduit les bases de l'impôt sur les sociétés assignées à la SELARL C... Avocats de la somme de 1 251,12 euros pour l'exercice clos en 2012, de 3 378,84 euros pour l'exercice clos en 2013 et de 3 382,20 euros pour l'exercice clos en 2014 et, d'autre part, rejeté le surplus des conclusions de cette société. La SELARL C... Avocats relève appel, dans cette mesure, du jugement du 3 octobre 2019 du tribunal administratif d'Amiens. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut, par la voie de l'appel incident, à ce que la réduction des bases imposables de la SELARL C... Avocats à l'impôt sur les sociétés soit limitée à 1 492 euros au titre de l'exercice clos en 2013 et à 1 495 euros au titre de l'exercice clos en 2014.
Sur la régularité du jugement :
2. Pour écarter comme non fondé le moyen tiré de ce que les frais de déplacement remboursés par la SELARL C... Avocats constituent un complément de rémunération des co-gérants déductible des résultats imposables de la société sur le fondement de l'article 211 du code général des impôts, les premiers juges ont relevé que la SELARL C... Avocats ne produisait aucune pièce susceptible de justifier du montant, de la nature et du caractère déductible de ces remboursements de frais. Dès lors, les premiers juges ont suffisamment répondu au moyen, quelle que soit la pertinence de leur réponse, et n'ont pas entaché le jugement attaqué d'une insuffisance de motivation.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
3. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / (...) ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter, outre la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base des redressements, ceux des motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés qui sont nécessaires pour permettre au contribuable de formuler ses observations de manière utile.
4. En l'espèce, dans les deux propositions de rectification des 14 décembre 2015 et 16 mars 2016, l'administration a fondé l'absence de déductibilité des frais de déplacement et des cotisations facultatives dites " Madelin " sur la circonstance que ces dépenses présentaient un caractère personnel, au visa de l'article 39 du code général des impôts. Dans la réponse aux observations du contribuable du 2 juin 2016 l'administration a, pour la première fois, fait état du caractère d'avantages en nature de ces dépenses et de leur non déductibilité en raison de l'absence de comptabilisation conformément aux exigences des articles 54 bis et 54 quater du code général des impôts. Toutefois, ce faisant, l'administration s'est bornée à modifier les motifs du redressement sans opérer de substitution de base légale dès lors que le dernier motif retenu pour asseoir la rectification repose toujours sur l'absence de déductibilité de la dépense dont le fondement reste l'article 39 du code général des impôts. Dès lors, l'administration n'avait pas à adresser à la société requérante une nouvelle proposition de rectification. Par ailleurs, en refusant, dans les deux propositions de rectification des 14 décembre 2015 et 16 mars 2016, la déductibilité des frais de déplacement et cotisations facultatives dites " Madelin " en se fondant sur la circonstance que ces dépenses présentaient un caractère personnel pour l'application des dispositions de l'article 39 du code général des impôts, l'administration a suffisamment motivé ces propositions de rectification, quelle que soit la pertinence de cette motivation, et n'a pas méconnu l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ni privé la SELARL C... Avocats de la garantie de faire valoir utilement ses observations.
Sur le bien-fondé des impositions supplémentaires en litige :
En ce qui concerne les frais de déplacement :
5. Il résulte de l'instruction que, pour l'exercice clos en 2012, l'administration a refusé d'admettre en charges déductibles les frais de déplacement remboursés aux associés, Mme D... et M. B..., mais qu'elle a, en revanche, admis en déductibilité le remboursement des frais de déplacement de M. C... à hauteur de 9 615 euros. En ce qui concerne les exercices clos en 2013 et 2014, l'administration a refusé d'admettre le caractère déductible du remboursement, par la SELARL C... Avocats, des frais de déplacement de l'ensemble des associés.
6. Aux termes du I de l'article 211 du code général des impôts : " Dans les sociétés à responsabilité limitée n'ayant pas opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes (...) et dont les gérants sont majoritaires, (...) les traitements, remboursements forfaitaires de frais et toutes autres rémunérations sont, sous réserve des dispositions du 3 de l'article 39 et 211 bis, admis en déduction du bénéfice de la société pour l'établissement de l'impôt, à la condition que ces rémunérations correspondent à un travail effectif. / (...) ". Aux termes du second alinéa de l'article 54 bis du même code : " Ces mêmes contribuables doivent obligatoirement inscrire en comptabilité, sous une forme explicite, la nature et la valeur des avantages en nature accordés à leur personnel. ".
7. Il résulte des dispositions précitées qu'une société à responsabilité limitée, telle la SELARL C... Avocats, qui comptabilise indistinctement en frais généraux les avantages en nature accordés à son personnel, ne respecte pas les conditions posées par les dispositions de l'article 54 bis du code général des impôts pour la déduction de ces dépenses.
8. En l'espèce, il résulte de l'instruction que les remboursements de frais en litige ont été comptabilisés dans un compte 6251 de frais de déplacement. Cette comptabilisation ne respecte pas les exigences de l'article 54 bis du code général des impôts dans la mesure où elle ne fait pas explicitement apparaître le caractère d'avantage en nature de ces remboursements mais correspond à la comptabilisation d'un remboursement de frais de déplacement, lequel ne constitue pas un avantage en nature mais présente le caractère de frais généraux déductibles. Dès lors, c'est à bon droit que l'administration a estimé que cette comptabilisation ne respectait pas les exigences de l'article 54 bis du code général des impôts et refusé, pour ce motif, la déduction de ces charges de la base imposable de la SELARL C... Avocats à l'impôt sur les sociétés.
9. A supposer que la société requérante puisse être regardée comme se prévalant, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la réponse ministérielle à la question de M. A... publiée au Journal officiel de l'Assemblée nationale du 11 juin 1954 et de la réponse ministérielle à la question de M. E... publiée au Journal officiel de l'Assemblée nationale du 2 mai 1958, ces réponses ministérielles ne font toutefois pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle dont il est fait application par le présent arrêt.
En ce qui concerne les cotisations facultatives :
10. Aux termes du II de l'article 154 bis du code général des impôts : " Les cotisations versées aux régimes obligatoires complémentaires d'assurance vieillesse mentionnés au premier alinéa du I, pour la part de ces cotisations excédant la cotisation minimale obligatoire, et les cotisations ou primes mentionnées au deuxième alinéa du I sont déductibles : / 1° Pour l'assurance vieillesse, dans une limite égale au plus élevé des deux montants suivants : / a) 10 % de la fraction du bénéfice imposable retenu dans la limite de huit fois le montant annuel du plafond mentionné à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale, auxquels s'ajoutent 15 % supplémentaires sur la fraction de ce bénéfice comprise entre une fois et huit fois le montant annuel précité ; / b) Ou 10 % du montant annuel du plafond mentionné à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale. / Cette limite est réduite, le cas échéant, des sommes versées par l'entreprise au plan d'épargne pour la retraite collectif défini aux articles L. 3334-1 à L. 3334-16 du code du travail et exonérées en application du a du 18° de l'article 81 ; / 2° Pour la prévoyance, dans la limite d'un montant égal à la somme de 7 % du montant annuel du plafond mentionné à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale et de 3, 75 % du bénéfice imposable, sans que le total ainsi obtenu puisse excéder 3 % de huit fois le montant annuel du plafond précité ; / 3° Pour la perte d'emploi subie, dans une limite égale au plus élevé des deux montants suivants : / a) 1, 875 % du bénéfice imposable retenu dans la limite de huit fois le montant annuel du plafond mentionné à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale ; / b) Ou 2, 5 % du montant annuel du plafond mentionné à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale. / (...) ".
11. Il résulte de l'instruction que la SELARL C... Avocats a pris en charge les cotisations de prévoyance souscrites au bénéfice de ses associés pour un montant de 21 817 euros en 2012, de 18 357 euros en 2013 et de 18 495 euros en 2014. L'administration n'a admis qu'une fraction de ces dépenses au motif que le montant déduit par la société excédait les plafonds prévus au II de l'article 154 bis du code général des impôts. En conséquence, elle a estimé que la fraction non déductible constituait un avantage en nature et n'était pas déductible, faute d'une inscription explicite en comptabilité de cet avantage.
12. La SELARL C... Avocats, qui ne conteste pas le principe et l'application du plafond de déductibilité des cotisations prévu au II de l'article 154 bis du code général des impôts, soutient que, à l'instar des remboursements de frais de déplacement professionnel, la fraction excédant les plafonds prévus à l'article 154 bis du code général des impôts constitue un avantage en nature déductible sur le fondement de l'article 211 du code général des impôts. Toutefois, il résulte de l'instruction que tant la fraction déductible que la fraction non déductible de ces cotisations ont été comptabilisées dans un compte 646 de cotisations sociales personnelles de l'exploitant. Or, cette comptabilisation de la fraction non déductible dans un compte de frais généraux n'est pas conforme aux exigences de l'article 54 bis du code général des impôts dès lors qu'une telle comptabilisation dans un compte de cotisations sociales ne fait pas explicitement apparaître le caractère d'avantage en nature de la fraction non déductible de ces cotisations. Dès lors, c'est à bon droit que l'administration a estimé que cette comptabilisation ne respectait pas les exigences de l'article 54 bis du code général des impôts et refusé, pour ce motif, la déduction de ces charges de la base imposable à l'impôt sur les sociétés de la SELARL C... Avocats.
13. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 9, la société requérante ne peut se prévaloir ni de la réponse ministérielle à la question de M. A... ni de la réponse ministérielle à la question de M. E..., mentionnées à ce même point 9.
En ce qui concerne les cotisations versées au courtier " Alptis " :
14. L'administration a refusé d'admettre en charges déductibles des résultats de la SELARL C... Avocats les cotisations, pour un montant de 1 837 euros, versées à la société Alptis pour chacun des deux exercices 2013 et 2014, au motif que les justificatifs correspondant à ces cotisations n'avaient pas été produits devant le vérificateur.
15. Si la SELARL C... Avocats soutient que les cotisations versées au courtier " Alptis " présentent le caractère, non pas de cotisations correspondant à un contrat " Madelin ", mais de cotisations à un contrat d'assurance destiné, en cas d'activation, à rembourser à la société les frais généraux supportés par elle en cas d'arrêt maladie du gérant, et sont ainsi déductibles de ses résultats sur le fondement de l'article 39 du code général des impôts, il résulte de l'instruction que l'administration n'a pas remis en cause le principe de la déduction de ces cotisations, qu'elle a d'ailleurs admis au titre de l'exercice clos en 2012, mais a refusé leur déduction, faute de présentation de justificatifs correspondant à ces cotisations pour les exercices 2013 et 2014. Or, la société requérante ne justifie toujours pas, y compris au moyen d'un appel de cotisation de l'assureur, pour les années 2013 et 2014, du caractère déductible de ces sommes. Dès lors, c'est à bon droit que l'administration a rapporté aux bases imposables à l'impôt sur les sociétés de la SELARL C... Avocats la somme de 1 837 euros au titre des exercices clos en 2013 et en 2014.
En ce qui concerne la prime à payer :
16. La SELARL C... Avocats a comptabilisé, au 31 décembre 2014, une somme de 120 000 euros au débit du compte 6444 de rémunération du gérant au titre d'une prime à payer au gérant, M. C.... L'administration a remis en cause la déduction de cette charge au motif que la délibération de l'assemblée générale du 16 février 2015, qui a approuvé le principe de cette prime à payer, était postérieure à la clôture de l'exercice 2014. L'administration a également estimé que cette charge n'avait pas le caractère de dette certaine dans son principe, compte tenu des conditions suspensives, précisées dans la délibération de l'assemblée générale du 16 février 2015, mises à son paiement.
17. Si la SELARL C... Avocats fait valoir que cette prime avait un caractère certain, il résulte de l'instruction qu'elle a comptabilisé à ce titre une charge sur l'exercice 2014 alors que la délibération de l'assemblée générale décidant le versement de cette prime n'a été prise que le 16 février 2015, soit postérieurement à l'exercice de comptabilisation de la charge. Dès lors, l'administration était fondée, pour ce seul motif, à remettre en cause le caractère déductible de cette charge. En conséquence, le moyen tiré du caractère certain de la prime à payer, nonobstant l'incertitude quant aux conditions de son paiement subordonné à l'exigence d'un niveau minimal de trésorerie, est inopérant. Enfin, si la société requérante soutient, à titre subsidiaire, que cette charge aurait dû être comptabilisée à titre de provision également déductible, il est constant que la somme correspondante n'a pas fait l'objet d'une comptabilisation en qualité de provision pour charge alors que le 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts subordonne la déduction des provisions à la " condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice. " Dès lors, le moyen est également inopérant.
En ce qui concerne la facture d'avoir établie au nom de la société d'avocats Arcane Juris :
18. Il résulte de l'instruction que l'administration a constaté qu'un compte de tiers intitulé " clinique ophtalmologique " présentait un solde créditeur de 16 744 euros au 1er janvier 2012. La SELARL C... Avocats a indiqué, au cours du contrôle, que cette dette correspondait à une facture d'avoir émise par elle le 22 décembre 2011 au nom de la société d'avocats Arcane Juris. L'administration a alors exercé son droit de communication auprès de cette société, laquelle a indiqué ne pas avoir comptabilisé cette créance sur la SELARL C... Avocats et n'avoir effectué aucune démarche afin d'en obtenir le remboursement. L'administration a, en conséquence, remis en cause le caractère déductible de cette dette au motif que son existence n'était pas établie.
19. En se bornant à produire une correspondance en date du 2 décembre 2016 d'un ancien co-gérant de la société d'avocats Arcane Juris, parti en retraite, lequel se borne à évoquer un vague souvenir relatif à cet avoir, tout en admettant ne pas savoir quelle suite y avait été donnée, la SELARL C... Avocats n'établit ni l'existence de l'avoir détenu sur elle par la société d'avocats Arcane Juris ni son caractère déductible. Dès lors, c'est à bon droit que l'administration a rapporté cette somme aux bases imposables à l'impôt sur les sociétés de l'exercice 2012. Si la société requérante soutient, à titre subsidiaire, que la créance s'est prescrite le 22 décembre 2016 et qu'un produit taxable a été constaté en comptabilité sur l'exercice 2016, cette circonstance reste sans influence sur l'imposition en litige dès lors que l'exercice 2016 sur lequel a été constatée cette surimposition diffère de l'exercice 2012 sur lequel la dette a été comptabilisée puis remise en cause par l'administration. En conséquence, aucune compensation n'est possible.
Sur les pénalités :
20. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ".
21. L'administration a appliqué la majoration de 40 % pour manquement délibéré sur l'ensemble des rectifications. Pour justifier cette majoration, l'administration fait valoir, outre la qualité de société d'avocats spécialisés en droit fiscal et en droit des sociétés, que les frais de déplacement des co-gérants ont été inscrits en charges déductibles sur les trois exercices en litige alors que l'assemblée générale ne s'était pas prononcée sur de tels compléments de rémunération, et que la société ne pouvait ignorer le caractère occulte d'avantages en nature ainsi consentis et non-inscrits explicitement en comptabilité. De plus, l'administration fait également valoir que la société a inscrit au passif de son bilan, pendant trois exercices consécutifs, une dette dont elle ne pouvait ignorer le caractère non justifié, dès lors qu'elle correspond à un avoir dont le bénéficiaire, la société d'avocats Arcane Juris, n'a jamais eu connaissance. Enfin, l'administration fait valoir que les conditions d'octroi d'une prime de 120 000 euros en 2015 établissent clairement qu'elle n'était pas comptabilisable en 2014. Dans ces conditions, l'administration fiscale doit être regardée comme rapportant la preuve, qui lui incombe, de l'intention délibérée de la société de se soustraire, sur ces différents points, au paiement de l'impôt.
22. En revanche, l'administration ne peut être regardée comme apportant la preuve de l'intention délibérée, qui aurait été celle de la SELARL C... Avocats, d'éluder l'impôt s'agissant des cotisations versées au courtier " Alptis " qui n'ont pas été admises pour les exercices 2013 et 2014 au seul motif que les justificatifs correspondant à ces cotisations n'avaient pas été communiqués alors que la justification de la charge avait été produite pour l'exercice 2012 et que la déductibilité de cette cotisation avait alors été admise par l'administration. Dès lors, l'absence de production de la justification, qui peut résulter d'une perte de document, ne permet pas, dans les circonstances de l'espèce, de justifier la majoration appliquée à cette rectification. La SELARL C... Avocats est donc fondée à demander à être déchargée de la majoration de 40 % appliquée par l'administration aux droits y afférents.
23. Il résulte de tout ce qui précède que la SELARL C... Avocats est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge de la majoration de 40 %, prévue par le a. de l'article 1729 du code général des impôts, appliquée par l'administration au chef de redressement afférent à la réintégration dans ses résultats imposables des cotisations " Alptis " au titre des exercices clos en 2013 et 2014 et à demander, en conséquence, la réformation sur ce point du jugement attaqué.
Sur le recours du ministre :
24. Par l'article 1er du jugement du 3 octobre 2019, le tribunal administratif d'Amiens a réduit la base imposable à l'impôt sur les sociétés de la SELARL C... Avocats d'un montant de 1 251,12 euros pour l'exercice clos en 2012, de 3 378,84 euros pour l'exercice clos en 2013 et de 3 382,20 euros pour l'exercice clos en 2014.
25. S'agissant de l'exercice clos en 2012, il résulte de l'instruction qu'à la suite du dégrèvement prononcé le 24 mars 2017, aucun litige ne subsistait entre la SELARL C... Avocats et l'administration en ce qui concerne les cotisations versées par la société au titre de cet exercice dès lors que la totalité des cotisations d'assurance comptabilisées par la société à ce titre a été admise en déduction du résultat imposable à hauteur de 10 888 euros. Dès lors, le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, les premiers juges ont réduit la base imposable à l'impôt sur les sociétés de la somme de 1 251,12 euros au titre de l'exercice clos en 2012.
26. S'agissant des exercices clos en 2013 et 2014, il résulte de l'instruction que la SELARL C... Avocats a inscrit en charges déductibles des cotisations versées au groupe Apicil d'un montant de 3 138 euros pour ces deux exercices ainsi que des cotisations versées auprès de l'Association de prévoyance individuelle et collective pour un montant de 240,72 euros en 2013 et 244,08 euros en 2014. L'administration a admis la déductibilité de la somme de 1 887 euros dès le stade de la proposition de rectification mais a rejeté le surplus, soit 1 251 euros, au motif que ces versements n'étaient pas justifiés. Le ministre ne conteste pas la déductibilité des cotisations versées mais fait valoir que les premiers juges ont admis en déduction l'intégralité des sommes comptabilisées sans prendre en compte la somme de 1 887 euros déjà admise en déduction par l'administration dès la proposition de rectification du 16 mars 2016. Dès lors, le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a réduit les bases imposables à l'impôt sur les sociétés de la SELARL C... Avocats de la somme de 3 378,84 euros pour l'exercice clos en 2013 et de la somme de 3 382,20 euros pour l'exercice clos en 2014 et à demander que la réduction en base soit limitée à la somme de 1 492 euros au titre de l'exercice clos en 2013 et à la somme de 1 495 euros au titre de l'exercice clos en 2014.
27. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de remettre à la charge de la SELARL C... Avocats la différence entre les cotisations d'impôt sur les sociétés déchargées en exécution de l'article 1er du jugement du tribunal administratif d'Amiens et les cotisations d'impôt sur les sociétés résultant de la réduction en base telle qu'elle est définie au point 26 du présent arrêt.
Sur les conclusions de la SELARL C... Avocats tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
28. L'Etat n'étant pas partie perdante à l'instance, les conclusions de SELARL C... Avocats tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La SELARL C... Avocats est déchargée de la majoration de 40 % pour manquement délibéré appliquée par l'administration sur la rectification relative aux cotisations " Alptis " au titre des exercices 2013 et 2014.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la SELARL C... Avocats est rejeté.
Article 3 : La réduction des bases imposables à l'impôt sur les sociétés de la SELARL C... Avocats prononcée par l'article 1er du jugement du 3 octobre 2019 du tribunal administratif d'Amiens est limitée à 1 492 euros au titre de l'exercice clos en 2013 et à 1 495 euros au titre de l'exercice clos 2014.
Article 4 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés résultant de la différence entre la réduction en base prononcée à l'article 3 du présent arrêt et la réduction en base prononcée par l'article 1er du jugement du 3 octobre 2019 du tribunal administratif d'Amiens, sont remises à la charge de la SELARL C... Avocats.
Article 5 : L'article 1er du jugement du 3 octobre 2019 du tribunal administratif d'Amiens est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SELARL C... Avocats et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
N°19DA02635 2