Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... épouse D... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 12 juin 2020 par lequel le préfet du Nord lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure.
Par un jugement n°2005152 du 26 janvier 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 28 juin 2021, Mme A... B... épouse D..., représentée par Me Eve Thieffry, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 12 juin 2020 du préfet du Nord ;
3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer une carte de séjour temporaire, dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou à défaut de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir, sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Anne Seulin, présidente de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... épouse D..., ressortissante arménienne, née le 2 juillet 1957, est entrée en France le 17 juillet 2011 accompagnée de son époux et de leurs deux filles nées le 6 février 1980 et le 8 septembre 1981. Les époux ont sollicité leur admission au séjour au titre de l'asile. Par une décision du 18 janvier 2012, l'office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté leur demande et, par une décision du 31 octobre 2013, la Cour nationale du droit d'asile a confirmé ce rejet. Mme D... interjette appel du jugement du 26 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 juin 2020 par lequel le préfet du Nord lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure.
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
2. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... épouse D... réside en France, accompagnée de son époux, depuis neuf ans. Le refus de titre de séjour qui lui a été opposé le 15 janvier 2014 à la suite du rejet de sa demande d'asile n'a pas été accompagné d'une mesure d'éloignement en raison de son état de santé, Mme D... souffrant d'un syndrome anxio-dépressif sévère résultant d'un état de stress post-traumatique pour lequel elle bénéficie d'un traitement médicamenteux. L'intéressée s'est finalement vu délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade valable du 23 septembre 2014 au 22 septembre 2015 tandis que son époux se voyait, pour l'accompagner, délivrer un titre de séjour en qualité de visiteur. Si Mme D... n'a pas obtenu le renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étranger malade, elle a néanmoins déposé une nouvelle demande de titre de séjour en raison de son état de santé et s'est ainsi vu délivrer, jusqu'à la date de l'arrêté attaqué du 12 juin 2020, sans interruption, des récépissés de demande de titre de séjour. Il suit de là que jusqu'à la date de l'arrêté attaqué, Mme D... n'avait jamais fait l'objet d'une mesure d'éloignement et vivait en France depuis neuf ans sous couvert ou bien d'attestation de demande d'asile ou de récépissés de demande de titre de séjour, ou bien d'un titre de séjour, l'arrêté attaqué étant intervenu, en outre, plus d'un an et demi après l'avis du 14 novembre 2019 du collège des médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration. Dès lors, dans les circonstances particulières de l'espèce, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et en l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet du Nord doit être regardé comme ayant commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation de Mme D.... Par suite, l'appelante est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 juin 2020 par lequel le préfet du Nord lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure. Il convient donc de prononcer l'annulation du jugement du 26 janvier 2021 et l'annulation de l'arrêté du préfet du Nord du 12 juin 2020.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
3. Il résulte de ce qui vient d'être dit qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet du Nord de délivrer un titre de séjour à Mme D... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu de prononcer une astreinte.
Sur les frais liés à l'instance :
4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à Me Thieffry, conseil de Mme D..., sous réserve qu'elle renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2005152 du 26 janvier 2021 du tribunal administratif de Lille est annulé.
Article 2 : L'arrêté du 12 juin 2020 par lequel le préfet du Nord lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au préfet du Nord de délivrer un titre de séjour à Mme B... épouse D... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : L'Etat versera à Me Eve Thieffry la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... épouse D..., au ministre de l'intérieur, préfet du Nord et à Me Eve Thieffry.
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière
Anne-Sophie Villette
N°21DA01483 4