Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 14 janvier 2021 par lequel le préfet du Pas-de-Calais l'a obligé à quitter le territoire français sans délai à destination de la Tunisie et l'a interdit de retour sur le territoire français pendant une année et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros au titre de l'article 39 de la loi du 10 juillet 1991.
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Par un jugement n°2100328 du 8 mars 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 8 et 30 avril et 8 octobre 2021, M. C... A..., représenté par Me Ghizlaine Debbagh Boutarbouch, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de faire droit à ses demandes de première instance tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Pas-de-Calais du 14 janvier 2021 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Anne Khater, première conseillère ;
- et les observations de Me Ghizlaine Debbagh Boutarbouch représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant tunisien né le 26 mai 1984, déclare être entré en France le 1er janvier 2017. Le 14 janvier 2021, alors qu'il était entendu par les services de police au commissariat d'Arras dans le cadre d'une enquête administrative de simulation de mariage, auquel le Procureur de la République d'Arras a en définitive indiqué ne pas s'opposer, M. A... s'est vu notifier un arrêté du même jour du préfet du Pas-de-Calais l'obligeant à quitter le territoire français sans délai avec une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'une année. Par le jugement du 8 mars 2021, dont M. A... relève appel, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
2. En premier lieu, M. A... ne peut utilement se prévaloir de l'irrégularité de la procédure de notification de l'arrêté contesté qui est en tout état de cause sans incidence sur sa légalité. Le moyen tiré de ce qu'il serait entaché d'un détournement de procédure en raison des conditions de sa notification ne peut donc qu'être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 12 de la convention européenne de sauvegarde et des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " A partir de l'âge nubile, l'homme et la femme ont le droit de se marier et de fonder une famille selon les lois nationales régissant l'exercice de ce droit ".
4. Il ressort des pièces du dossier que le droit au séjour de M. A... a été contrôlé à l'occasion d'une enquête diligentée en raison de son projet de mariage. Cette enquête ayant révélé l'irrégularité de son séjour sur le territoire français, l'obligation de quitter le territoire français sans délai opposée par le préfet du Pas-de-Calais s'est bornée à tirer les conséquences de la présence irrégulière en France de l'intéressé, sans qu'il ne ressorte d'aucune pièce du dossier qu'elle aurait été motivée par la volonté de faire échec à ce projet de mariage. Par ailleurs, cette décision n'a ni pour objet, ni pour effet de lui interdire de se marier. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que cette décision méconnaît les stipulations de l'article 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni qu'elle procède d'un détournement de procédure.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) ".
6. M. A... déclare être entré en France janvier 2017. A la date de la décision en litige, il résidait ainsi sur le territoire français depuis quatre ans seulement, après avoir vécu jusqu'à l'âge de trente-sept ans dans son pays d'origine. S'il expose entretenir une relation avec une ressortissante française avec laquelle il avait pour projet de se marier au mois de janvier 2021, cette relation, débutée tout au plus au cours de l'année 2020, était particulièrement récente, sans qu'aucun enfant n'en soit issu. Il ne se prévaut d'aucune autre attache privée ou familiale en France. Enfin, M. A... ne justifie d'aucune insertion particulière. Dans ces circonstances, la décision en litige ne peut être regardée comme portant au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts qu'elle poursuit. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :
7. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa numérotation en vigueur : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III (...) sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
8. En premier lieu, il résulte de ce qui a été énoncé aux points 2 à 6 du présent arrêt que M. A... n'est pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.
9. En second lieu, et pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'interdiction de retour sur le territoire français en litige méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant alors qu'il est sans enfant sur le territoire français et n'exerce pas l'autorité parentale sur les enfants de Mme D.... Ces deux moyens doivent donc être écartés.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur.
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière
Anne-Sophie Villette
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N°21DA00793