Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par deux requêtes distinctes, la caisse primaire d'assurance maladie du Havre a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, de condamner le centre hospitalier intercommunal du Pays des Hautes Falaises de Fécamp à lui verser la somme de 134 023,44 euros au titre des débours exposés en faveur de Mme A... B..., avec intérêts capitalisés, l'indemnité forfaitaire de gestion prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale et la somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, d'autre part, de condamner le groupe hospitalier du Havre à lui verser la somme de 71 179,74 euros au titre des débours exposés en faveur de Mme A... B..., avec intérêts capitalisés, l'indemnité forfaitaire de gestion prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale et la somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n°1800424,1800438 du 11 juin 2020, le tribunal administratif de Rouen a condamné le centre hospitalier intercommunal du Pays des Hautes Falaises de Fécamp à verser à la caisse primaire d'assurance maladie du Havre une somme totale de 4364,26 euros en indemnisation des débours exposés pour le compte de son assurée, avec intérêts au taux légal à compter du 12 février 2018 capitalisés à compter du 12 février 2019, une somme de 1 091 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion et une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par le même jugement, le tribunal administratif de Rouen a condamné le groupe hospitalier du Havre à verser à la caisse primaire d'assurance maladie du Havre une somme totale de 13 957,14 euros en indemnisation des débours exposés pour le compte de son assurée, avec intérêts au taux légal à compter du 12 février 2018 capitalisés à compter du 12 février 2019, une somme de 1 091 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion et une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 13 août 2020 et 20 décembre 2021, le groupe hospitalier du Havre, représenté par Me Vincent Boizard, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il l'a condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie du Havre une somme totale de 13 957,14 euros avec intérêts au taux légal à compter du 12 février 2018 capitalisés à compter du 12 février 2019 et une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2°) de mettre à la charge de la caisse primaire d'assurance maladie du Havre une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Anne Khater, première conseillère ;
- les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public ;
- et les observations de Me Nathalie Nuza représentant le groupe hospitalier du Havre.
Considérant ce qui suit :
1. Les 9 et 30 janvier 2003, Mme A... B... a été opérée au sein du centre hospitalier intercommunal du Pays des Hautes Falaises de Fécamp pour la pose d'une bandelette trans-obturatrice destinée à résoudre une incontinence urinaire et pour une hystérectomie. Sortie de l'hôpital le 7 février 2003, elle y a été réadmise dès le 17 février pour des pyorrhées qui ont persisté, malgré l'antibiothérapie alors prescrite. En avril 2003, a été constatée l'extériorisation de la bandelette trans-obturatrice et un deuxième épisode infectieux au niveau vaginal. Une antibiothérapie par Augmentin a alors été prescrite. Le 12 mai 2003, des prélèvements bactériens effectués à la clinique du Val-de-Seine ont révélé une infection par cocci gram positifs (peptostreptococcus) et bacille gram négatifs anaérobies. La persistance des pyorrhées malgré l'antibiothérapie a conduit le praticien de la clinique du Val-de-Seine à envisager la présence d'un corps étranger à l'origine de ces écoulements et à opérer l'intéressée le 8 juillet 2003 pour une résection du dôme vaginal, intervention au cours de laquelle un fragment d'une prothèse de promontofixation utérine posée en 1993 a été retrouvé et extrait. L'ablation de ce fragment de prothèse a permis l'arrêt des pyorrhées. En phase post-opératoire, Mme B... a présenté une suppuration chronique de la paroi abdominale en raison d'une troisième infection par staphylocoque doré justifiant son admission, le 5 septembre 2003, au centre hospitalier Jacques Monod du Havre, puis une opération, le 15 septembre 2003, pour reprise de la cicatrice médiane sous-ombilicale avec excision des berges cutanées a minima. En novembre et décembre 2003, des prélèvements bactériologiques effectués au niveau de la cicatrice abdominale ont révélé la présence de staphylocoque doré méticilline sensible tandis qu'une collection sous-cutanée a été mise en évidence par échographie. Le 30 avril 2004, Mme B... a été hospitalisée et opérée au centre hospitalier du Havre pour une cellulite infectieuse de la paroi abdominale. Le prélèvement bactériologique effectué à l'occasion de ce quatrième épisode infectieux a mis en évidence la présence de staphylocoque doré et d'enterobacter cloacae.
2. Le 27 septembre 2004, Mme B... a été à nouveau admise, à sa demande, au centre hospitalier Jacques Monod pour une cure d'éventration avec plastie abdominale, afin que soient réduites des cicatrices inesthétiques. L'intervention a été suivie d'un cinquième épisode infectieux, caractérisé par une suppuration abdominale par staphylocoque doré six jours après, traitée par antibiotique. En juin 2005, une échographie abdominale a montré une collection sous-cutanée. Pour ce sixième épisode infectieux, la patiente a été adressée en urgence au centre hospitalier du Havre le 18 août 2005 puis opérée, le 26 août 2005, d'un abcès de paroi situé sur la cicatrice de plastie abdominale. Les prélèvements bactériologiques réalisés quelques jours plus tard, le 8 septembre 2005, ont révélé la présence de staphylocoque doré. La cicatrisation complète a été obtenue à la mi-octobre 2005. Deux échographies réalisées en juin 2006 et janvier 2007 ont révélé des plages liquidiennes et des collections sous-cutanées tandis qu'un prélèvement bactériologique a mis en évidence la présence de staphylocoque doré. Mme B... a ensuite été opérée, le 7 février 2007, d'une fistule cutanée et d'une récidive de l'éventration à la clinique de l'Abbaye de Fécamp.
3. Mme B... a saisi la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux d'une demande d'indemnisation à l'encontre du centre hospitalier intercommunal du Pays des Hautes Falaises de Fécamp, du centre hospitalier Jacques Monod du Havre appartenant au groupe hospitalier du Havre et d'un praticien de la clinique du Val-de-Seine. Une expertise a été ordonnée et confiée aux docteurs Boutin, gynécologue, et Carbone, médecin hygiéniste dont les rapports ont été déposés le 30 décembre 2005 et le 19 mars 2008 et qui ont fixé la consolidation de l'état de santé de l'intéressée au 10 mars 2007. Par deux lettres en date des 9 et 13 octobre 2017, la caisse primaire d'assurance maladie du Havre a adressé au centre hospitalier intercommunal du Pays des Hautes Falaises de Fécamp et au groupe hospitalier du Havre une demande de remboursement des débours exposés en faveur de Mme B..., qui ont toutes deux été rejetées. Par un jugement du 11 juin 2020, le tribunal administratif de Rouen a condamné le centre hospitalier intercommunal du Pays des Hautes Falaises de Fécamp à verser à la caisse primaire d'assurance maladie du Havre une somme totale de 4 364,26 euros et le groupe hospitalier du Havre à lui verser une somme de 13 957,14 euros, en indemnisation des débours exposés pour le compte de son assurée, ces deux sommes étant assorties des intérêts au taux légal à compter du 12 février 2018, capitalisés à compter du 12 février 2019, outre chacun une somme de 1 091 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion et une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Le groupe hospitalier du Havre relève appel des condamnations prononcées à son encontre, estimant que sa responsabilité ne saurait être engagée en raison du cinquième épisode infectieux subi par Mme B... au cours de son hospitalisation du 27 septembre 2014.
Sur la responsabilité du groupe hospitalier du Havre :
4. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. / Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère (...) ". Doit être regardée, au sens de ces dispositions, comme présentant un caractère nosocomial une infection survenant au cours ou au décours de la prise en charge d'un patient et qui n'était ni présente, ni en incubation au début de celle-ci, sauf s'il est établi qu'elle a une autre origine que la prise en charge.
5. Il résulte de l'instruction et en particulier du rapport d'expertise du 30 décembre 2005 que Mme B... a été hospitalisée au centre hospitalier Jacques Monod du Havre, à sa demande, le 27 septembre 2004, pour cure d'éventration avec plastie abdominale et a présenté six jours après l'intervention une suppuration à staphylocoque doré qui a été traitée par antibiothérapie. Ce cinquième épisode infectieux, favorisé comme tous les autres par la multiplicité des interventions pratiquées sur Mme B..., est survenu un an et neuf mois après les interventions initiales de janvier 2003 au centre hospitalier intercommunal du Pays des Hautes Falaises de Fécamp. Il ne résulte d'aucun élément de l'instruction que cette infection de la paroi abdominale, survenue au décours de la prise en charge de l'éventration de Mme B... au centre hospitalier Jacques Monod du Havre, aurait été présente ou en incubation au début de cette prise en charge le 27 septembre 2004, nonobstant la circonstance que le germe à l'origine de cette infection avait très probablement une origine endogène, s'agissant d'un staphylocoque présent sur les zones cicatricielles de la peau de Mme B.... Le groupe hospitalier du Havre n'établit pas davantage qu'elle aurait une autre origine que cette prise en charge consistant en particulier en des reprises cicatricielles de nature à permettre l'introduction de ce germe dans l'organisme, cette infection s'étant manifestée le sixième jour après l'intervention chirurgicale. Le groupe hospitalier du Havre n'est donc pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que sa responsabilité était engagée sur le fondement des dispositions de l'article L. 1142-1 I du code de la santé publique en raison de cet épisode infectieux.
Sur les droits de la caisse primaire d'assurance maladie du Havre à l'égard du groupe hospitalier du Havre :
6. C'est par de justes motifs, énoncés au point 28 du jugement attaqué, non contestés en appel, que les premiers juges ont mis à la charge du groupe hospitalier du Havre le remboursement à la caisse primaire d'assurance maladie du Havre d'une somme de 13 957,14 euros au titre des dépenses de santé actuelles correspondant à la période d'hospitalisation de Mme B... au centre hospitalier Jacques Monod du Havre allant du 27 septembre 2004 au 21 octobre 2004.
Sur les intérêts et la capitalisation :
7. C'est également par de justes motifs, énoncés aux points 31 à 33 du jugement attaqué, non contestés en appel, que les premiers juges ont assorti la somme citée au point 6 du présent arrêt des intérêts au taux légal à compter du 12 février 2018, avec capitalisation à compter du 12 février 2019 ainsi qu'à chaque échéance annuelle ultérieure.
Sur l'indemnité forfaitaire de gestion :
8. Il résulte des dispositions du neuvième alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale que le montant de l'indemnité forfaitaire qu'elles instituent est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un plafond dont le montant est révisé chaque année par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget. Le jugement du 11 juin 2020 du tribunal administratif de Rouen, qui a fixé à 13 957,14 euros le montant des indemnités dues à la caisse primaire d'assurance maladie du Havre par le groupe hospitalier du Havre, a accordé à la caisse, au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, une somme de 1 091 euros correspondant au plafond fixé par l'arrêté du 21 décembre 2019 alors en vigueur. Si le plafond a été réévalué par la suite, la caisse ne peut prétendre à une augmentation du montant de l'indemnité forfaitaire de gestion dès lors que les sommes qui lui sont dues au titre des prestations versées à Mme B... n'ont pas été majorées.
9. Il résulte de tout ce qui précède que la requête en appel du groupe hospitalier du Havre doit être rejetée, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dont elle est assortie. Les conclusions incidentes présentées par la caisse primaire d'assurance maladie du Havre au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion doivent être rejetées ainsi que, dans les circonstances de l'espèce, ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête du groupe hospitalier du Havre est rejetée.
Article 2 : Les conclusions d'appel incident présentées par la caisse primaire d'assurance maladie du Havre et au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la caisse primaire d'assurance maladie du Havre, au groupe hospitalier du Havre et au centre hospitalier intercommunal du Pays des Hautes Falaises de Fécamp.
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière
Anne-Sophie Villette
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N°20DA01229