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13/01/2022 | FRANCE | N°19DA02757

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 13 janvier 2022, 19DA02757


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... B... C... ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à leur charge au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2012 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui leur ont été assignées au titre des années 2007 à 2012, ainsi que de la majoration de 80 % pour activité occulte infligée sur le fondement de l'article 1728 du code général des impôts.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... B... C... ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à leur charge au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2012 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui leur ont été assignées au titre des années 2007 à 2012, ainsi que de la majoration de 80 % pour activité occulte infligée sur le fondement de l'article 1728 du code général des impôts.

Par un jugement n° 1705484 du 18 octobre 2019, le tribunal administratif de Lille, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à hauteur des dégrèvements prononcés par l'administration en cours d'instance, a rejeté le surplus des conclusions de leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 décembre 2019 et le 27 juillet 2020, M. et Mme B... C..., représentés par Me Ducellier, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de leur accorder la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à leur charge au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2012 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui leur ont été assignées au titre des années 2007 à 2012, demeurant en litige ;

3°) de leur accorder la décharge de la majoration de 80 % pour activité occulte infligée sur le fondement de l'article 1728 du code général des impôts ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Sauveplane, président assesseur,

- les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme B... C... ont fait l'objet d'une vérification de comptabilité pour une activité non déclarée de location de salles de réception et de chambres d'hôtes dont l'existence avait été signalée à l'administration fiscale par l'autorité judiciaire dans le cadre des dispositions de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales. Les intéressés n'ayant pas présenté de comptabilité pour cette activité, l'administration a reconstitué le chiffre d'affaires et a évalué d'office le chiffre d'affaires taxable et les bénéfices industriels et commerciaux résultant de cette activité. En conséquence, l'administration les a assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2007 à 2012 et a rappelé les droits de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2012, en suivant la procédure de taxation d'office. M. et Mme B... C... relèvent appel du jugement du 18 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ainsi mis à leur charge au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2012 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui leur ont été assignées au titre des années 2007 à 2012, ainsi que de la majoration de 80 % pour activité occulte infligée sur le fondement de l'article 1728 du code général des impôts

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable : " L'autorité judiciaire doit communiquer à l'administration des finances toute indication qu'elle peut recueillir, de nature à faire présumer une fraude commise en matière fiscale ou une manœuvre quelconque ayant eu pour objet ou ayant eu pour résultat de frauder ou de compromettre un impôt, qu'il s'agisse d'une instance civile ou commerciale ou d'une information criminelle ou correctionnelle même terminée par un non-lieu. " Aux termes de l'article L. 76 B du même livre : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ".

3. Il résulte de l'instruction que le vérificateur a mentionné, dans la proposition de rectification du 4 août 2014, que l'administration avait été rendue destinataire par l'autorité judiciaire d'informations, contenues dans une note datée du 5 décembre 2013, sur le fondement de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, laissant présumer la réalisation d'une fraude en matière fiscale par M. et Mme B... C.... Cette même proposition de rectification mentionne que le chiffre d'affaires a été reconstitué, en l'absence de comptabilité présentée par les contribuables, en se fondant notamment, mais pas exclusivement, sur les procès-verbaux d'audition et les copies de chèques obtenus par le biais d'un droit de communication effectué à la suite de la transmission des informations par l'autorité judiciaire. En conséquence, l'administration a suffisamment informé les contribuables de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition. Il ne résulte pas de l'instruction que M. et Mme B... C... auraient demandé la communication de ces documents. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales : " Peuvent être évalués d'office : / 1° Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus provenant d'entreprises industrielles, commerciales ou artisanales, ou des revenus d'exploitations agricoles imposables selon un régime de bénéfice réel, lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 53 A du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal ; / (...) ". Aux termes de l'article L. 68 du même livre, dans sa rédaction applicable : " La procédure de taxation d'office prévue aux 2° et 5° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure. / Toutefois, il n'y a pas lieu de procéder à cette mise en demeure : / (...) / 3° Si le contribuable s'est livré à une activité occulte, au sens du deuxième alinéa de l'article L. 169 ; / (...) ".

5. Dans le cas où un contribuable n'a ni déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire, ni fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, son activité est réputée occulte s'il n'est pas en mesure d'établir qu'il a commis une erreur, justifiant qu'il ne se soit acquitté d'aucune de ses obligations déclaratives.

6. En l'espèce, si M. et Mme B... C... soutiennent que les résultats de l'activité considérée par l'administration comme occulte ont été déclarés, il résulte au contraire de l'instruction que ces derniers n'ont déclaré que les seuls revenus fonciers pour un montant de 5 900 euros au titre de l'année 2006, de 4 100 euros au titre de l'année 2007, de 4 628 euros au titre de l'année 2008 et de 6 548 euros au titre de l'année 2009, alors que l'administration a mis en évidence que les requérants exerçaient en réalité une activité de location de salles de réception du Château de Roucourt ainsi que de chambres d'hôtes pour l'organisation de réceptions, séminaires, mariages ou autres événements, avec une offre de restauration au cours des années 2007 à 2012, sans avoir procédé aux déclarations qu'ils étaient tenus de souscrire, ni fait connaître leur activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce. Le service a pu consulter, au cours de la vérification de comptabilité, un classeur de recettes mettant en évidence un chiffre d'affaires de 31 974 euros au titre de l'année 2007, de 44 910 euros au titre de l'année 2008 et de 44 483 euros au titre de l'année 2009. Eu égard à l'importance de la différence entre une activité de location de salles et l'activité d'organisation de réceptions, séminaires, mariages ou autres événements avec une offre de restauration et à l'importance de la différence entre les revenus déclarés et les revenus effectivement perçus, les contribuables ne sauraient invoquer une erreur de bonne foi justifiant l'absence de déclaration de cette activité aux services fiscaux. Dès lors, M. et Mme B... C... doivent être regardés, ainsi que le soutient l'administration, comme ayant exercé une activité occulte qui dispensait l'administration de leur adresser, préalablement à l'engagement d'une procédure de taxation d'office, une mise en demeure de régularisation. Le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'imposition doit, par suite, être écarté.

7. En troisième et dernier lieu, il résulte de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales que l'administration n'est pas tenue, en cas de taxation d'office, d'inviter le contribuable à présenter ses observations dans les trente jours de l'envoi de la notification des bases ou des éléments ayant servi au calcul des impositions établies d'office, une discussion par le contribuable de ces impositions ne pouvant être engagée qu'après mise en recouvrement de l'impôt, dans le cours de la procédure contentieuse. Dès lors, les requérants ne peuvent utilement invoquer l'absence de débat oral et contradictoire dès lors qu'ils ont été, à bon droit, taxés d'office.

Sur le bien-fondé des impositions supplémentaires en litige :

En ce qui concerne le délai de reprise spécial :

8. Aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. / (...) / Par exception aux dispositions du premier alinéa, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due, lorsque le contribuable exerce une activité occulte. L'activité occulte est réputée exercée lorsque le contribuable n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire et soit n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, soit s'est livré à une activité illicite. ".

9. Ainsi qu'il a été déjà dit au point 6, M. et Mme B... C... doivent être regardés comme ayant exercé une activité occulte. C'est donc à bon droit que l'administration a fait usage du délai spécial de reprise prévu à l'article L. 169 du livre des procédures fiscales en cas de découverte d'une activité occulte par un contribuable. Dès lors, ainsi que le tribunal administratif, dont le jugement est suffisamment motivé, l'a relevé, le moyen tiré de la prescription du droit de reprise de l'administration ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la charge de la preuve :

10. Aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ". Aux termes de l'article R. 193-1 du même livre : " Dans le cas prévu à l'article L. 193 le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré ".

11. M. et Mme B... C... ayant été imposés d'office, la charge de la preuve du caractère exagéré des suppléments d'imposition mis à leur charge leur incombe.

En ce qui concerne le montant des bénéfices industriels et commerciaux :

12. Devant la cour, les requérants se bornent à soutenir qu'il ne saurait leur être reproché de ne pas avoir fourni les pièces justificatives alors que la réclamation du 28 juillet 2015 comportait des pièces justificatives et que les premiers juges n'ont pas apprécié le véritable fondement des éléments apportés. Toutefois, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus, à bon droit, par les premiers juges aux points 9 à 21 du jugement attaqué.

En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

13. Devant la cour, les requérants se bornent à dresser une liste des points selon eux inexacts relevés dans le jugement pour critiquer la rectification à laquelle l'administration a procédé en matière de taxe sur la valeur ajoutée. Toutefois, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus, à bon droit, par les premiers juges aux points 22 à 28 du jugement attaqué.

Sur les pénalités :

14. En premier lieu, aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : / (...) / c. 80 % en cas de découverte d'une activité occulte. / (...) ".

15. Il résulte de ces dispositions que, dans le cas où un contribuable n'a ni déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire, ni fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, l'administration doit être réputée apporter la preuve, qui lui incombe, de l'exercice occulte de l'activité professionnelle si le contribuable n'est pas lui-même en mesure d'établir qu'il a commis une erreur justifiant qu'il ne se soit acquitté d'aucune de ses obligations déclaratives.

16. Ainsi qu'il a déjà été dit au point 6, eu égard à l'importance de la différence entre une activité de location de salles et l'activité d'organisation de réceptions, séminaires, mariages ou autres événements avec une offre de restauration et à l'importance de la différence entre les revenus déclarés et les revenus effectivement perçus, les contribuables ne sauraient invoquer une erreur de bonne foi justifiant l'absence de déclaration de cette activité aux services fiscaux. Dès lors, l'existence d'une activité occulte étant établie par l'administration, c'est à bon droit qu'elle a assorti les rectifications en litige de la majoration de 80 % prévue au c de l'article 1728 du code général des impôts.

17. En second lieu, aux termes de l'article L. 80 E du livre des procédures fiscales : " La décision d'appliquer les majorations et amendes prévues aux articles 1729, 1732 et 1735 ter du code général des impôts est prise par un agent de catégorie A détenant au moins un grade fixé par décret qui vise à cet effet le document comportant la motivation des pénalités. ".

18. Il résulte des termes mêmes de l'article L. 80 E du livre des procédures fiscales que les pénalités pour activité occulte prévues au c du 1 de l'article 1728 du code général des impôts n'ont pas à être notifiées avec le visa du supérieur hiérarchique du vérificateur. Dès lors, le moyen n'est pas fondé et doit être écarté.

19. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

20. L'Etat n'étant pas partie perdante à l'instance, les conclusions de M. et Mme B... C... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B... C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... B... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

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