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16/12/2021 | FRANCE | N°19DA02446

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 16 décembre 2021, 19DA02446


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) Pharmacie Barre a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2012, 2013 et 2014, pour un montant de 154 803 euros, de prononcer la restitution de la somme, d'un montant de 15 480 euros, qu'elle a déjà acquittée et de maintenir le sursis de paiement à concurrence de la fraction d'imposition non encore acquit

tée, soit à concurrence de la somme de 139 323 euros.

Par un jugement n° 18023...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) Pharmacie Barre a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2012, 2013 et 2014, pour un montant de 154 803 euros, de prononcer la restitution de la somme, d'un montant de 15 480 euros, qu'elle a déjà acquittée et de maintenir le sursis de paiement à concurrence de la fraction d'imposition non encore acquittée, soit à concurrence de la somme de 139 323 euros.

Par un jugement n° 1802397 du 18 septembre 2019, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 novembre 2019, la SELARL Pharmacie Barre, représentée par Me Léonard, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 à 2014 pour un montant de 154 803 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 7 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Sauveplane, président-assesseur,

- les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public,

- et les observations de Me Léonard, représentant la SELARL Pharmacie Barre.

Considérant ce qui suit :

1. La société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) Pharmacie Barre, qui exploite une officine de pharmacie au 23 rue Jean Jaurès à Vermelles (Pas-de-Calais), a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration a remis en cause les provisions qu'elle avait constituées au titre de la dépréciation du fonds de commerce à hauteur de 248 026 euros pour l'exercice clos en 2012, 141 562 euros pour l'exercice clos en 2013 et 240 222 euros pour l'exercice clos en 2014. En conséquence, l'administration l'a assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des années 2012 à 2014. La société Pharmacie Barre relève appel du jugement du 18 septembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés ainsi mises à sa charge.

Sur les conclusions tendant à la décharge des impositions en litige :

2. Les impositions supplémentaires ayant été établies selon la procédure de redressement contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, la preuve du bien-fondé de celles-ci incombe à l'administration. Toutefois, il incombe à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de ses prétentions et les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. S'agissant d'une rectification portant sur une écriture comptable de dépréciation, il appartient au contribuable de justifier non seulement du montant de la dépréciation, mais de la correction de son inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de sa déductibilité.

3. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / (...) / 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice. (...) ". Aux termes de l'article 38 sexies de l'annexe III au code général des impôts : " La dépréciation des immobilisations qui ne se déprécient pas de manière irréversible, notamment les terrains, les fonds de commerce, les titres de participation, donnent lieu à la constitution de provisions dans les conditions prévues au 5° du I de l'article 39 du code général des impôts ".

4. Il résulte de ces dispositions qu'une entreprise qui constate, par suite d'événements en cours à la clôture de l'exercice, une dépréciation non définitive d'un élément de son actif immobilisé, peut, alors même que celui-ci est amortissable, constituer une provision dont le montant ne peut excéder, à la clôture de l'exercice, la différence entre la valeur nette comptable et la valeur probable de réalisation de l'élément dont il s'agit, à la condition notamment que le mode de calcul de la provision soit propre à exprimer avec une approximation suffisante le montant probable de cette dépréciation.

5. Pour les exercices ouverts depuis le 1er janvier 2005, le plan comptable général et notamment son article 322-5 impose aux entreprises d'apprécier, à chaque clôture des comptes et à chaque situation intermédiaire, s'il existe un indice quelconque montrant qu'un ou plusieurs de leurs actifs ont pu perdre de leur valeur. Lorsqu'un tel indice existe, un test de dépréciation consistant à comparer la valeur nette du bien considéré et sa valeur actuelle doit être effectué afin de confirmer ou non la perte de valeur. En présence d'une telle perte de valeur, l'entreprise peut, le cas échéant, déprécier l'actif concerné en fonction de sa valeur actuelle.

6. Il résulte de l'instruction que le fonds de commerce de pharmacie d'officine exploité par la société Pharmacie Barre a été comptabilisé en immobilisation le 1er avril 2009 à l'actif du bilan de cette société pour une valeur brute de 2 247 000 euros. Après dépréciation, la valeur nette du fonds de commerce était, à la clôture de l'exercice clos le 31 août 2014, de 1 616 990 euros. Les dotations aux provisions pour dépréciation, qui représentent 28 % de la valeur brute du fonds de commerce, ont été calculées par différence entre la valeur brute du fonds et une valorisation théorique du prix de cession du fonds obtenu par un pourcentage du chiffre d'affaires.

7. Pour justifier du principe de la provision, la société Pharmacie Barre fait valoir qu'elle a acquis le 1er avril 2009 ce fonds de commerce pour un prix de 2 247 000 euros. Ce prix d'acquisition a été calculé par référence à un chiffre d'affaires HT réalisé pendant l'exercice clos le 30 juin 2008 de 2 421 268 euros HT. Lors de l'acquisition, la valorisation du fonds de commerce tenait également compte d'un chiffre d'affaires HT prévisionnel de 2,6 millions d'euros, d'une marge prévisionnelle de 25 % et d'un excédent brut d'exploitation prévisionnel de 340 000 euros HT, alors que divers événements auraient eu, selon la société requérante, un impact négatif sur la valorisation du fonds de commerce, à savoir le départ sans successeur d'un médecin généraliste exerçant à proximité, la fermeture d'un parking d'un grand magasin proche de l'officine, la reprise d'une officine voisine sous une enseigne qui pratiquerait une politique de prix bas.

8. Toutefois, si le chiffre d'affaires a subi une diminution de 9 % pour l'exercice clos en 2012, de 13 % pour l'exercice clos en 2013 et de 20 % pour l'exercice clos en 2014 par rapport au chiffre d'affaires réalisé par le cédant en 2008 avant la reprise du fonds par la société requérante, le bénéfice comptable réalisé après neutralisation de la provision contestée est en hausse de 11 % pour l'exercice clos en 2012, en hausse de 5 % pour l'exercice clos en 2013 et seulement en baisse de 15 % pour l'exercice clos en 2014 par rapport au bénéfice réalisé par le cédant en 2008. Quant à l'excédent brut d'exploitation, il n'a pas connu de baisse dès lors qu'il s'établit à 245 764 euros pour l'exercice clos en 2012, 270 432 euros pour l'exercice clos en 2013 et 260 494 euros pour l'exercice clos en 2014. Dès lors, la société Pharmacie Barre ne justifie pas du principe de la dépréciation.

9. S'agissant du quantum, l'administration fait valoir, sans être contredite, qu'à la suite d'un changement dans le modèle économique des pharmacies, le seul chiffre d'affaires ne permet plus de mesurer la performance économique et l'évaluation d'un fonds de commerce d'officine de pharmacie n'est plus réalisé par un pourcentage du chiffre d'affaires mais à partir de l'excédent brut d'exploitation de sorte que la valorisation du fonds par application d'un pourcentage du chiffre d'affaires n'est pas pertinente et ne peut justifier une dépréciation représentant 28 % de la valeur du fonds au 31 août 2014. Dès lors, la société Pharmacie Barre ne justifie pas non plus du quantum de la dépréciation.

10. Il résulte de ce qui précède que la société Pharmacie Barre n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés en litige.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. L'Etat n'étant pas partie perdante à l'instance, les conclusions de la société Pharmacie Barre tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SELARL Pharmacie Barre est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SELARL Pharmacie Barre et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

N°19DA02446 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA02446
Date de la décision : 16/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-04-04 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Bénéfices industriels et commerciaux. - Détermination du bénéfice net. - Provisions.


Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Mathieu Sauveplane
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SELARL VINCENT LEONARD AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 28/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-12-16;19da02446 ?
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