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07/12/2021 | FRANCE | N°21DA01177

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 07 décembre 2021, 21DA01177


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 22 juin 2020 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2003566 du 12 février 2021, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 mai 2021, Mme A..., représ

enté par Me Cécile Madeline, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et l'arrêté du préfet d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 22 juin 2020 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2003566 du 12 février 2021, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 mai 2021, Mme A..., représenté par Me Cécile Madeline, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime du 22 juin 2020 ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " salarié " ou " vie privée et familiale ", à titre subsidiaire de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 2 000 euros au profit de Me Madeline, qui renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Aurélie Chauvin, présidente-assesseure, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant algérien, né le 13 mars 1981, est entré en France le 5 février 2015 sous couvert d'un visa court séjour valable du 23 octobre 2014 au 18 avril 2015 et s'y est maintenu à l'expiration de son visa. A la suite d'une interpellation, il a fait l'objet de deux arrêtés du 2 août 2018 par lesquels le préfet de la Seine-Maritime l'a obligé à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination, a prononcé à son égard une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans et l'a assigné à résidence, qui ont été annulés par jugement du tribunal administratif de Rouen le 6 août 2018. Le 3 août 2018, M. A... a sollicité son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 22 juin 2020, le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé l'Algérie comme pays de destination. M. A... relève appel du jugement du 12 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. En premier lieu, M. A... reprend en appel les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen sans les assortir d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critique pas utilement la réponse apportée par le tribunal administratif. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) 5° au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

4. Il ressort des pièces du dossier que A... est entré en France le 5 février 2015 sous couvert d'un visa de court séjour " visiteur " valable 90 jours qui ne l'autorisait pas à s'y installer durablement. Il est constant qu'il s'est maintenu sur le territoire et durant plus de trois années avant de solliciter un titre de séjour, le 3 aout 2018, au lendemain de son interpellation. S'il fait valoir une excellente insertion professionnelle puisqu'il travaille en tant que coiffeur depuis octobre 2015 au sein de différents salons de coiffure et indique que l'entreprise " Adam coiffure " dans laquelle il est employé depuis le 1er novembre 2019 aurait effectué les démarches de demande d'autorisation de travail et s'est engagée à payer la taxe d'introduction de main d'œuvre à l'Office français de l'immigration et de l'intégration afin de le recruter en contrat à durée indéterminée, ces éléments sont insuffisants pour démontrer l'intensité, la stabilité et l'ancienneté de sa vie privée et familiale en France justifiant qu'un titre lui soit délivré sur le fondement des stipulations précitées. En outre, M. A... qui est célibataire et sans enfant à charge, dispose de nombreuses attaches dans son pays d'origine où résident ses parents et plusieurs membres de sa fratrie, et où il a vécu jusqu'à ses trente-quatre ans. Par suite, dans les circonstances de l'espèce et en dépit de la durée du séjour en France de M. A... et de sa bonne intégration par le travail, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas porté à son droit au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision a été prise et n'a ainsi pas méconnu les stipulations du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien, ni celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'en refusant de faire usage de son pouvoir discrétionnaire pour régulariser sa situation, le préfet aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 312-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Font l'objet d'une publication les instructions, les circulaires ainsi que les notes et réponses ministérielles qui comportent une interprétation du droit positif ou une description des procédures administratives. Les instructions et circulaires sont réputées abrogées si elles n'ont pas été publiées, dans des conditions et selon des modalités fixées par décret. / Un décret en Conseil d'Etat pris après avis de la commission mentionnée au titre IV précise les autres modalités d'application du présent article. " Aux termes de l'article L. 312-3 du même code : " Toute personne peut se prévaloir des documents administratifs mentionnés au premier alinéa de l'article L 312-2, émanant des administrations centrales et déconcentrées de l'Etat et publiés sur des sites internet désignés par décret. / Toute personne peut se prévaloir de l'interprétation d'une règle, même erronée, opérée par ces documents pour son application à une situation qui n'affecte pas des tiers, tant que cette interprétation n'a pas été modifiée. / (...) ". Aux termes de l'article D. 312-11 du même code : " Les sites internet mentionnés au premier alinéa de l'article L. 312-3 sont les suivants : / (...) / ; www.interieur.gouv.fr ; (...) " et aux termes de l'article R. 312-10 : " Les sites internet sur lesquels sont publiés les documents dont toute personne peut se prévaloir dans les conditions prévues à l'article L. 312-3 précisent la date de dernière mise à jour de la page donnant accès à ces documents ainsi que la date à laquelle chaque document a été publié sur le site. / Ces sites comportent, sur la page donnant accès aux documents publiés en application de l'article L. 312-3, la mention suivante : "Conformément à l'article L. 312-3 du CRPA, toute personne peut se prévaloir de l'interprétation d'une règle, même erronée, opérée par les documents publiés sur cette page, pour son application à une situation qui n'affecte pas des tiers, tant que cette interprétation n'a pas été modifiée, sous réserve qu'elle ne fasse pas obstacle à l'application des dispositions législatives ou réglementaires préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l'environnement ". / (...) "

6. Il résulte des dispositions précitées que, pour être opposable, une circulaire du ministre de l'intérieur adressée aux préfets doit faire l'objet d'une publication sur le site www.interieur.gouv.fr par le biais d'une insertion dans la liste définissant les documents opposables et comportant les mentions prescrites à l'article R. 312-10, et doit comporter un lien vers le document intégral publié sur le site " Légifrance.gouv.fr ", site relevant du Premier ministre.

7. M. A... soutient que résidant en France depuis cinq ans au jour de l'acte contesté et justifiant d'un contrat de travail et d'une ancienneté de travail de presque cinq ans, il remplissait les conditions énoncées par la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière, en vue de la régularisation de sa situation au regard du droit au séjour. Toutefois, la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur n'a pas été publiée dans les conditions prévues au point 5. Si elle a fait l'objet d'une mise en ligne sur le site Légifrance le 1er avril 2019, elle ne figure toutefois pas parmi la liste des documents opposables. Sa publication ne comporte ainsi aucune date de déclaration d'opposabilité. Dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que le requérant ne pouvait utilement se prévaloir de cette circulaire qui ne comporte que des orientations générales que le ministre de l'intérieur a pu adresser aux préfets pour les éclairer dans la mise en œuvre de leur pouvoir de régularisation. Le moyen tiré de l'erreur de droit ne peut dès lors qu'être écarté.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. M. A... se borne à reprendre les moyens tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée, qu'elle est illégale dès lors qu'elle se fonde sur un refus de séjour lui-même illégal, qu'elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Toutefois, il n'apporte, en appel, aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif et ne critique pas la réponse apportée par le tribunal administratif. Par suite, il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'écarter ces moyens.

Sur la décision fixant le pays de destination :

9. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

10. Si M. A... soutient qu'il craint pour sa vie en cas de retour dans son pays, il se borne à évoquer un conflit familial intense avec ses frères. A supposer qu'il ait entendu soulever la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il n'assortit pas son moyen de précision suffisante permettant au juge d'en apprécier le bien-fondé. Par suite ce moyen ne peut qu'être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et à Me Cécile Madeline.

Copie sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.

N°21DA01177 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21DA01177
Date de la décision : 07/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme Chauvin
Rapporteur ?: Mme Aurélie Chauvin
Rapporteur public ?: M. Baillard
Avocat(s) : SELARL EDEN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-12-07;21da01177 ?
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