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18/11/2021 | FRANCE | N°19DA01829

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 18 novembre 2021, 19DA01829


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C... et Mme D... B... ont demandé au tribunal administratif de Rouen, par deux demandes séparées, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2012.

Par un jugement n° 1701771, 1701772 du 25 juin 2019, le tribunal administratif de Rouen, après avoir joint ces deux demandes, a déchargé M. C... et Mme B... A... la majoration pour manquement délib

éré afférente à la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et de contribution...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C... et Mme D... B... ont demandé au tribunal administratif de Rouen, par deux demandes séparées, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2012.

Par un jugement n° 1701771, 1701772 du 25 juin 2019, le tribunal administratif de Rouen, après avoir joint ces deux demandes, a déchargé M. C... et Mme B... A... la majoration pour manquement délibéré afférente à la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2012 et a rejeté le surplus des conclusions de leur demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 1er août 2019 sous le n° 19DA01829, M. C..., représenté par Me Goupil, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2012 ;

2°) de lui accorder la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2012 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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II. Par une requête, enregistrée le 1er août 2019 sous le n° 19DA01830, Mme B..., représentée par Me Goupil, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2012 ;

2°) de lui accorder la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2012 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

* le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

* le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

* le rapport de M. Sauveplane, président-assesseur,

* et les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes n° 19DA01829 et n° 19DA01930, introduites par M. C... et Mme B..., présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a donc lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt.

2. La société en nom collectif (SNC) Manichao, dont M. C... et Mme B... sont associés et co-gérants, exploitait un fonds de commerce de bar-tabac et avait opté pour l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés. Cette société a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au cours de laquelle le service vérificateur a constaté que la somme correspondant au produit de la vente du fonds de commerce, intervenue le 29 novembre 2011, avait été déposée sur un livret B le 6 décembre 2011 puis virée le 29 mai 2012 sur un compte de séquestre par le notaire en charge de la vente du fonds avant d'être finalement versée par ce même notaire le 16 juillet 2012 sur un compte de consignation auprès de la Caisse des dépôts et consignations au nom de la société vérifiée. L'administration fiscale a regardé cette somme, diminuée du montant du capital social et du compte courant d'associé, comme constituant une avance sur boni de liquidation de la société, réputée distribuée à ses associés. En conséquence, l'administration a imposé cette avance sur boni de liquidation entre les mains des deux associés, à concurrence de leurs droits dans la société, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, au titre de l'année 2012. Par un jugement du 25 juin 2019, le tribunal administratif de Rouen, après avoir joint les deux demandes dont il était saisi par M. C... et Mme B..., a déchargé ceux-ci de la majoration pour manquement délibéré dont était assortie la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mise à leur charge au titre de l'année 2012 et a rejeté le surplus des conclusions de leurs demandes. M. C... et Mme B... demandent l'annulation de ce jugement en tant qu'il ne leur donne pas entière satisfaction tandis que le ministre des finances, de l'économie et de la relance en demande l'annulation en tant qu'il a déchargé les intéressés de la pénalité pour manquement délibéré dont la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mise à leur charge au titre de l'année 2012 avait été assortie.

Sur les conclusions tendant à la décharge des impositions en litige :

3. Il résulte de l'instruction que la SNC Manichao a cédé son fonds de commerce le 29 novembre 2011 pour un montant de 680 000 euros. Le 6 décembre 2011, le prix de cession a été déposé sur un livret bancaire puis sur un compte séquestre chez le notaire en charge des opérations de vente du fonds de commerce. En raison d'un désaccord entre les associés et époux, par ailleurs en instance de divorce, portant notamment sur le montant des apports effectués par chacun d'eux, la somme de 373 230,81 euros a été versée sur un compte de consignation ouvert à la Caisse des dépôts et consignations au nom de la SNC Manicho par le notaire le 16 juillet 2012 en application de la réglementation notariale et, notamment, des articles 14 et 15 du décret n° 45-117 du 19 décembre 1945. L'administration a estimé que les opérations de liquidation de la société étaient achevées au 31 aout 2012 et que le virement de la somme de 373 230 euros constituait un boni de liquidation de la SNC Manichao. Elle a considéré que les associés avaient perçu une avance sur boni de liquidation à hauteur de 201 256 euros après avoir soustrait du montant disponible le capital et le montant des comptes courants d'associés.

4. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / a. Sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par personnes ou sociétés interposées à titre d'avances, de prêts ou d'acomptes. / (...) ".

5. En premier lieu, s'agissant de l'existence d'un boni de liquidation, il résulte de l'instruction que la dissolution anticipée de la SNC Manichao et la mise en liquidation amiable de cette société n'est intervenue qu'à compter du 29 juillet 2013, date de l'assemblée générale extraordinaire. En 2012, la société n'était ni dissoute ni liquidée et conservait donc la propriété des sommes qui figuraient toujours à l'actif du bilan au 31 août 2012 et sur un compte ouvert au nom de la société. Si les opérations de liquidation ont effectivement débuté en 2012, elles n'étaient toutefois pas achevées en 2012 dès lors qu'il existait un litige entre les associés sur le montant des apports effectués par chacun d'entre eux en compte courant. La fin des opérations de liquidation n'a été constatée que lors de l'assemblée générale du 29 mai 2019 et a fait apparaître un boni de liquidation à partager de 212 103,97 euros, qui n'est pas identique au montant du boni de liquidation de 373 230 euros que l'administration a cru identifier dès 2012 ni même au montant de l'avance sur boni de liquidation de 201 256 euros que l'administration a cru devoir imposer au titre de l'année 2012 entre les mains des associés. Cette différence s'explique précisément par l'existence d'un litige entre les associés sur le montant des avances en compte courant d'associé. Dès lors, les opérations de liquidation ne pouvaient être réputées terminées en 2012. Par suite, aucun boni de liquidation ne peut être constaté en 2012.

6. En second lieu, s'agissant de l'avance sur boni de liquidation, il résulte de l'instruction que les associés n'avaient pas directement accès aux fonds, lesquels n'étaient accessibles que par l'intermédiaire du notaire sur accord unanime des associés constaté par procès-verbal d'assemblée générale, conformément aux statuts de la SNC Manichao. Or, il est constant qu'existait en 2012, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, un désaccord entre les associés, par ailleurs en instance de divorce, qui a d'ailleurs motivé le placement de la somme en cause dans un compte de consignation. Il ne peut être avancé qu'il ne tenait qu'aux associés de s'entendre pour appréhender les sommes dès lors qu'un litige existait précisément entre eux. Dès lors, le virement de la somme de 373 203,81 euros sur un compte de consignation ouvert à la Caisse des dépôts et consignations au nom de la SNC Manichao par le notaire chargé de la vente du fonds de commerce de la société en application de la réglementation notariale ne valait pas, dans les circonstances de l'espèce, mise à disposition aux associés d'une avance sur le boni de liquidation à hauteur de 201 256 euros. Par suite, c'est à tort que l'administration a imposé cette somme entre les mains de M. C... et Mme B..., associés de la SNC Manichao, sur le fondement du a. de l'article 111 du code général des impôts.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... et Mme B... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté les conclusions de leurs demandes tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2012, et à demander, dans cette mesure, l'annulation de ce jugement.

Sur les conclusions reconventionnelles du ministre :

8. Il résulte de ce qui a été dit aux points n° 5 à 7 que c'est à tort que l'administration a imposé la somme en litige entre les mains de M. C... et Mme B... sur le fondement du a. de l'article 111 du code général des impôts. Par suite, les conclusions reconventionnelles du ministre ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante à l'instance, le versement à M. C... et à Mme B... d'une somme de 1 500 euros, chacun, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : M. C... est déchargé de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2012.

Article 2 : Mme B... est déchargée de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2012.

Article 3 : L'Etat versera à M. C... et à Mme B... la somme de 1 500 euros, chacun, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : L'article 3 du jugement n° 1701771, 1701772 du 25 juin 2019 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 5 : Les conclusions reconventionnelles du ministre de l'économie, des finances et de la relance sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... C..., à Mme D... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Nos19DA01829,19DA01830 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA01829
Date de la décision : 18/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-03-01 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Règles générales. - Impôt sur le revenu. - Détermination du revenu imposable. - Revenus à la disposition.


Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Mathieu Sauveplane
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : OCTIES AVOCATS;OCTIES AVOCATS;OCTIES AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 30/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-11-18;19da01829 ?
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