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19/10/2021 | FRANCE | N°21DA00435

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 19 octobre 2021, 21DA00435


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux demandes, M. A... E... D... a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 14 août 2020 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination et, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 10 janvier 2021 l'assignant à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 2100259, 2100268 du 9 février

2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a ren...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux demandes, M. A... E... D... a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 14 août 2020 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination et, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 10 janvier 2021 l'assignant à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 2100259, 2100268 du 9 février 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a renvoyé à la formation collégiale compétente les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 14 août 2020 portant refus d'un titre de séjour (article 2), a annulé les décisions du 14 août 2020 portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination ainsi que la décision du 10 janvier 2021 par laquelle le préfet du Pas-de-Calais a assigné M. D... à résidence pour une durée de quarante-cinq jours (article 3) et a mis à la charge de l'Etat une somme de 800 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 (article 4).

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 février 2021, le préfet du Pas-de-Calais demande à la cour d'annuler les articles 3 et 4 de ce jugement et de rejeter les conclusions de première instance de M. D....

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Aurélie Chauvin, présidente-assesseure,

- et les observations de M. C... B..., pour le préfet du Pas-de-Calais.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... E... D..., ressortissant pakistanais né le 7 décembre 2001, est entré en France en juillet 2019. Il a été placé auprès des services de l'aide sociale à l'enfance par une ordonnance de placement provisoire du tribunal judiciaire de Saint-Omer en date du 1er août 2019. Le 5 novembre 2019, il a présenté une demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 14 août 2020, le préfet du Pas-de-Calais a rejeté cette demande et a assorti ce refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de renvoi et, par un arrêté du 10 janvier 2021, il l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. Le préfet du Pas-de-Calais relève appel du jugement du 9 février 2021 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé ces décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le Pakistan comme pays de destination et portant assignation à résidence et a mis à sa charge la somme de 800 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

2. Aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 portant la mention "salarié" ou la mention "travailleur temporaire" peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française (...) ".

3. Lorsqu'il examine une demande de titre de séjour présentée sur le fondement de ces dispositions dans le cadre de l'admission exceptionnelle au séjour, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année suivant son dix-huitième anniversaire, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans et qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle. Disposant d'un large pouvoir d'appréciation, il doit ensuite prendre en compte la situation de l'intéressé appréciée de façon globale au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Il appartient au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation ainsi portée.

4. Il ressort des pièces du dossier que M. D... a été confié à l'aide sociale à l'enfance à l'âge de dix-sept ans et sept mois et était à la date de l'arrêté contesté, scolarisé depuis plus de six mois en première année de CAP électricité au Lycée professionnel Fernand Degrugillier. Il est constant qu'il justifie du caractère réel et sérieux de cette formation qu'il suit avec assiduité et implication et bénéficie d'élogieuses appréciations de l'ensemble de l'équipe pédagogique. Il justifie par ailleurs de liens amicaux tissés en France et d'avis favorables sur ses capacités d'intégration. Il n'est pas contesté qu'il ne constitue pas une menace pour l'ordre public.

5. Si le préfet reconnaît l'investissement et les bons résultats obtenus par M. D... dans la préparation de son diplôme, il soutient que l'intéressé, entré récemment sur le territoire à quelques semaines de sa majorité, sans visa lui permettant de poursuivre des études, ne démontre pas être isolé au Pakistan où il a toujours vécu avant de venir en France et où demeureraient sa mère et sa fratrie. Toutefois, les dispositions précitées de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne fixent pas de critère relatif aux conditions d'entrée de l'étranger mineur sollicitant un titre sur ce fondement et n'exigent pas non plus que le demandeur soit isolé dans son pays d'origine. En outre, si M. D... ne nie pas avoir des liens familiaux au Pakistan, la note sociale établie par la structure d'accueil indique qu'il n'a plus de relations avec les membres de sa famille restés dans son pays d'origine. Ainsi, M. D... satisfaisant aux conditions de séjour définies par l'article L. 313-15 précité, en lui refusant le titre de séjour sollicité, le préfet du Pas-de-Calais a commis une erreur manifeste dans l'appréciation qu'il a portée globalement sur la situation de l'intéressé. Il suit de là que c'est à bon droit que le premier juge a estimé que les décisions l'obligeant à quitter le territoire français, fixant le pays de renvoi et l'assignant à résidence étaient dépourvues de base légale.

6. Il résulte de ce qui précède que le préfet du Pas-de-Calais n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé les décisions des 14 août 2020 et 10 janvier 2021 portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays de destination et assignant M. D... à résidence pour une durée de quarante-cinq jours et mis à sa charge les frais liés à l'instance.

7. M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que son avocat, Me Hentz, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet du Pas-de-Calais est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à Me Hentz une somme de 1 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, au préfet du Pas-de-Calais, à M. A... E... D... et à Me Myriam Hentz.

N°21DA00435 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21DA00435
Date de la décision : 19/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme Seulin
Rapporteur ?: Mme Aurélie Chauvin
Rapporteur public ?: M. Baillard
Avocat(s) : HENTZ

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-10-19;21da00435 ?
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