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21/09/2021 | FRANCE | N°20DA01156

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 21 septembre 2021, 20DA01156


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté en date du 30 août 2017 par lequel le préfet du Nord a prononcé à son encontre une mesure d'interdiction de séjour à l'intérieur du périmètre dédié à la braderie de Lille du 1er septembre 2017, 19h00, au 3 septembre 2017, 18h00.

Par un jugement n° 1709299 du 4 décembre 2019, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 août

2020, M. D..., représenté par Me Myriam Hentz, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et l'a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté en date du 30 août 2017 par lequel le préfet du Nord a prononcé à son encontre une mesure d'interdiction de séjour à l'intérieur du périmètre dédié à la braderie de Lille du 1er septembre 2017, 19h00, au 3 septembre 2017, 18h00.

Par un jugement n° 1709299 du 4 décembre 2019, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 août 2020, M. D..., représenté par Me Myriam Hentz, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et l'arrêté attaqué ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 500 euros au profit de son conseil, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 modifiée ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B... C..., présidente-rapporteure,

- et les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté en date du 30 août 2017, le préfet du Nord a prononcé à l'encontre de M. A... D... une mesure d'interdiction de séjour à l'intérieur du périmètre de la braderie de Lille du vendredi 1er septembre 2017 à 19 heures au dimanche 3 septembre 2017 à 18 heures. Par un jugement n° 1709299, le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande de M. D... tendant à l'annulation de cet arrêté. M. D... relève régulièrement appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article 5 de la loi du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence, dans sa rédaction alors applicable : " La déclaration de l'état d'urgence donne pouvoir au préfet dont le département se trouve en tout ou partie compris dans une circonscription prévue à l'article 2, dans le but de prévenir des troubles à la sécurité et à l'ordre publics : (...) 3° D'interdire le séjour dans tout ou partie du département à toute personne à l'égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l'ordre publics. L'arrêté énonce la durée, limitée dans le temps, de la mesure, les circonstances précises de fait et de lieu qui la motivent, ainsi que le territoire sur lequel elle s'applique, qui ne peut inclure le domicile de la personne intéressée. / Ces mesures tiennent compte de la vie familiale et professionnelle des personnes susceptibles d'être concernées. "

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable. " Aux termes de l'article L. 122-1 du même code : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 121-2 du même code : " Les dispositions de l'article L. 121-1 ne sont pas applicables : / 1° En cas d'urgence ou de circonstances exceptionnelles (...) ".

4. M. D... soutient que l'arrêté attaqué est entaché d'un vice de procédure en ce qu'il a été pris sans qu'il ait été préalablement mis à même de présenter des observations. Toutefois, si la braderie de Lille avait été annoncée depuis plusieurs semaines, il ressort des pièces du dossier qu'il existait une incertitude sur le maintien de l'édition 2017 notamment suite à la commission des attentats terroristes en Espagne les 17 et 18 août 2017, visant des piétons sur des artères très fréquentées douze jours avant la décision en litige. Le communiqué de presse relatif à la sécurisation de la braderie a d'ailleurs été publié le 30 août 2017, soit deux jours seulement avant le début de l'événement. Dans ces conditions, le préfet du Nord a pu légalement adopter l'arrêté contesté sans qu'au préalable M. D... ait été mis à même de présenter ses observations dans les conditions prévues par les dispositions précitées, eu égard à l'urgence qui s'attachait à cette adoption. Par suite, M. D... n'est pas fondé à soutenir que cet arrêté aurait été pris à l'issue d'une procédure irrégulière.

5. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que, pour prendre la décision d'interdiction de séjour contestée, le préfet du Nord a notamment pris en compte les éléments mentionnés dans une note blanche des services de renseignement produite en première instance et versée au débat contradictoire. Il ressort de cette note que M. D... est connu défavorablement des services de police pour des faits d'enlèvement et de séquestration, de menaces, de délit contre les personnes et de violences volontaires commis en 2002 et pour lesquels il a été condamné à trente mois de détention dont dix-huit mois fermes. Il fait aussi l'objet d'un suivi psychologique et nourrit un vif ressentiment envers les institutions à la suite d'une agression qui n'aurait, selon lui, pas fait l'objet d'une prise en charge de la part des institutions judiciaires. Il a également été identifié aux mois de septembre 2016 et mars 2017 aux abords d'une salle de prière musulmane située dans un quartier à Vannes où il a rencontré un individu influent au sein de la communauté musulmane locale, qui était converti à l'islam radical et qui lui-même fréquentait un individu, artificier, appartenant au groupe " Khorassan " lié à Al-Qaïda et mort en Syrie en 2015. L'implication de l'intéressé dans la vie associative de sa commune par des actions menées notamment en 2014 et 2015 et le suivi d'un cursus universitaire au sein de l'université Bretagne-Sud de Vannes ne sont pas de nature à remettre en cause l'ensemble des éléments précités recueillis par les services de police. Il est en outre constant que l'organisation de la braderie de Lille constitue un événement important entraînant un rassemblement considérable de personnes, susceptible de favoriser la commission d'attentats terroristes. Or, à la date de l'arrêté contesté, le 30 août 2017, la menace terroriste pesant sur la France demeurait très élevée, notamment en raison de la commission des attentats terroristes en Espagne les 17 et 18 août 2017. Dès lors, le préfet du Nord a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, estimer qu'il existait de sérieuses raisons de penser que le comportement de M. D... constituait une menace pour la sécurité et l'ordre publics.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Sa requête doit donc être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D..., au ministre de l'intérieur et à Me Myriam Hentz.

Copie sera adressée pour information au préfet du Nord.

N°20DA01156 3


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20DA01156
Date de la décision : 21/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-06-01 Police. - Aggravation exceptionnelle des pouvoirs de police. - État d'urgence.


Composition du Tribunal
Président : Mme Seulin
Rapporteur ?: Mme Aurélie Chauvin
Rapporteur public ?: M. Baillard
Avocat(s) : HENTZ

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-09-21;20da01156 ?
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